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Grand Prix de Bahreïn : la formule 1, un business en pole position

Grand Prix de Bahreïn  la formule 1 un business en pole position
La série Netflix "Drive to survive" a ravivé la passion des fans pour le sport mécanique et élargi son audience. Les écuries sont devenues des franchises lucratives aux perspectives financières alléchantes.

Les accros du V6 turbo vont pouvoir rugir ! Le dimanche 20 mars, le Grand Prix (GP) de Bahreïn marquera le top départ du championnat 2022 de formule 1. Cette année encore, le duel entre Lewis Hamilton chez Mercedes et Max Verstappen chez Red Bull devrait galvaniser les foules. Ce dernier l'avait emporté in extremis, au tout dernier tour de la saison, sur le septuple champion du monde britannique. La compétition est, comme bien d'autres, chamboulée par la guerre en Ukraine, qui a poussé l'organisateur à annuler le Grand Prix de Sotchi, en Russie, tandis que l'écurie américaine Haas s'est séparée de son pilote russe Nikita Mazepin et de son sponsor principal Uralkali, une société minière détenue par le père de Mazepin. 

La formule 1 est, de loin, le sport le plus onéreux au monde, car elle nécessite de lourds développements techniques. C'est aussi devenu une discipline extrêmement rentable. Portée par le succès de la série Netflix Drive to survive, dont la dernière saison a été suivie par 50 millions de personnes sur la planète, la F1 profite d'un énorme regain d'intérêt de la part des constructeurs automobiles. Audi discute ainsi d'un partenariat moteur avec McLaren pour 2026, tandis que Porsche envisage son retour sur les circuits au travers d'une alliance avec l'écurie Red Bull Racing. 

Elles paraissent loin, ces années de crise post-2008 qui virent les géants BMW, Toyota et Honda jeter l'éponge ! "La formule 1 était à l'époque une course à l'armement permanente. Toyota, par exemple, dépensait annuellement 500 millions de dollars pour un retour sur investissement hasardeux. Au bout de sept années sans victoire, ils ont renoncé", raconte Marc Limacher, éditeur du Business book GP.  

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Le contexte a bien changé. Portée par une saison 2021 haletante, l'audience a explosé - pour le plus grand bonheur de Canal +, son diffuseur en France. L'an dernier, 445 millions de personnes dans le monde ont regardé au moins une course à la télévision, dont 71 millions de Chinois. "Pour les constructeurs occidentaux, la formule 1 constitue un excellent moyen de développer leur notoriété en Chine, mais aussi au Moyen-Orient où se déroulent plusieurs Grands Prix", souligne Martin Piot, vice-président de l'agence de pub W. 

Redevance, sponsors et produits dérivés

Le retour en grâce des bolides doit énormément à la plateforme américaine Netflix, qui a su habilement se faire une place dans le paddock et transformer ce sport mécanique un peu froid en divertissement avec ses coups d'éclat, de malchance et de traîtrise. La série plaît à des personnes qui n'étaient pas intéressées par la F1 à la base. Résultat, le public s'est rajeuni et féminisé. "La formule 1 est devenue mainstream", résume Marc Limacher.  

La brillante scénarisation de Drive to survive, entrecoupée de scènes grisantes à l'intérieur des véhicules, a renforcé la notoriété du sport mécanique aux Etats-Unis et convaincu de puissants sponsors américains d'investir. Red Bull a ainsi décroché un contrat historique à près de 500 millions de dollars (453 millions d'euros) sur cinq ans avec l'éditeur informatique Oracle ! 

Pour rentabiliser des investissements annuels d'environ 250 millions d'euros par équipe, les écuries peuvent compter sur trois sources majeures de revenus. Elles perçoivent de l'organisateur Liberty Media environ la moitié de ses recettes, qui comprennent notamment les redevances télévisées. A cela s'ajoute le sponsoring - une dizaine de marques affichent leur logo sur les différentes parties de chaque véhicule -, ainsi que les produits dérivés. Ces derniers constituent un business extrêmement lucratif pour les équipes les plus cotées. "Ferrari génère chaque année 2,5 milliards de dollars en vêtements, lunettes et autres porte-clefs. Soit davantage qu'avec ses ventes de voitures", indique Graham Robertson, consultant en marques, dans un billet sur le sujet. 

Ajoutons que les constructeurs Ferrari et Mercedes vendent des moteurs aux autres écuries, ce qui génère des revenus complémentaires. Honda n'a plus d'écurie mais fabrique les moteurs des voitures Red Bull et Alpha Tauri. L'occasion pour le géant japonais de démontrer son expertise technologique. 

L'investissement en formule 1 peut également rejaillir positivement sur le coeur de métier d'un groupe automobile. La R&D nécessaire pour développer des bolides approchant les 400 kilomètres-heure ouvrant la voie à des transferts de technologie sur les véhicules de série. Certaines innovations conçues pour les courses permettent ainsi d'améliorer les véhicules vendus dans le commerce. C'est ainsi grâce à la formule 1 qu'Alfa Romeo a renforcé l'aérodynamisme de ses Giula, et que Renault a conçu son moteur hybride E-Tech qui équipe la Clio, le Captur et la Mégane. 

"Hyper rentable" pour Mercedes

Mais la rentabilité de la F1 tient surtout à la notoriété incroyable qu'elle procure aux constructeurs. L'écurie Mercedes indique générer l'équivalent de 4,5 milliards d'euros annuels de revenus publicitaires. Comprendre : le groupe allemand devrait aligner chaque année 4,5 milliards d'euros en réclames pour obtenir le même impact en termes de visibilité. "Or l'écurie ne lui coûte que 250 millions d'euros par an. C'est donc hyper rentable", décrypte Marc Limacher. 

Pour les leaders Red Bull ou Mercedes, il ne fait donc aucun doute que l'opération soit largement gagnante. Mais est-ce aussi le cas des écuries de fin de classement ? "On avait coutume de dire que seules les quatre premières équipes étaient rentables, car elles captaient l'essentiel de la visibilité. Ce n'est plus vrai. Liberty Media a l'ambition de faire des écuries des franchises dont la valeur dépasse le milliard d'euros - y compris les challengers comme Alfa Romeo ou Haas", poursuit Marc Limacher. 

L'organisateur n'accepte que dix équipes sur la ligne de départ, or l'intérêt grandissant autour de la discipline augmente le nombre de candidats potentiels. Ce qui, mécaniquement, fait croître la valeur des écuries. Les financiers l'ont bien compris. Fin 2020, le fonds d'investissement MSP Sports a aligné 200 millions d'euros pour acquérir un tiers du capital de McLaren Racing, tandis que le groupe chimique Ineos s'arrogeait un tiers du capital de l'écurie Mercedes pour 250 millions d'euros. 

"A partir de 2023, la différence se fera sur la piste"

Présent en formule 1 depuis 1977, Renault peut se frotter les mains d'être resté fidèle à ce sport mécanique. A peine arrivé à la tête du constructeur français, il y a deux ans, son nouveau patron Luca de Meo a confirmé l'engagement de la marque au losange dans la discipline. L'Italien a annoncé dans la foulée que l'écurie porterait désormais les couleurs d'Alpine, la marque premium que le groupe a fait renaître de ses cendres. Son positionnement haut de gamme correspond bien à celui de ses rivales. 

Pari réussi. La saison dernière, la victoire d'Esteban Ocon au GP de Hongrie et le podium de son coéquipier Fernando Alonso ont fait les affaires d'Alpine. La marque sportive a écoulé 2 659 véhicules l'an dernier. Une quantité certes modeste, mais en forte progression sur un an (+ 74 %), et dont près de la moitié provient déjà de l'étranger. "La F1 développe la notoriété et la crédibilité d'Alpine, elle lui permet d'attaquer de nouveaux marchés à l'international", commente Martin Piot. La marque espère atteindre l'équilibre financier en 2025. 

Les nouvelles règles de la formule 1 vont la rendre encore plus attractive auprès du public et des constructeurs dans les années qui viennent. L'organisation impose le gel du développement de nouveaux moteurs jusqu'en 2025, ainsi qu'une limitation des dépenses annuelles à 145 millions de dollars pour les équipes châssis. De quoi faciliter la tâche aux rivales de Mercedes, dont les moyens colossaux lui ont permis d'écraser la concurrence ces dernières années. "Les performances techniques vont se niveler à partir de 2023. La différence se fera sur la piste. Le succès dépendra davantage du talent des pilotes", pronostique Marc Limacher. Les jeux seront plus ouverts, ce qui devrait alimenter le suspense. De belles confrontations en perspective... Et on peut compter sur Netflix pour assurer le service après-vente.  

Quelques chiffres

445 millions : le nombre de téléspectateurs ayant regardé au moins une course de F1 en 2021 

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250 millions d'euros : le montant des investissements annuels par équipe 

2,5 milliards de dollars : les recettes générées par les produits dérivés chez Ferrari 

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