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Villers-Cotterêts, Musée ou tremplin du français ?

VillersCotterêts Musée ou tremplin du français
La France accueille pour la première fois depuis 33 ans le Sommet de la Francophonie. Dans son discours inaugural, le président de la République,  Emmanuel Macron, a salué une langue "d'invention et de réinvention". Quel avenir pour la langue fran?

La France accueille pour la première fois depuis 33 ans le Sommet de la Francophonie. Dans son discours inaugural, le président de la République,  Emmanuel Macron, a salué une langue "d'invention et de réinvention". Quel avenir pour la langue française ? Notre éditorialiste Slimane Zeghidour nous livre son analyse.

« Créer, innover, entreprendre en français » ! C’est le mot d’ordre de ce sommet, le premier tenu en France depuis 33 ans. En choisissant Villers-Cotterêts pour l’organiser, Emmanuel Macron convoque l‘histoire et la géographie. 

Quand le roi François Ier y signe, l’été 1539, l’ordonnance instituant le français en tant qu’outil exclusif de la justice, de l’état-civil, en un mot de l’Etat, la carte de la France fait alors penser à un manteau d’Arlequin. Y cohabitent, en effet, seigneuries, principautés, enclaves étrangères ; Calais aux Anglais, le comtat Venaissin à la papauté, le Charolais aux Espagnols. Quinze millions d’habitants en font néanmoins le pays le plus peuplé d’Europe et le plus prospère. Toutefois, si un sujet sur dix seulement est citadin, Paris n’en abrite déjà pas moins d’un quart de million.

Quatre cents quatre-vingts cinq ans plus tard, la France est une république sur laquelle le soleil ne se couche jamais, selon la célèbre formule jadis attribuée à l’empire de Charles Quint, le grand rival de François 1er. Quant au français, qui n’est alors compris que par l’élite gravitant autour du Roi et lequel ne deviendra finalement l’idiome effectif de tous ses habitants qu’à la fin du… XIXème siècle, grâce à l’instruction publique, il est, de nos jours, la langue de plus de 320 millions de locuteurs répandus sur les cinq continents.

Pour autant, un cinquième seulement des francophones vit en France tandis que l’Afrique en englobe plus de la moitié, du Maghreb au golfe de Guinée. Le français est également le cinquième idiome international, après le mandarin, l’anglais, l’espagnol et l’hindi. Un rang plus qu’honorable, en dépit du recul qu’il subit, ô ironie de l’Histoire, dans l’Europe dont il fut, et ce jusqu’à l’orée du XXème siècle, la langue des rois et des princes, de Londres à Saint-Pétersbourg, en passant par Rome, Madrid et Athènes. Aussi, son essor -et son devenir- est-il désormais du ressort de son ex-domaine… colonial. Et c’est bien là que se niche sa force mais également sa vulnérabilité.

Ne prévoit on pas déjà un espace francophone de 750 millions de locuteurs à l’horizon 2050 ? Simplement, cette projection fort optimiste table davantage sur le taux de croissance démographique des locuteurs africains que sur un dessein géopolitique clairement formulé, doté d’une doctrine, d’un programme articulé et, bien entendu, de moyens sonnants et trébuchants, sans oublier, et c’est capital, la volonté manifeste d’y œuvrer vaille que vaille.

Pour s’y diriger et y parvenir tant soit peu, la lucidité est la condition sine qua non. Il y a lieu, avant tout, de regarder, sur un planisphère, l’état des lieux de l’espace francophone. Le constat saute aux yeux : l’Afrique en abrite le « tronc » humain et géographique, soit quasiment deux locuteurs sur trois ! Le francophone moyen est ainsi un Africain, maghrébin ou sub-saharien. Il dispose d’un revenu par habitant dix à quarante fois inférieur celui d’un « colocuteur » français, belge ou canadien. Il est souvent musulman ou chrétien et plutôt conservateur ; il n’a pas, le plus souvent, accès à l’électricité et, par conséquent, à la télévision et à l’Internet. Enfin, c’est un fait crucial, il vit dans un univers politique mouvant.

Un autre constat s’impose. Plus d’un membre de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) rejoint le Commonwealth -Rwanda, Cameroun- ou y postule -Togo- tandis que tel autre pays, dont le lien avec le français est pour le moins ténu, y adhère -Kosovo, Costa Rica, Bosnie-Herzégovine, Uruguay, Emirats arabes unis, Qatar-, alors qu’un pays comme l’Algérie refuse de s’y agréger. Ironique, le quotidien québécois Le Devoir y voit « Une joyeuse maison de fous ».

A la France, berceau et vecteur principal du français, se pose la question -et la responsabilité historique- de maintenir le niveau d’excellence de la langue de Molière et de Pasteur, à savoir sa capacité à exprimer, à transmettre et donc à inculquer la fine fleur du savoir. Et la question se pose d’autant plus crument au vu de la place que l’anglais, déjà langue de travail de l’UE, prend de plus en plus, au détriment du français, jusqu’au plus haut niveau de l’enseignement supérieur dans l’Hexagone. L’avenir du français dépend ainsi étroitement du rang scientifique, technologique et tout autant du rayonnement culturel de la France au plan international.

Il est donc plus impératif et vital que jamais de « créer, d’innover et d’entreprendre » en français.

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