« Taxe lapin » : Peut-on se faire « blacklister » par notre médecin ...
«Quand on ne vient pas, sans prévenir : on paye. » Lors de son discours de politique générale, Gabriel Attal s’est dit favorable à une « taxe lapin », une sanction financière à l’encontre des personnes n’honorant pas leurs rendez-vous médicaux. Le but : éviter d’occuper inutilement des créneaux horaires dont d’autres patients auraient pu bénéficier.
En attendant une potentielle loi sur le sujet, chaque médecin s’organise à sa façon. Parmi les solutions mises en place : le blacklistage. Certains professionnels refusent de prendre de nouveau en charge un patient qui n’a pas montré le bout de son nez plusieurs fois de suite.
Un médecin traitant a-t-il le droit de se séparer d’un de ses patients ?
Eh bien oui. L’article R.4127-47 du Code de la Santé publique, en vigueur depuis le 8 août 2004, stipule qu’« un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles ». Que ce soit en raison de nombreux rendez-vous non honorés, d’un profond désaccord sur un traitement important ou juste d’une mésentente, un médecin a parfaitement le droit de se séparer d’un patient, même s’il s’agit de son médecin traitant. « Quand on estime qu’il n’y a plus de relation de confiance avec un patient, on peut mettre fin à cette relation, explique Jean-Christophe Nogrette, médecin généraliste et secrétaire général adjoint de MG France. Cela arrive de temps en temps dans toutes les patientèles. »
Ce droit de refus a tout de même des limites. Le même article du Code de la Santé publique stipule que ce droit existe « hors cas d’urgence et celui où [le médecin] manquerait à ses devoirs d’humanité ». Un peu plus loin, il est également précisé : « quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée. » « On ne peut pas laisser un patient sans médecin traitant alors qu’il n’en trouve pas », poursuit Jean-Christophe Nogrette. C’est d’autant plus le cas lorsque la personne est atteinte d’une pathologie chronique évolutive, comme le diabète. « Ce n’est pas une urgence à la minute mais on ne peut pas l’abandonner à son titre sort. Il faut assurer une continuité des soins en attendant que quelqu’un d’autre puisse le prendre en charge. »
Quelles obligations le médecin doit-il tout de même assurer ?
Une fois que le médecin a pris sa décision, il doit en avertir le patient et « transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins. » « Le médecin n’a aucune obligation de justification, assure le secrétaire général adjoint de MG France. Une fois que le patient en est informé, s’il n’a rien à redire, cela ne va pas plus loin. »
Si cette passation semble facile à mettre en œuvre, cela peut s’avérer plus délicat en cas de différend. Jean-Christophe Nogrette en est l’exemple. « J’étais en gros conflit avec une patiente qui refusait de me donner le nom de son nouveau médecin. Elle ne voulait rien entendre, j’ai été obligé de transmettre son dossier au Conseil département de l’ordre, avec leur accord, pour qu’ils en aient la garde. »
Le médecin peut-il être sanctionné ?
Si le patient refuse la rupture, il peut porter plainte auprès du conseil de l’Ordre des médecins. Le conseil département de l’Ordre est alors tenu d’instruire la plainte, quelle qu’en soit la nature, et d’organiser une conciliation entre les parties. Si cela ne suffit pas, le cas passe en juridiction devant un tribunal professionnel et le juge devra s’assurer que le médecin a bien respecté les textes de loi.
Toutes nos infos sur la « taxe lapin » par iciEn 2022, Louis-Adrien Delarue, un médecin généraliste exerçant à Angoulême, avait décidé de rayer un homme de sa patientèle après plusieurs lapins. Le patient qui n’a manifestement pas apprécié ce rejet a porté plainte. Le juge a fini par donner raison au médecin.