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Soupçons de maltraitance dans une école talmudique : les responsables arrêtés, une quarantaine de mineurs pris en charge

Soupçons de maltraitance dans une école talmudique  les responsables arrêtés une quarantaine de mineurs pris en charge
Les jeunes âgés de 12 à 18 ans, sans « autorité parentale sur le territoire français », ont été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance.
La yeshiva Beth Yossef dans le domaine de Séricourt (Seine-et-Marne) en juin 2020.La yeshiva Beth Yossef dans le domaine de Séricourt (Seine-et-Marne) en juin 2020.
La yeshiva Beth Yossef dans le domaine de Séricourt (Seine-et-Marne) en juin 2020. YESHIVA BETH YOSSEF

Au lendemain de l’arrestation des responsables d’une école talmudique de Seine-et-Marne, lundi 31 janvier, une quarantaine d’élèves de cet établissement ultraorthodoxe flirtant avec la dérive sectaire ont été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE).

Située dans un domaine isolé à Bussières, à 60 kilomètres à l’est de Paris, la Yeshiva Beth Yossef accueillait quarante adolescents de plus de 12 ans, ainsi que vingt-deux jeunes majeurs, principalement de nationalité israélienne et américaine.

Les mineurs, sans « autorité parentale sur le territoire français », ont été pris en charge par l’ASE dans le cadre « d’un accueil administratif d’urgence sur cinq jours », a fait savoir le service dans un communiqué mardi. Lundi matin, seize des responsables de l’école avaient été interpellés et placés en garde à vue.

Dans un communiqué, la procureure de Meaux, Laureline Peyrefitte, a décrit un établissement qui accueillerait « de manière non déclarée de nombreux mineurs de nationalité américaine et israélienne ne parlant pas le français, dans des conditions abusives ». Parmi ces conditions : « Enfermement, confiscation des documents d’identité, conditions de vie dégradées, actes de maltraitance, absence d’accès à l’éducation et aux soins, et sans possibilité de revenir dans leurs familles. »

Enquête de la télévision publique israélienne

En juillet, un élève américain avait fugué de la yeshiva Beth Yossef et trouvé refuge à l’ambassade américaine à Paris. De novembre à décembre, d’autres adolescents se sont échappés. A partir de ce témoignage, la télévision publique israélienne enquêtait depuis plusieurs mois sur cet établissement.

« Il y a eu un témoignage, puis encore un autre et on s’est retrouvés avec une trentaine de témoignages des années 2000 à aujourd’hui, d’anciens étudiants affirmant avoir subi des violences, a déclaré le documentariste Dubi Kroitoru, qui coréalise avec Noa Tal le film Sortir de Bussières. Nous avions transmis ces éléments en juillet à la police française, tout, sur un plateau. »

Les parents des élèves actuellement scolarisés, qui pensaient confier les enfants à un établissement à la réputation dure mais sérieuse, sont sous le choc. « On nous a parlé de balades en forêt, de séjours au ski, ça avait l’air de l’école de Harry Potter, beau, grand, vert », a relaté Rivka Azoulay, 26 ans, la sœur d’un pensionnaire de 13 ans arrivé la semaine dernière de Jérusalem pour se « remettre dans le chemin de l’étude ».

Le mineur israélien, qui communiquait avec sa famille via une cabine téléphonique située dans le centre semblait « content », selon sa sœur, signalant juste que le bâtiment faisait « vieux ». Depuis l’arrestation et les placements de lundi, Mme Azoulay déplore n’avoir aucune nouvelle de son petit frère. « Où sont-ils ? On ne sait rien, c’est des mineurs, personne ne nous a appelés. Mon frère ne parle même pas français ! », s’inquiète-t-elle.

Des conditions « inadmissibles »

Le grand rabbin de France, Haïm Korsia, qui assure être en contact avec les adolescents, a condamné jeudi les « conditions inadmissibles » dans lesquelles vivaient ces élèves. « On ne peut pas accepter la mise en danger de la vie des enfants, les chefs d’accusation sont terribles, on verra comment l’enquête avance, les conditions dans lesquelles ils vivaient sont inadmissibles. Point », a-t-il déclaré.

L’état de délabrement du bâtiment était notamment connu au sein de la communauté. « J’ai alerté sur le fait que le bâtiment était sous le coup d’un arrêté municipal, cela n’a rien donné, on ne peut pas aider les gens contre leur gré », a témoigné M. Korsia.

Pas de téléphone portable, pas d’Internet, étude du soir au matin et peu de contacts avec la société : la yeshiva appartient à l’une des mouvances les plus rigoristes du hassidisme, dite « lituanienne », très présente en Israël et aux Etats-Unis, mais peu en France.

Selon le site Internet de l’école, l’institution Ohr Yossef, dont dépend la yeshiva, a été fondée en 1948 par le rabbin orthodoxe Gershon Liebman. « Aujourd’hui, la yeshiva est fière de son succès et regroupe plus d’une centaine d’étudiants, venant du monde entier (…). Les élèves y approfondissent assidûment leurs connaissances thoraiques afin de devenir eux-mêmes des maîtres de la Torah », est-il écrit sur le site.

Le Monde avec AFP

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