«Madame Sean Connery» : James Bond, c'est elle
La femme de l’acteur décédé est l’objet d’une série documentaire passionnante réalisée par sa petite-fille, la journaliste Stéphanie Renouvin.
Micheline Roquebrune n’est pas madame Emma Bovary. Certes, l’ennui bourgeois, les conventions, l’étroitesse provinciale la révulsent, mais elle a su agir, se dépêtrer de situations invraisemblables, avant de lier son existence à celle de l’acteur le plus cool et le plus célèbre de l’époque, l’Écossais Sean Connery.
Les gens viendront pour Sean et resteront pour Micheline
Stéphanie Renouvin
La série documentaire, en quatre épisodes, que lui consacre sa petite-fille, la journaliste Stéphanie Renouvin, révèle le parcours insoupçonné de cette petite femme, 1,57 mètre, si souriante, toujours à côté du grand homme révéré. «J’enregistre ma grand-mère depuis 2017, j’ai commencé avec mon iPhone parce que ce qu’elle me raconte depuis l’enfance est incroyable! Les gens viendront pour Sean et resteront pour Micheline», assure cette dernière qui a rassemblé et monté une somme de films en super-huit et autres photos inédites.
Avant Sean Connery, Micheline la Niçoise a grandi et vécu en Tunisie, foyer confortable, et déjà ce caractère fort, étonnant. Elle a épousé à 20 ans Jean-Pierre, un centralien. Léger souci: elle ne l’aime pas et le lui dit. Ils auront deux enfants, au Maroc, avant qu’un événement ne lui fasse entendre que la vie ne consiste pas à garer la voiture de travers et attendre le soir pour se coucher. Elle demande le divorce, il tente de la faire interner, elle s’échappe, il lui retire les enfants…
La deuxième tentative d’union éternelle, avec un golfeur proche du roi Hassan II, se révèle pire. Libre Micheline. Quand elle a exigé de divorcer à nouveau, elle est restée neuf mois captive au Maroc, privée de passeport, avant qu’elle ne puisse, grâce à une entrevue avec le roi, s’extirper et rejoindre son espion qui l’aimait.
Sean aurait-il eu la même carrière sans elle? Rien n’est moins sûr
Elle a connu Sean Connery à 40 ans en 1970. Elle et lui ne se sont plus quittés. Il en finissait avec Bond et avait confié une grande partie de sa fortune à un type véreux. Qui a sauvé et renfloué les caisses de ce triple zéro en matière de placements financiers ? Micheline, of course. «Elle lui était indispensable, elle organisait tout, gérait sa santé, faisait fructifier le patrimoine. Et aurait-il eu la même carrière sans elle? Rien n’est moins sûr», souligne sa petite-fille, qui fait parler l’homme un temps réputé le plus puissant de Hollywood, Michael Ovitz, ex-agent de son grand-père.
Sans Micheline devenue artiste peintre, Sean aurait refusé plusieurs rôles qui lui ont valu récompenses et acclamations. Se joue face caméra l’histoire d’un amour fou, d’une femme à la volonté exceptionnelle, d’un couple aux plaisirs simples malgré la gloire.
«Ils se fichaient de Hollywood… Avec ma sœur, on restait chaque été un mois à Marbella dans leur maison, mon grand-père nous emmenait manger une glace sur le port… On devait toujours écourter ce moment car les gens l’abordaient. Les vacances? On le voyait à tous les repas, sinon il travaillait dans son bureau ou partait au golf; c’est lui qui nous réveillait le matin, par peur que l’on ne dorme trop longtemps! »
Stéphanie Renouvin a reçu des tonnes de propositions de mettre en scène la saga du mâle comédien...Peu après sa mort en 2020, Stéphanie Renouvin a reçu des tonnes de propositions de producteurs pour récupérer les archives, mettre en scène la saga du mâle comédien dans un documentaire rutilant, ce qui sera fait, mais pas en France. Quelques mois plus tard, la même question venant d’un illustre inconnu d’une énième boîte de production la décide. Il lui a demandé ce qu’elle voulait faire, elle. Réponse instantanée: «Un documentaire sur ma grand-mère.» On comprend pourquoi.
« Madame Sean Connery», diffusé en intégralité le 9octobre, à 13h 15 sur France 2.