6.000 ogives, « Satan 2 »: que contient l'arsenal nucléaire de la Russie, le plus grand au monde?
Vladimir Poutine a annoncé dimanche qu’il mettait en alerte la "force de dissuasion" nucléaire russe. C’est le plus grand arsenal nucléaire du monde, devant les Etats-Unis. Les Russes possèdent, d’après les experts, plus de 6.000 ogives nucléaires. Alors là-dedans, il faut faire le tri, il y a des ogives qui en fait ne sont pas opérationnelles, qui sont en réserve, en fin de service ou qui vont être démantelées.
Mais si on regarde uniquement les ogives opérationnelles, ce qu’on appelle les ogives “déployées”, ça reste colossal. La Russie en possède plus de 1.600. Ça veut dire plus de 1.600 missiles nucléaires prêts à être lancés depuis le sol, depuis un sous-marin ou depuis un avion.
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Alors les Etats-Unis en ont un peu plus, mais les deux pays ont augmenté leur arsenal l’an dernier. Ils se sont mis d’accord sur une limite à ne pas dépasser, mais ils s’approchent de cette limite. Et surtout depuis dix ans, la Russie a largement modernisé son arsenal. Elle a dépensé énormément d’argent dans ce domaine. Et d’ailleurs, l’OTAN le disait encore récemment: dans le domaine nucléaire, la Russie impose désormais “des défis d’un genre nouveau”.
C’est-à-dire que ce sont des missiles encore plus puissants. Vladimir Poutine les présente fièrement lui-même ces dernières années, notamment celui qu'on surnomme "Satan 2". C’est l’OTAN qui le surnomme comme ça. "Satan 2", c’est le plus gros missile nucléaire intercontinental jamais conçu. Un missile qui peut frapper à plus de 10.000 kilomètres et qui peut détruire un territoire grand comme la France ou comme le Texas. C’est ce que disent en tout cas, les autorités et les médias russes. Il faut se méfier évidemment des annonces, de la communication.
Des armes nucléaires installées au BélarusMais d’après l’OTAN, la Russie travaille effectivement sur de nouveaux types de missile, en particulier des missiles hypersoniques, c’est-à-dire des missiles qui volent à une vitesse extrêmement élevée, à une faible altitude et qui en plus peuvent manœuvrer en vol, ce qui les rend très difficiles à tracer pour l’adversaire. Alors ces missiles sont aujourd’hui en phase de test, mais ce qui est sûr, c’est que la Russie possède déjà des armes extrêmement puissantes, beaucoup plus puissantes que celles qui avaient frappé Hiroshima et Nagasaki. Et certaines de ces armes sont en position de frapper l’Europe.
On sait qu’il y a déjà des missiles à capacité nucléaire dans l’enclave de Kaliningrad, ce petit territoire russe coincé entre la Pologne et la Lituanie. Mais bientôt, c’est toute la frontière est de la Pologne et donc de l'Union européenne qui pourrait être menacée, puisque des missiles pourraient faire leur apparition en Biélorussie. On l’a appris dimanche. La Biélorussie va modifier sa Constitution, elle ne sera plus un "Etat neutre”, elle pourra accueillir légalement des armes nucléaires.
C’est un tournant, c’est la fin d’un engagement qui avait été pris à la chute de l’URSS. Or, on sait que la Biélorussie est totalement alignée sur la Russie, actuellement, c’est elle qui permet à l’armée russe d’attaquer l’Ukraine par la Nord et elle pourrait donc aussi lui permettre d’installer des missiles nucléaires. C’est une hypothèse, mais la menace est prise très au sérieux. Emmanuel Macron a lui-même appelé le président biélorusse samedi pour dénoncer la “gravité de cette décision”.
Une vraie menace de guerre nucléaire?Tout le monde essaye d’analyser depuis dimanche les propos de Vladimir Poutine. Ce qui est sûr, c’est que quand il dit qu’il “met en alerte” la force de dissuasion nucléaire, ça ne veut pas dire que l’on passe d’un coup d’une menace lointaine à une menace immédiate. La menace est de toute façon immédiate, on sait que la plupart des armes nucléaires russes sont prêtes à être utilisées, à tout moment, en quelques minutes, comme celle de l’OTAN, d’ailleurs.
Alors pourquoi parler d’une mise en alerte? Beaucoup d’experts estiment que c’est de la communication, de la part de Vladimir Poutine, la surenchère la plus forte possible pour obliger l’Ukraine à abdiquer, pour obliger les Occidentaux à reculer. Mais ce qui est sûr, c’est que c’est un changement de doctrine pour la Russie. On est passé de la dissuasion nucléaire à la menace nucléaire. C’est historique. Et ça rend le sort de cette guerre encore plus incertain.
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