Echange tendu sur Europe 1 : Sandrine Rousseau fière de «bousculer l’ordre»
La plus polémique… et désormais la plus visible. Parmi les concurrents de la primaire des Verts, Sandrine Rousseau est sans aucun doute la candidate qui suscite le plus d’attaques, en réaction à ses propos chocs. Et donc celle dont on entend le plus parler. La preuve encore ce mercredi matin, alors qu’elle était l’invitée de Sonia Mabrouk sur Europe 1. Une interview parfois lunaire, qui s’est conclue par une remarque cinglante de l’éditorialiste droitière. «Comme vous êtes la grande liberté des opprimés, merci de l’avoir dit ce matin sur Europe 1», a-t-elle ironisé. L’ancienne numéro 2 d’Europe Ecologie-les Verts (EE-LV) venait d’afficher son soutien aux nombreux journalistes ayant quitté la station depuis le rapprochement forcé de la chaîne avec Vincent Bolloré et CNews.
«Cela dit quelque chose de l’ordre que je bouscule par ma candidature», a déclaré Rousseau à Libération après son passage à la radio. Sonia Mabrouk a orienté la confrontation sur la «radicalité» et les «thèses racialistes» de la candidate, comme elle l’annonçait ce mercredi matin sur son compte Twitter. De quoi faire passer celle que le Figaro présente dorénavant comme «la candidate “woke” abonnée aux polémiques» pour un ovni de la scène politique. «Aujourd’hui, je suis la cible de toute l’extrême droite et de la droite, assure Rousseau. Et précisément tant mieux. […] Cela veut dire que j’incarne un renouveau social et sociétal, c’est ce qui les rend fébrile.» Un positionnement politique et des «valeurs» que la candidate entend défendre jusqu’au bout.
RDV 8h13 sur @Europe1 pour l’interview. Mon invitée est abonnée aux polémiques et vives controverses. @sandrousseau la candidate à la primaire écologiste détone par sa radicalité et ses thèses racialistes. Jusqu’où? Entretien vérité tout à l’heure..#Europe1
— Mabrouk Sonia (@SoMabrouk) September 1, 2021
Après un vif échange sur le voile, les femmes afghanes et la traite négrière, Sonia Mabrouk l’a interrogée sur «l’homme blanc» qui serait «le seul oppresseur». Rire agacé de Rousseau. «Ce sont les raccourcis que je subis depuis le début de ma campagne», a rétorqué l’enseignante-chercheuse en économie à l’université de Lille. Et la journaliste de s’exclamer : «Ah, c’est la victimisation qui revient au galop !» Un terme repris sur les réseaux sociaux, où la passe d’armes a mis le feu à Twitter ce mercredi. Dès samedi, Rousseau avait prévenu dans l’Express: «Tous les raids, tous les cyberharcèlements ne me feront pas taire.»
«Il faut que ça se chicore un peu»La candidate dérange. A droite, comme parfois dans son propre camp. La controverse a commencé à l’université d’été de Poitiers, du 19 au 21 août. La candidate avait alors soutenu au Figaro avoir été bousculée par l’un de ses rivaux à la primaire des Verts, le maire de Grenoble, Eric Piolle, avant de revenir sur ses propos auprès de Libération. Le secrétaire national d’EE-LV, Julien Bayou, est allé jusqu’à «mener une enquête» pour conclure «à l’innocence d’Eric Piolle», explique-t-il dans une lettre au conseil fédéral.
Cet incident a eu l’effet d’un coup de tonnerre dans les journées d’été bien calmes des Verts. «C’est trop tranquille. Je pense qu’il faut que ça se chicore un peu», avait lâché l’ex-patron du parti David Cormand avant le début de la rencontre, par crainte qu’on ne parle pas assez du rendez-vous estival des écolos, déjà affaiblis dans les sondages. L’eurodéputé a été servi. Cet incident a donné le coup d’envoi d’une série de déclarations fracassantes. Le 24 août sur BFM TV, Rousseau affirme, au sujet de l’accueil des réfugiés afghans, que «le fait d’avoir des personnes dangereuses, qui sont terroristes […] en France, permet de les surveiller», avant de reconnaître une «phrase maladroite» le lendemain sur France Inter. Le même jour dans Charlie Hebdo, la candidate assure qu’elle «préfère des femmes qui jettent des sorts plutôt que des hommes qui construisent des EPR [des réacteurs nucléaires, ndlr]».
«Porter une incarnation»De quoi éclipser Piolle, présent à ses côtés à l’université d’été. Très proche sur le plan des idées, son rival – qui se définit comme «radical et pragmatique» – a longtemps été considéré comme favori. Mais l’omniprésence médiatique de Rousseau pourrait rebattre les cartes. L’intéressée dément : «Je ne fais pas de stratégie politique là-dessus. Je porte une incarnation et j’entends la mener jusqu’au second tour de l’élection présidentielle.»
A l’autre bout de la palette verte, Yannick Jadot. Plus centriste sur les questions sécuritaires et identitaires, il apparaît comme l’opposé de la candidate radicale et est souvent jugé plus à même de rassembler un public plus large en vue de la présidentielle. Mais le pari de Rousseau pourrait s’avérer gagnant dans une primaire resserrée où les militants les plus engagés votent. Environ 30 000 personnes pourraient participer au scrutin selon les estimations. Du côté de Jadot, on espère «entre 70 000 et 100 000 votants».