Roland Castro, architecte et figure de Mai 68, est mort
Roland Castro, architecte et ancien militant politique, est mort, jeudi 9 mars à Paris. Il était âgé de 82 ans. Son itinéraire a épousé les tourments de la fin du XXe siècle. Figure de Mai 68 et du maoïsme français, il se recentrera peu à peu, gardant toujours le cœur à gauche, même dans son soutien à Emmanuel Macron.
Son travail d’architecte urbaniste est connu pour des réalisations comme la Bourse du travail à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) en 1983, l’université de technologie de Belfort-Montbelliard, la Cité internationale de la bande dessinée à Angoulême (1990), le complexe de la rue de Bagnolet (2009) ou la restructuration du quai de Rohan à Lorient (1996).
Les parents de Roland Castro – un juif de Thessalonique et une juive espagnole – fuient Paris pendant l’exode. Castro père se fait embaucher dans une entreprise de porcelaine à côté de Limoges, en tant qu’ouvrier. Roland Castro naît là-bas, peu de temps après, en octobre 1940. « Les juifs espagnols n’étaient pas déportés jusqu’en 1943 en raison d’un accord entre Franco et Hitler. Mais, en 1943, cela change. Les rafles concernent tout le monde. Et tout le village où on était, Saint-Léonard-de-Noblat [Haute-Vienne], nous protège, racontait Roland Castro en 2020. J’ai une dette envers mon pays, une dette envers le maquis communiste du Limousin. Ils ont été magnifiques avec ma famille, avec ma sœur et avec moi. »
Après la guerre, les Castro retournent à Paris. A l’adolescence, le jeune Roland affine sa conscience politique. « En 1954, c’est le début des manifestations contre la guerre d’Algérie. J’y participe tout de suite. Mais je me fais arrêter. » Problème : cela tombe en plein dans la période probatoire de la demande de naturalisation de ses parents… Malgré leurs craintes, ils deviendront finalement français. Une histoire classique d’immigrés et de preuves d’amour. « Je suis très influencé par le roman national, même si mes ancêtres ne sont pas du tout gaulois. L’esprit gaulois, tout le monde l’a quand il entre en France : on devient râleur et chiant ! »
Cet « esprit gaulois », donc, Roland Castro l’a mis en avant un peu plus tard, alors qu’il était étudiant. Après un rapide passage au Parti socialiste unifié, il adhère, en 1962, à l’Union des étudiants communistes (UEC) alors qu’il est aux Beaux-Arts.
Activiste et agitateurA l’époque, l’UEC est un creuset qui rassemble toute la gauche révolutionnaire. Le jeune Castro est dans la tendance « italienne » qui se réclame du parti frère transalpin, plus ouvert (notamment sur la culture) et moins dogmatique que le PCF. Là se nouent des amitiés solides, par exemple avec Jean-Pierre Le Dantec, architecte également, ou l’ancien ministre Bernard Kouchner. Roland Castro fréquente alors Alain Krivine, Henri Weber, Pierre Goldman, Robert Linhart ou Tiennot Grumbach et s’oppose à la reprise en main de l’UEC par le PCF.
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