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Retraite à 65 ans : les deux écueils de la réforme proposée par Macron

Retraite à 65 ans  les deux écueils de la réforme proposée par Macron
Repousser l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 65 ans est une mesure pertinente et nécessaire pour les finances de l'Etat français, en particulier après la crise du Covid. Mais elle doit être appliquée avec finesse, juge notre chroniqueur

Faire passer l'âge légal de départ en retraite à taux plein à 65 ans d'ici dix ans est une mesure pertinente, pour ne pas dire indispensable. Et les Français y sont prêts à condition d'assurer une forme d'équité. Surtout, il faut renforcer l'intégration économique des plus de 50 ans. Sinon, une réforme intelligente et courageuse prendra la forme d'une mesure anxiogène, au risque d'enrayer ce nécessaire dépoussiérage du système des retraites. 

La réforme que propose le candidat Emmanuel Macron présente trois avantages. Premièrement, elle est intéressante financièrement. Elle devrait rapporter environ 10 milliards d'euros par an dans les caisses de l'Etat, ce qui correspond peu ou prou au déficit annuel projeté par le conseil d'orientation des retraites. Nos finances sociales sortent de la crise du Covid fortement déficitaires et il n'est pas souhaitable d'augmenter les cotisations salariées ni patronales pour combler ce trou abyssal. Diminuer le salaire net (c'est-à-dire le pouvoir d'achat immédiat) ou augmenter le coût du travail (c'est-à-dire dégrader la compétitivité des entreprises) sont de mauvaises idées.  

Ajoutons qu'en plus des retraites, les besoins de financement de la branche dépendance vont s'accroître significativement. On parle d'un montant de 5 à 10 milliards d'euros par an. Plutôt que de laisser cette nouvelle branche désargentée ou plutôt que de radiner sur la santé, il est donc bien plus pertinent de faire porter l'effort sur la branche retraites. 

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Une "super-croissance" pour faire face à une ère de "super-dépenses"

Deuxièmement, le président-candidat a raison de mettre l'accent sur le travail. Il est nécessaire de rappeler que notre modèle social, très développé, n'est pas finançable sans une croissance soutenue. Plus encore : nous entrons dans une ère de "super-dépenses publiques" (police, justice, armée, éducation, santé, autonomie, décarbonation...) qui, si l'on veut éviter des "super-déficits", exige une "super-croissance".  

Hors Covid, notre croissance potentielle était de l'ordre de 1,5% par an. Il faudrait idéalement le double. Ce qui n'est possible que de deux façons : soit les entreprises et la sphère publique investissent plus pour générer des gains de productivité, soit les Français travaillent davantage collectivement. Retarder l'âge de départ en retraite participe de cette seconde proposition. Ceux qui, à l'inverse, proposent d'avancer l'âge moyen de départ en retraite sont des irresponsables. D'autant plus que ce sont les mêmes personnes qui promettent le plus de nouvelles dépenses publiques ! 

Troisièmement, c'est une réforme de simplification. L'âge moyen de départ en retraite à taux plein est déjà proche de 64 ans, et la durée de cotisation s'allonge "automatiquement" sous l'effet de la loi Touraine. Une loi courageuse mais complexe. Un âge de départ à 65 ans, une retraite minimale de 1 100 euros pour les carrières complètes : voilà qui est simple et efficace. 

Simple sur le papier, mais complexe à mettre en oeuvre

Simple et efficace sur le papier en tout cas. Car il y a dans la réalité deux écueils. Le premier concerne l'équité. L'espérance de vie est inversement proportionnelle au niveau de vie. François Hollande, quand il était président, avait voulu introduire la notion de pénibilité pour rétablir une forme de justice sociale en faisant partir plus tôt à la retraite ceux dont le travail était le plus dur. L'idée était la bonne mais sa mise en oeuvre, à la française, était un festival de complexités bureaucratiques. Ayons les idées claires pour mettre en oeuvre des mesures simples : pour les professions dont l'espérance de vie à 65 ans tend vers 0, la règle générale doit être assouplie. 

Le deuxième écueil est celui de l'intégration des plus de 60 ans sur le marché du travail. Certes, le taux d'emploi chez les 60-64 ans est passé de 13% à 33% en vingt ans. Mais cette amélioration est insuffisante pour que la réforme ne paraisse anxiogène pour cette tranche d'âge. Il ne faut pas le cacher : c'est un immense problème. J'ai encore rencontré une entreprise la semaine dernière qui qualifiait de seniors ses collaborateurs âgés de plus de 35 ans !  

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Nicolas Bouzou
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