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Prix Nobel de littérature 2022 : quelle surprise dans le chapeau de l'imprévisible Académie suédoise ?

Prix Nobel de littérature 2022  quelle surprise dans le chapeau de limprévisible Académie suédoise
Auteur de renommée ou écrivain confidentiel ?  L'Académie suédoise, adepte du secret et coutumière des surprises, annonce ce jeudi à 13H00 son Prix Nobel de littérature.

Un grand nom délaissé jusqu'ici, ou une nouvelle découverte après deux auteurs sortis de l'ombre par la magie du plus célèbre des prix? Le Nobel de littérature est décerné jeudi par une Académie suédoise plus imprévisible que jamais. Réponse vers 13H00 (11H00 GMT) à Stockholm, pour la succession du romancier britannique d'origine tanzanienne Abdulrazak Gurnah (2021) et de la poétesse américaine Louise Glück (2020).

Médaille du Nobel de littérature dans les mains du lauréat 2021, le romancier britannique Abdulrazak Gurnah, lors d'une cérémonie à la résidence de l'ambassadeur de Suède à Londres le 6 décembre 2021 (ADRIAN DENNIS / AFP)Médaille du Nobel de littérature dans les mains du lauréat 2021, le romancier britannique Abdulrazak Gurnah, lors d'une cérémonie à la résidence de l'ambassadeur de Suède à Londres le 6 décembre 2021 (ADRIAN DENNIS / AFP)
Médaille du Nobel de littérature dans les mains du lauréat 2021, le romancier britannique Abdulrazak Gurnah, lors d'une cérémonie à la résidence de l'ambassadeur de Suède à Londres le 6 décembre 2021 (ADRIAN DENNIS / AFP)

Critiques et pronostiqueurs sont partagés entre deux écoles cette année : ceux qui voient dans les derniers prix la confirmation que l'Académie n'aime pas les écrivains déjà reconnus, a fortiori quand ils écoulent déjà beaucoup de livres, ou ceux qui pensent qu'elle pourrait varier en sacrant un auteur de renommée mondiale, ou du moins dans la liste des suspects habituels.

L'Académie suédoise se remet d'une longue crise, après un scandale #Metoo en 2018 et l'attribution l'année suivante d'un Nobel controversé à l'écrivain autrichien Peter Handke aux sulfureuses positions pro-Milosevic. Réputée - et critiquée - pour ses choix masculins et eurocentrés, elle a depuis successivement sacré une Américaine et un auteur né à Zanzibar dont l'oeuvre est centrée sur les tourments de l'exil et des réfugiés, l'anticolonialisme et l'antiracialisme.

Le jury Nobel insiste régulièrement sur le fait que son prix n'est ni politique ni soumis aux règles de parité ou de diversité ethnique, et que le seul gage est la qualité des lettres et de l'oeuvre.

Mais "l'Académie est maintenant évidemment soucieuse de son image en ce qui concerne la diversité et la représentation des genres d'une toute autre façon qu'avant le scandale de 2017-2018", explique à l'AFP Björn Wiman, chef du service culturel du quotidien suédois Dagens Nyheter. "Je pense que l'on veut un nom plus connu cette année du fait de la surprise de l'année dernière", pronostique-t-il.

De bon augure pour le Japonais Haruki Murakami, l'Américaine Joyce Carol Oates ou son compatriote Cormac McCarthy, ou encore la Canadienne Margaret Atwood, snobbés jusqu'ici ? 

Après deux prix consensuels, le Nobel pourrait aussi s'offrir un peu de soufre avec le Français Michel Houellebecq, favori des parieurs cette année et habitué des déclarations controversées sur l'islam et autres. A moins que l'Académie ne récompense l'auteur britannique des Versets sataniques Salman Rushdie, victime d'une tentative de meurtre en août.

Un autre choix très politique dans le contexte de la guerre en Ukraine serait de sacrer la Russe Ludmila Oulitskaïa, exilée à Berlin et adversaire déclarée de Vladimir Poutine. Son nom a été régulièrement cité ces dernières années, tout comme les Hongrois Peter Navas et Laszlo Krasznahorkai, les Françaises Annie Ernaux et Maryse Condé, les Norvégiens Jon Fosse et Karl Ove Knausgaard, le Kenyan Ngugi wa Thiong'o, la Croate Dubravka Ugresic, la Canadienne Anne Carson, les Américains Thomas Pynchon et Don DeLillo ou l'Israélien David Grossman.

A moins que l'Asie, sans prix depuis le Chinois Mo Yan il y a dix ans, ne soit la terre d'élection du millésime 2022. Observateur acerbe de la société chinoise ayant eu des démêlés avec la censure, le choix de Yan Lianke pourrait agacer le régime de Pékin, tout comme celui de Lao Yiwu (nom de plume Lao Wei), surnommé le "Soljenitsyne chinois". Leur compatriote Can Xue est également jugée digne d'un Nobel.

Alors que les principaux pays occidentaux ont tous plusieurs prix - France en tête (15) - des géants comme la Chine (hors Gao Xingjian, naturalisé français) et l'Inde (Rabindranath Tagore en 1913) n'ont qu'un seul prix. Poète et écrivain voyageur, l'Indien Vikram Seth est cité comme à même de réduire cet écart.

Un temps minée par des suspicions de fuites, l'institution suédoise veille à garder le secret jusqu'au bout, utilisant toutes sortes de stratagèmes pour ne pas se faire démasquer et allant jusqu'à garder confidentielles ses délibérations pendant 50 ans.  

Seule certitude, elle tient des listes, raccourcies au fur et à mesure que la date fatidique de la remise du plus célèbre des prix littéraires approche. L'ultime "liste courte" comporte les cinq derniers noms encore en lice.

Voici la liste des dix derniers lauréats du Prix Nobel de littérature avant l'annonce du prix 2022 jeudi à Stockholm.

- Abdulrazak Gurnah (Royaume-Uni) en 2021, pour "son récit empathique et sans compromis des effets du colonialisme et le destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents".

- Louise Glück (Etats-Unis) en 2020, "pour sa voix poétique caractéristique, qui avec sa beauté austère rend l'existence individuelle universelle".

- Peter Handke (Autriche) en 2019, pour son oeuvre influente qui, forte d'ingénuité linguistique, a exploré la périphérie et la singularité de l'expérience humaine".

- Olga Tokarczuk (Pologne) en 2018,"pour une imagination narrative qui, avec une passion encyclopédique, symbolise le dépassement des frontières comme forme de vie".

- Kazuo Ishiguro (Royaume-Uni) en 2017, "qui a révélé, dans des romans d'une puissante force émotionnelle, l'abîme sous notre illusoire sentiment de confort dans le monde".

- Bob Dylan (Etats-Unis) en 2016, "pour avoir créé dans le cadre de la grande tradition de la musique américaine de nouveaux modes d'expression poétique".

- Svetlana Alexievitch (Bélarus) en 2015,  "pour son oeuvre polyphonique, mémorial de la souffrance et du courage à notre époque".

- Patrick Modiano (France) en 2014, "pour l'art de la mémoire avec lequel il a évoqué les destinées humaines les plus insaisissables et dévoilé le monde de l'Occupation".

- Alice Munro (Canada) en 2013,"souveraine de l'art de la nouvelle contemporaine".

- Mo Yan (Chine) en 2012, "qui avec un réalisme hallucinatoire, unit conte, histoire et le contemporain".

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