Genesis, la der des der: on a vu le concert d’adieu du groupe de Phil Collins à Paris
Phil Collins, Mike Rutherford et Tony Banks ont 72 ans chacun. Presque des minots au regard des Rolling Stones. A ceci près que Phil Collins est souffrant et c’est à l’aide d’une canne qu’il hisse sur la scène de l’Arena de Paris-Nanterre.
Batteur et percussionniste longtemps loué pour sa créativité, Collins s’assoit, prostré à l’avant-scène sur une chaise aux hauts accoudoirs. Ses baguettes et ses fûts, il les a transmis à son jeune fils Nicholas, 21 ans, qui reproduit à la lettre et avec beaucoup d’énergie la frappe lourde et si reconnaissable de son père.
Port de tête altier de lord millionnaire, Michael Rutherford est à la guitare. Lui et Tony Banks (claviers), aussi avenant qu’un conseiller bancaire en fin de carrière, assurent les fondations du concert, soutenus par le fidèle second couteau Daryl Stuermer à la guitare et à la basse, et deux choristes venus renforcer les parties vocales.
Dans la salle, quelque 24 000 personnes sont venues rendre un dernier hommage, et partager un ultime moment de musique live avec un groupe qui a marqué son adolescence. Le public a l’âge de ses artères : plutôt entre 50 et 60 ans, parfois attaché au Genesis épique et aventurier des années 70, plus souvent familier de celui des années 80 qui squattait la bande FM. Au stands de merchandising et de colifichets, chacun fait sagement la queue pour faire emplette de T-Shirts colorés, de programmes souvenir et de lithographies collector.
« Poutine, ce putain d’idiot »C’est avec deux morceaux de « Duke », l’album de 1980, que le show démarre. C’est ainsi depuis des lustres : une longue séquence quasi-instrumentale, aux brisures de rythmes et aux envolées grandiloquentes qui font la signature du groupe de rock progressif. Mais sitôt après, les premiers tubes déboulent : « Turn It On Again », comme une incantation, un appel à rallumer la chaudière. Et ça marche : malgré un grain qui chevrote un peu et un timbre devenu nasal, Phil Collins chante bien et haut. Blotti dans un survêtement noir, il semble lutter contre le handicap de son corps amaigri et usé par les excès. Mais de ses faiblesses, il fait une force : il s’appuie sur sa technique vocale pour en faire une patine, un supplément d’âme pour sa voix.
Sur « Mama », il joue de son faciès décharné, affiché en image géante sur les écrans vidéo, pour rendre la chanson, inspirée par le « Psychose » d’Alfred Hitchcock, plus étrange et effrayante encore.
Seul à prendre à la parole, Phil Collins s’essaye à quelques mots de français. Et explique avoir écrit jadis la chanson « Land of Confusion » en pensant à Ronald Reagan et Margaret Thatcher. « On l’a ressortie parce qu’elle nous semblait faire écho avec avec le Covid. Mais maintenant, elle résonne avec Monsieur Poutine » explique-t-il, déclenchant des huées du public. « Ouais, putain d’idiot ! » renchérit-il alors.
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Mais c’est sur sa seconde moitié que le concert s’avère artistiquement le plus convainquant : lorsque, sous la débauche de lumières sophistiquées, Genesis replonge dans ses meilleures archives. Qu’il s’agisse des grosses machines FM des années 80 comme « Invisible Touch » ou « I Can’t Dance », ou des pépites de sa première incarnation. Les chansons de la période initiale du répertoire (avec Peter Gabriel et Steve Hackett) étincellent dans un répertoire par ailleurs méchamment daté : l’instrumental « Firth of Fifth » et son déchirant solo de guitare électrique (remarquablement exécuté par Stuermer), l’hymne pop-folk « I Know What I Like », l’intro de « Selling England By The Pound » ou la chanson « The Lamb Lies Down on Broadway »…
En final, la ballade « The Carpet Crawlers » a même réussi à faire sentir un peu d’intimité dans la démesure de ce show intitulé « The Last Domino ». Puis les musiciens se sont éclipsés, d’un pas lent et sans élan démonstratif, après 2h30 de concert. Presque un requiem pour une époque révolue.
Genesis remontera sur scène ce soir à l’Arena de Paris-La Défense à 20 h. Une petite poignée de places restent en vente.