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Pourquoi le documentaire "Petite fille" sur une enfant transgenre recouvre un projet politique

Pourquoi le documentaire Petite fille sur une enfant transgenre recouvre un projet politique
« Petite fille », le documentaire de Sébastien Lifshitz, raconte l’histoire de Sasha, une enfant transgenre de huit ans. Pour l’artiste et sa productrice, Muriel Meynard, cette œuvre artistique est un « combat politique et sociétal ».

« Petite fille », en prime-time sur Arte, c’est un évènement exceptionnel. En temps normal, jamais un long-métrage de ce format n’est diffusé sur ce créneau. « Notre objectif et celui de d’Arte, est de toucher le plus de personnes possible afin de faire évoluer les consciences », déclare à Marianne Muriel Meynard, la productrice. Diffusé ce mercredi 2 décembre, « Petite fille » raconte l’histoire de Sasha, un petit garçon qui voudrait être une fille. Karine, sa mère, fait des démarches auprès des institutions pour faire accepter le changement de genre de l’enfant de huit ans. Au médecin généraliste, cette dernière raconte qu’elle désirait à tout prix avoir une fille durant sa grossesse et qu’à sa naissance, elle était «  très déçue d’apprendre que Sasha, c’était un garçon ». A l’hôpital Robert Debré, la pédopsychiatre Anne Bargiacchi balaie ses doutes en lui affirmant que son enfant est atteint d’une dysphorie de genre.  Et que, « c’est comme ça » - l’hôpital a créé en 2013 une unité dédiée aux enfants et travaille quotidiennement avec les associations militantes pro-transgenres.

Une situation complexe

A l’école de Sasha, l’équipe pédagogique et les autres parents d'élèves s’inquiètent. L'école refuse d’accepter le changement de genre sans avoir des papiers officiels et s’interroge sur un potentiel conflit de loyauté de l’enfant vis-à-vis de sa mère. A aucun moment, le réalisateur ne donne la parole à l’enseignante et à la directrice. Ces objections ne sont présentées qu’à travers le prisme des parents, persuadés d’être victimes d’une maltraitance institutionnelle : « Parce que sur un papier, il y a écrit 'sexe masculin', l’école prive Sasha de son enfance. Je trouve cela dégueulasse », s’émeut la mère. « Il ne faut pas leur en vouloir. Ils ont un esprit fermé et étriqué », assène le père.

Avant le début du tournage, l’école avait demandé une expertise psychologique indépendante de Sasha et s’était interrogée sur un éventuel signalement pour maltraitance. La situation a l’air complexe, mais impossible pour le téléspectateur de prendre du recul. La caméra est rivée sur Sasha et sa mère. Seul le ressenti de cette dernière est pris en compte – ainsi que celui du père, qui apparaît par intermittences : « C’est un choix éditorial. Nous avons choisi de centrer la caméra sur la bulle constituée par Sasha et sa mère car ces derniers sont en lutte contre le reste du monde. Cette femme est une tigresse avec son enfant », commente Muriel Meynard.

Une revendication politique, dont l'enfant est le porte-parole

En réalité, ce long-métrage est une revendication politique, dont l’enfant de huit ans est le porte-parole. « Sasha est là pour aider à faire changer les mentalités et moi, je suis là pour l’aider, elle », déclare Karine, face caméra, à la dernière minute du documentaire. « Il y a une visée éducative. La nouvelle génération a un désir de sortir des schémas établis et du formatage très puissant de nos sociétés où l’on doit se conformer à des modèles », déclarait Sébastien Lifshitz le 28 novembre dernier dans les colonnes de l’Humanité. Artiste de talent, l’homme se fait le porte-voix politique des transidentités. En 2013, il tournait « Bambi », un documentaire sur une vedette transsexuelle de music-hall. Avec « Petite fille », il présente un réquisitoire contre la seule binarité biologique garçon-fille. Sa productrice assume : « Les enfants transgenres, c’est un combat politique et sociétal. Il faut faire accepter le droit de choisir comment on a envie d’être ». Amorcer un débat démocratique sur ce sujet ? « Je ne vois pas comment il pourrait y en avoir un ».

De fait, dans « Petite fille », tout avis divergent est présenté comme une position transphobe. Or, parmi les réactions de l’entourage de la famille, il faut faire le tri. Il y a d’un côté les réactions maltraitantes à la différence de l’enfant – la professeure de danse, par exemple, pousse Sasha en dehors de la pièce car elle refuse d’avoir dans son cours une petite fille transgenre. De l’autre, il peut y avoir des interrogations légitimes – l’équipe pédagogique et les autres parents d’élèves avancent des arguments qu’il serait pertinent d’écouter. N’y-a-t-il pas d’autres ressorts que la victimisation des enfants et de leurs parents pour aborder ce sujet si sensible ? Le prisme émotionnel bloque et stigmatise tout traitement rationnel de ce qui est, aujourd’hui, un enjeu sociétal majeur.

A LIRE AUSSI >>Ces enfants qui changent de sexe en un temps record dès l'âge de trois ans

Par Violaine Des Courières

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