Peter Doherty, falaise vagale
Le portrait
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La vie d’un grand brûlé est faite de banalités heureuses, comme si l’on ne comptait plus le temps qui passe mais le temps qui reste : nager dans une eau si froide qu’elle mord la peau, guetter la surface indolente de la Manche pour apercevoir des phoques, lire, composer. Etretat est un écrin exquis pour cela, un territoire fait de poésie, de falaises, de tunnels de guerre du Commonwealth, le seul lieu, peut-être, où Peter Doherty pouvait renaître. La première fois, il y est arrivé en camping-car avec Katia de Vidas, devenue son épouse en 2021. Les grands-parents de cette dernière, claviériste du groupe The Puta Madres, possèdent une belle maison sur les hauteurs de la ville. Le soleil y sature les baies vitrées, les guitares colonisent les canapés, et l’envie de sédentarité est née du premier confinement. Pourquoi, alors, se laisser mourir d’une addiction ?
Il y a près de dix ans, le chanteur, avec l’aide fervente de son clan, a décidé de se sauver. Le mot peut paraître grandiloquent, mais il n’est rien lorsque se referme Stranger in My Own Skin, un documentaire terriblement brut sur la toxicomanie de Doherty, réalisé par Katia de Vidas. Bâti à partir de rushs intimes exceptionnels, il ausculte sans indulgence l’existence défoncée de la star anglaise, entre piquouses et vénusté mélodique. Le majestueux y côtoie l’infiniment glauque, sans céder au poncif marketing massue du rock’n’roll, voulant que la came abreuve le mythe. Ici, il est surtout question d’une maladie chr