Patrick Hetzel à l'Enseignement supérieur, un conservateur chantre ...

Figure discrète de LR, il s’est attiré, le long de son parcours, les foudres du monde universitaire. Patrick Hetzel, 60 ans, député de la 7e circonscription du Bas-Rhin, a été nommé samedi 21 septembre ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. L’ancien conseiller de François Fillon au ministère de l’Education est l’un des artisans de la très controversée loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) sur l’autonomie des universités.

Père de deux enfants, agrégé de gestion, Patrick Hetzel siège dans l’opposition depuis son arrivée à l’Assemblée nationale en 2012, où il a notamment défendu des positions conservatrices sur les sujets de bioéthique. Idem sur toutes les questions relatives à la famille, dont il promeut une vision traditionaliste : il a voté contre le mariage pour tous, contre la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules, ou encore contre la constitutionnalisation de l’IVG. Pourfendeur du projet de loi sur la fin de vie présenté en avril, il s’apprêtait à batailler contre le texte, contribuant au dépôt de 549 amendements, avant que l’examen ne soit clôturé précocement par la dissolution.

Proche de François Fillon

En mai, Patrick Hetzel avait publié, avec la députée LR Michèle Tabarot, une proposition de résolution pour la création d’une commission d’enquête sur «l’entrisme idéologique et les dérives islamogauchistes dans l’enseignement supérieur». En 2023, après une série de mobilisations dans les facs, il avait porté une proposition de loi avec d’autres députés LR visant à faire du blocage d’une université une infraction pénale.

Dans un autre registre, Patrick Hetzel a également proposé – sans succès – au Palais-Bourbon que les lycéens ou collégiens qui passent une année scolaire à l’étranger voient leur année comprise dans leur cursus, a longtemps ferraillé contre les coupes dans le budget de la recherche, s’est opposé à l’instruction obligatoire à 3 ans, y voyant une atteinte à la «liberté de choix des familles».

A la faveur de sa nomination un tweet publié lors de la première vague de Covid a également refait surface : en avril 2020, Patrick Hetzel avait écrit au président de la République pour réclamer l’utilisation temporaire de l’hydroxychloroquine, avant même que ne soient connus les résultats des essais cliniques, allant à l’encontre des protocoles prévus en matière de recherche.

Partisan d’une ligne droitière au sein des Républicains, il avait soutenu Michel Barnier et François Fillon lors des primaires en vue des élections présidentielles de 2017 et 2022. C’est d’ailleurs avec ce dernier que la carrière de François Hetzel a pris un tournant politique : en 2005, François Fillon, ministre de l’Education nationale, le nomme recteur d’académie à Limoges. A cette fonction, le Premier ministre, Dominique de Villepin, le charge de la rédaction d’un rapport visant à rapprocher l’université du monde du travail.

Face aux «contraintes dans lesquelles sont enserrées les universités françaises», Patrick Hetzel préconise de renforcer leur autonomie. L’idée se concrétise après l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Il intègre le cabinet de François Fillon à Matignon entre 2007 et 2008 comme conseiller pour l’Education nationale, l’enseignement supérieur et la recherche. En 2008, il devient directeur général pour l’enseignement supérieur, soit numéro 2 du ministère alors conduit par Valérie Pécresse.

«Un opposant au mariage pour tous et un anti-féministe notoire»

C’est à cette époque qu’est négociée et votée la loi LRU, dite «loi Pécresse», transformant la gouvernance des universités en leur conférant plus d’autonomie, qui provoque un tollé. En décembre 2023, Emmanuel Macron a annoncé vouloir amorcer un «acte II de l’autonomie» des universités françaises – une formule empruntée à Valérie Pécresse, pour notamment simplifier les lourdeurs administratives de la recherche française.

Le projet d’Hetzel, «c’est de parachever l’autonomie», a réagi auprès de l’AFP Anne Roger, secrétaire générale du Snesup-FSU, premier syndicat de l’Enseignement supérieur, ne voyant pas dans cette nomination «une bonne nouvelle». «Le fait qu’il soit nommé ministre de l’Enseignement supérieur, pour nous, c’est vraiment le signal qu’il y a une barre à droite toute […]. C’est une conception très libérale de l’enseignement supérieur.»

Une nomination aussi qualifiée de «très inquiétante», par le syndicat étudiant L’Union étudiante. Patrick Hetzel est «l’un des architectes de la loi LRU, responsable du sous-financement chronique des universités», a-t-il dénoncé dans un communiqué. «C’est également un défenseur de la sélection, un opposant au mariage pour tous et un anti-féministe notoire. Il est le représentant de la droite la plus réactionnaire», a ajouté le syndicat, estimant que «nous devons nous préparer à de graves remises en question des libertés académiques». Pour l’Unef, cette nomination est un «coup de grâce» qui «annonce l’accélération de la privatisation de l’enseignement supérieur». Et d’anticiper : «Notre enseignement supérieur public, qui a besoin d’une politique de rupture, va être la cible de nombreuses attaques libérales.»