L'histoire vraie de Niki de Saint Phalle, ou la destruction de la ...

Les premières années de Niki de Saint Phalle sont très peu connues du grand public, de sa carrière de mannequin qui l’amènera à faire la couverture de « Vogue » ou « Life Magazine », à ses noces à tout juste 18 ans avec le poète américain Harry Mathews. Mais le drame, qui compose son existence survient dans sa prime jeunesse dans l’aristocratie où partagée entre la France et les États-Unis, elle n’est encore que Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle. C’est à cette période qu’elle subit l’un des plus grands traumatismes de sa vie avec le viol commis par son père, l’année de ses 11 ans. Un inceste qu’elle qualifiera de « l’été des serpents » et qui la poursuivra le restant de sa vie.  

À 22 ans, une violente dépression nerveuse l’amènera à séjourner dans une clinique psychiatrique à Nice. Elle y subit des traitements par électrochocs, une thérapie à cette époque très commune pour contrer la neurasthénie. Niki de Saint Phalle en verra sa mémoire profondément dégradée. Elle confiera que pendant cette période de convalescence, ce qui l’a vraiment aidée, c’est de peindre ses démons pour canaliser toute cette violence enfouie en elle.  

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Se reconstruire par l’art  

Une violence qui se voudra omniprésente dans son œuvre avec la série des « Tirs ». Au début des années 60, Niki de Saint Phalle invitait à tirer munie d’une carabine ou de fléchettes sur des assemblages d’objets et matériaux divers pris dans du plâtre et dissimulant les sachets remplis de peinture qui, en éclatant sous l’impact, projetaient des couleurs sur tout le relief. En tirant sur la peinture, elle dénonce « Papa, tous les hommes, les petits, les grands, mon frère, la société, l’église, le couvent, l’école, ma famille, ma mère, moi-même ». Elle se réapproprie la violence par l’art comme elle l’explique au journaliste Roger Kahane en 1965 : « Ça n'a rien à faire, un mec ne pourrait jamais faire ça. Il n’aurait jamais pu tirer avec un fusil sur des tableaux comme j’ai fait à une certaine époque. Parce que de se servir de ces engins destructifs que l’homme a imaginés, c’est seulement une femme qui pourrait s’en servir dans un but constructif et beau. »

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Elle entretiendra cette volonté parricide en coréalisant avec Peter Whitehead en 1973 le film « Daddy ». Elle déclare au sujet de ce dernier : « À travers les images, je piétine mon père, je l’humilie de toutes mes forces et je le tue ».  

À 64 ans, elle devient une des premières personnalités publiques à témoigner de l’inceste dont elle a été victime. Un témoignage qui prend la forme de la publication d’un ouvrage en 1994 aux éditions de la Différence, « Mon Secret » où elle fait part de l’inceste subit par son père dans sa jeunesse. Ce récit autobiographique va être annoncé bien antérieurement dans une lettre à sa fille Laura : « Un jour, je ferai un livre pour apprendre aux enfants comment se protéger ». Sur la dernière de couverture de ce dernier, elle confie en écriture manuscrites ses motivations : « J’ai écrit ce livre d’abord pour moi-même, pour tenter de me délivrer enfin de ce drame qui a joué un rôle si déterminant dans ma vie. Je suis une rescapée de la mort. J’avais besoin de laisser la petite fille en moi parler enfin. Mon texte est le cri désespéré de la petite fille. »