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Motion de censure rejetée : un jeu politique dont tout le monde sort tout de même gagnant ?

Motion de censure rejetée  un jeu politique dont tout le monde sort tout de même gagnant
Sans surprise, la motion de censure n’a pas été adoptée par une majorité de députés à l’Assemblée, ce lundi 11 juillet. Pourtant, chaque groupe parlementaire en tire profit dans le jeu politicien.

Loin d’un coup d’épée dans l’eau. La motion de censure déposée par 55 des députés de la Nupes et votée ce lundi 11 juillet n’a obtenu que 146 votes pour, contre les 289 requis. Le groupe parlementaire Les Républicains et le Rassemblement national avaient annoncé qu’ils s’abstiendraient ou voteraient contre. Rien de vraiment surprenant : « En règle générale, la motion de censure n’a pas vraiment pour objectif d’être adoptée », atteste Benjamin Morel, maître de conférences à l'Université Panthéon-Assas, spécialiste du Droit constitutionnel.

Dans l’histoire de la Ve République, seule la motion déposée contre le gouvernement de Georges Pompidou le 5 octobre 1962 a été adoptée. Et ce n’est pas un hasard tant la Constitution de la Ve République a été pensée pour que les gouvernements ne tombent pas. « La motion de censure est souvent utilisée pour marquer un moment de gravité politique », explique Benjamin Morel. Lors du précédent quinquennat d’Emmanuel Macron, des motions avaient ainsi été déposées par Les Républicains puis par les partis de gauche (LFI, PS et PCF) pendant l’affaire Benalla et la crise des Gilets jaunes. Ce lundi, les députés de gauche ont voulu affirmer aux autres groupes de l’Assemblée qu’ils étaient la force principale d’opposition. Mais les autres partis ont aussi su tirer profiter de ce moment démocratique.

Pour la Nupes, s’imposer en force d’opposition

« Pour la clarté des choses, il est important de montrer sur qui Élisabeth Borne peut compter et qui est dans son opposition », lâchait le 6 juillet dernier Boris Vallaud, président du groupe PS à l'Assemblée nationale, au sortir de l'hémicycle. Plus que renverser le gouvernement, les députés de la Nupes veulent donc montrer qu’ils incarnent une « vraie » opposition au gouvernement. Le RN et les Républicains ont refusé de voter pour une motion de censure présentée par la gauche. D’un point de vue stratégique, c'est aussi ce que recherchait la coalition Nupes. « Les élus de gauche peuvent affirmer que les partis de droite soutiennent la majorité et que le RN est un croupion du néolibéralisme », analyse Benjamin Morel. Ce qui ferait de la Nupes la première force d’opposition frontale et de Jean-Luc Mélenchon la seule alternative.

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Faire débattre une motion de censure est aussi un « coup de force politique » pour le constitutionnaliste. « Elle a comme vertu d’obliger le Premier ministre à répondre aux questions de l’opposition, précise-t-il. C’est une façon de mettre le gouvernement au pied du mur et de mettre les projecteurs sur les élus à l’origine de la motion. » Un coup de force, à condition qu’une très grande majorité de la coalition de gauche vote en faveur de la motion. Ce qui semble se confirmer puisque la motion a obtenu 146 votes favorables, soit la quasi-totalité des élus de gauche.

Pour LR et le RN, lever l’ambiguïté

Si la motion de censure n’a pas été lancée par la droite et l’extrême droite, elle fait aussi leurs affaires. Un vote de confiance au gouvernement aurait été bien plus embarrassant pour ces élus. Voter contre ? Ce serait renoncer à l’idée de s’inscrire de manière constructive dans le jeu parlementaire. Une stratégie privilégiée par le Rassemblement national pour se crédibiliser à l’Assemblée. Voter pour reviendrait à renoncer à sa posture d’opposition. « La solution aurait été l’abstention mais aurait-elle été bien compris par ses électeurs ? », interroge Benjamin Morel.

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La motion simplifie dès lors le jeu politicien. « Les élus de droite et du RN ne peuvent pas se mélanger à un texte établi par les mélenchonistes », ajoute le maître de conférences. L’abstention a été bien plus simple à justifier.

Pour le gouvernement, obtenir un « vote de confiance »

Olivier Véran, nouveau porte-parole du gouvernement a annoncé le 6 juillet que le gouvernement Borne ne se soumettra pas à un vote de confiance. Il n’est pas tenu d’en organiser un et l’absence de majorité absolue le rend particulièrement dangereux. À l’inverse, une motion de censure déposée par la Nupes est plus confortable. La majorité obtient un vote, qu’elle peut présenter comme « un vote de confiance » gagné par le gouvernement. Olivier Véran n'a d'ailleurs pas manqué l'occasion d'affirmer que ce vote est une « nouvelle défaite pour Jean-Luc Mélenchon ». D’un point de vue de la politique politicienne, tout le monde y trouve son compte.

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