Motion de censure à l'Assemblée nationale : à quoi ça sert ?
En réaction au passage en force du gouvernement sur le projet de loi de finances, l’Assemblée nationale s’apprête à examiner deux motions de censure ce lundi à 16 heures, celle de la Nupes et celle du RN. Les quatre groupes de gauche en ont également déposé une en réponse au 49.3 sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Cependant, sans le vote du groupe LR, elles n’ont que peu de chances d’être adoptées. Mais à quoi sert ce mécanisme parlementaire, arme d’excellence de l’opposition ?
Une motion de censure, qu’est-ce que c’est ? Prévue par la Constitution de 1958, elle a pour but de renverser le gouvernement. C’est, autrement dit, un moyen de contrôle exercé par l’Assemblée nationale sur l’exécutif.
Concrètement, une motion de censure est dite soit spontanée, soit provoquée. Ces deux mécanismes ont les mêmes effets, à ceci près qu’ils n’ont pas les mêmes conséquences. La motion de censure spontanée (article 49-2 de la Constitution) prend forme à la seule initiative des députés, alors qu’une motion de censure provoquée intervient si le Premier ministre engage la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur un texte déposé (le fameux 49-3).
Une motion de censure ne peut être présentée que si elle réunit la signature d’un dixième des membres de l’Assemblée. Soit 58 députés à l’heure actuelle. Elle est ensuite votée, et doit réunir la majorité absolue pour être adoptée, soit 289 voix.
Quelles sont les conséquences en cas d’adoption ?Si une motion de censure est adoptée, elle a pour conséquence directe la démission du gouvernement. Démission que le Premier ministre remet au président de la République. Mais en cas d’adoption d’une motion en réponse à un 49.3, l’enjeu est double, puisque celle-ci aurait également pour effet le rejet du texte pour lequel le gouvernement avait engagé sa responsabilité.
Une arme redoutable donc, mais qui n’a pourtant eu que peu d’impact depuis 1958. En effet, une seule motion de censure a été adoptée sous la Ve République, le 5 octobre 1962, sur fond de désapprobation par la majorité parlementaire de la réforme introduisant l’élection du président de la République au suffrage universel direct. Alors premier ministre, Georges Pompidou est contraint de présenter la démission de son gouvernement au général de Gaulle. La chambre basse est alors dissoute quatre jours plus tard par le président qui, in fine, emportera les élections législatives ainsi provoquées.
Depuis cet épisode, aucune motion de censure n’a réussi à atteindre la majorité requise. Au total, plus d’une centaine de motions ont été déposées depuis 1958.
Emmanuel Macron agite le spectre de la dissolutionFace à cette contre-attaque de l’opposition, le chef de l’État a lancé un avertissement en début de mois. En effet, celui-ci n’a pas hésité à brandir la menace d’une dissolution en cas d’adoption d’une motion de censure.
Avec l’utilisation du 49-3 pour adopter sans vote le premier volet du projet de loi de Finances (PLF), le gouvernement a fait le choix du passage en force. Le dispositif a également été actionné par la première ministre, Élisabeth Borne, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Du lundi au vendredi, l’actu essentielle décryptée par la rédaction de l’Humanité.
Les deux motions déposées en réponse au 49.3 sur le PLF par la Nupes et le RN seront discutées ce lundi à partir de 16 heures. Mais elles n’ont que peu de chances d’aboutir. Les membres du groupe LR ont en effet annoncé qu’ils ne voteraient ni pour l’une, ni pour l’autre, prétextant refuser d’ « ajouter du désordre au désordre ». En revanche, si la Nupes ne compte pas voter le texte du RN, le président par intérim du parti d’extrême droite Jordan Bardella n’a quant à lui pas fermé la porte à un soutien du texte de la Nupes.
Les quatre groupes de gauche ont également déposé une motion concernant le PLFSS qui doit également être discutée ce lundi, probablement lors de la séance de 21 h 30.
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