Milan-SanRemo : Tadej Pogacar, trahi par son équipe UAE Team ...
Il faudra attendre une année supplémentaire, au moins, pour voir Tadej Pogacar lever les bras sur la Via Roma. Sur un plan purement comptable, le Slovène d’UAE Team Emirates pourra toujours se targuer s’être rapprocher un peu plus du succès, comme c’est le cas depuis ses débuts sur Milan-SanRemo : 12e en 2020, 5e en 2022, 4e en 2023 et donc 3e en 2024, son premier podium sur la Primevera. Un résultat dont il semblait presque se satisfaire à l’arrivée. "Je suis content de ce podium , déclarait-il après la ligne. J’ai fait ce que j’ai pu mais je ne pouvais pas faire mieux". Sur ce point, difficile de ne pas être d’accord avec le Slovène.
La Cipressa, symbole du raté des UAE Team Emirates
Comme les années précédentes, Pogacar est passé à l’attaque dans le Poggio, après avoir été lancé par Tim Wellens. Du tableau noir qui n’a cependant pas fait la sélection espérée. Car si Mathieu Van der Poel est bien évidemment resté dans la roue du Slovène, il n’était pas le seul avec Mads Pedersen, Thomas Pidcock et Alberto Bettiol qui ont pu accrocher le bon wagon.
"J'avais des jambes incroyables mais ce n'était pas assez dur pour un grimpeur !" reconnait Pogacar
Contrairement à l’an passé, le leader des UAE Team Emirates a alors choisi de temporiser pour mieux attaquer une seconde fois, de manière plus efficace puisque personne n’a pu le suivre, lui permettant de basculer en tête dans la descente, avec quelques mètres d’avance sur Van der Poel, nouveau record d’ascension à la clé (2’’ plus vite que Van der Poel l’an dernier). Insuffisant malgré tout. Car si "Pogi" ne s’est pas isolé, c’est avant tout car son équipe n’a pas su l’aider.
"La communication est une chose, le terrain en est une autre" : Les mots de notre consultant Steve Chainel, dans le débrief des Rois de la Pédale, est un bon résumé de la semaine des UAE Team Emirates. En parlant de record de la Cipressa, du seuil improbable des 9 minutes, ils avaient vendu le rêve d’une course au scénario différent de d’habitude, pour mieux lancer Tadej Pogacar vers la victoire. Et ils ont au contraire sonné le glas de ses ambitions, dès la Cipressa.
UAE Team Emirates' Slovenian rider Tadej Pogacar cycles during the 115th Milan-SanRemo one-day classic cycling race, between Pavia and SanRemo, on March 16, 2024.
Crédit: Getty Images
"Tout le monde s'attendait à ce que nous réalisions le meilleur temps d’ascension de l’histoire, mais ça a finalement probablement été le plus lent", s’étonnait d’ailleurs Mathieu Van der Poel, exagérant légèrement (environ 9’35’’, plus rapide que l’an passé) mais symbole de la montée loin des espérances de la formation UAE Team Emirates et d’une journée globalement à l’envers.
Ils se sont vus trop beaux
"Si on arrive à 11 coureurs sur la Via Roma, c’est que ça n’a pas été assez vite, analysait Steve Chainel. Ce ne sont même pas eux qui ont abordé en tête la Cipressa ! Impossible de faire 9 minutes si tu n’abordes pas l’ascension en tête… Mais même au-delà de ça, quand on arrive au Capo Berta, ils ne sont pas ensemble, seuls Domen Novak et Alessandro Covi font le travail. Dans la Cipressa, on voit Wellens qui fait le boulot mais ce n’est pas à lui d’être là à ce moment-là, il doit être là dans le Poggio lui ! Del Toro il fait un énorme effort pour revenir à l’avant du peloton avant même de travailler, Covi est lâché à 4km du sommet…"
"Les UAE n'ont pas été au niveau" : le débat tactique sur l'armada de Pogacar
"Pour moi, la formation UAE Team Emirates n’était pas au rendez-vous pour emmener Pogacar, pour rendre ce Milan-SanRemo encore plus dur, estime-t-il. Tactiquement parlant, ils n’ont pas été au niveau". Même son de cloche du côté de Jacky Durand. "Ils se sont vus trop beaux, juge-t-il. Certains coureurs n’ont pas été à la hauteur. On n’a pas vu Diego Ulissi, Hirschi n’était pas à la hauteur… Wellens l’a été, Del Toro a été énorme mais les autres n’étaient pas à 100% et, pour mettre le bazar dans la Cipressa, il faut que tout le monde soit à 100%".
Résultat, au lieu d’avoir une dizaine de coureurs au pied du Poggio comme annoncé et voulu, ils étaient une bonne trentaine encore. "Le groupe qui a commencé au Poggio aurait dû être plus petit", avouait d’ailleurs Tim Wellens pour le Het Nieuwsblad. Mais là encore, les UAE Team Emirates se sont ratés.
On a trop attendu dans le Poggio
Nous aurions dû appuyer davantage à la fin", estimait le Belge, seul équipier de Pogacar dans la dernière montée et qui a du temporiser un peu avant de produire son effort. "Il ne nous a pas manqué grand-chose mais on a trop attendu dans le Poggio et on n’a réussi à durcir suffisamment, analyse Pogacar. J’ai essayé malgré tout avec deux attaques, j’avais des jambes incroyables, mais cette année, ce n’était pas assez dur tout simplement. Je crois qu’on a eu l’une des courses les plus faciles de l’histoire. C’est une course où tout doit être parfait mais ce n’était pas notre cas". Et comme l’an dernier, c’est Alpecin-Deceuncink qui en a profité.
???? La chute des lunettes de Matthews... sur Pogacar
Tadej Pogacar, lui, donne l’impression année après année de se rapprocher de la victoire tout en s’en éloignant de plus en plus de l’idée de s’isoler dans le Poggio. A force, on va finir par se demander si le Slovène peut réellement remporter Milan-SanRemo. Sa pointe de vitesse, qui lui a permis de devancer au sprint sur la Via Roma Mads Pedersen en 2022 comme en 2024, peut-elle lui offrir une stratégie différente, plus défensive, même si c’est à l’encontre de ses habitudes ? Devra-t-il attendre le soutien d’un Remco Evenepoel pour oser la tant rêvée offensive dès la Cipressa ? Ou remiser sur ses équipiers pour durcir et émousser tout le monde avant le Poggio ? Début de réponse en 2025.