Le musicien Marcel Zanini, auteur de « Tu veux ou tu veux pas ...
Le musicien de jazz, petit bonhomme au bob vissé sur la tête, aux lunettes rondes et à la moustache posée sur un large sourire, qui a triomphé avec le tube Tu veux ou tu veux pas ? à la fin des années 1960, est mort mercredi 18 janvier, à 99 ans, à Paris.
Marcel Zanini est né le 9 septembre 1923 à Constantinople (Istanbul), d’une mère grecque orthodoxe de Turquie et d’un père marseillais aux origines napolitaines. Sa famille quitte la Turquie en 1930 et s’installe à Marseille. Son coup de foudre pour le jazz a lieu lorsqu’il a 19 ans, en 1942, quand il entend le clarinettiste Benny Goodman jouer dans un film américain. Il apprend la clarinette avant d’être embrigadé dans les chantiers de jeunesse qu’il fuit très vite et passe la guerre dans un orchestre militaire à Uzès. Après la démobilisation, il est engagé dans une boîte de nuit de Marseille, le Saint James, où il joue avec un pianiste et un batteur. A partir de 1946, il tourne avec l’orchestre de son ami Léo Missir.
Fin août 1954, à l’invitation d’un ami de New York, Zanini part aux Etats-Unis. Dès son arrivée, il se rend dans un club de jazz fameux, le Birdland. A New York, il côtoie de grands noms du jazz et rencontre même Charlie Parker. Mais ses préférences vont à Louis Armstrong, dira-t-il dans un entretien à Radio France en 2017 : « Il a tout compris, il joue exactement les notes à leur place et comme chanteur et comme trompettiste. » Un modèle !
Il écrit aussi pour la revue Jazz Hot et travaille chez un marchand d’anches musicales. Il joue dans différents clubs, et notamment à Brooklyn, mais son salaire de 13 dollars par semaine devient insuffisant. En 1958, il revient à Marseille avec son épouse, Suzanne, qui donne naissance à leur fils, Alain. Zanini monte une nouvelle formation et reprend les tournées. Avec son orchestre « Les Challengers », il reprend de nombreux titres de jazz, traduits en français, qu’il interprète.
« Plus tard, en 1962, j’ai rencontré Eddie Barclay dans la rue. Notre premier 45-tours, nous l’avons enregistré en deux heures au studio de l’avenue Hoche ! », dit-il. Il a presque 40 ans et c’est son premier disque intitulé Oui, Oui. Sa carrière est lancée et les tournées s’enchaînent. Il accompagne un temps le chanteur Henri Salvador. Il joue aussi dans des clubs marseillais comme le Vamping.
« Tu veux ou tu veux pas »Après plusieurs productions, il connaît enfin le triomphe avec le tube Tu veux ou tu veux pas ?. Fin avril 1969, il enregistre, en un quart d’heure pour Barclay, cette adaptation en français d’une chanson à succès brésilienne, dont les paroles sont retouchées mais pas le refrain. Un million de disques sont vendus et ce personnage haut en couleurs devient immensément populaire. La chanson sera reprise par Brigitte Bardot.
Ce succès lui permet de continuer à jouer notamment dans les clubs de jazz parisiens avec son sextet. Son fils, l’écrivain et guitariste Marc-Edouard Nabe, l’accompagnera parfois dans ses spectacles. Le batteur Sam Woodyard rejoint son groupe de musiciens dans les années 1970.
En 2008, à 85 ans, Marcel Zanini sort chez sa maison de disques fétiche, Frémeaux & Associés, son dernier album intitulé Tu veux ou tu veux pas ?, reprises jazzy de ses morceaux les plus célèbres et des airs amusants comme Kelbokuta. Avec une caricature du dessinateur Siné sur la pochette. Le style est donné, à l’image du personnage.
Autre facette du personnage, le succès de Tu veux ou tu veux pas ? lui a ouvert les portes du cinéma. Après quelques films qui n’ont pas laissé de souvenirs impérissables, il joue à deux reprises pour Bertand Tavernier dans Autour de minuit (1986), et La Vie et rien d’autre (1989).
Infatigable, l’artiste s’est également produit pendant plus de trente ans au club Petit journal Saint-Michel, dans le 5e arrondissement de Paris. Il y jouait encore à près de 96 ans…
Edouard Pflimlin