Mandanda positif au Covid deux fois en trois semaines, comment est-ce possible?
CORONAVIRUS - Battu par le virus. La révélation, le soir du 3 septembre, du résultat positif de Steve Mandanda au test RT-PCR est une très mauvaise surprise pour l’équipe de France masculine de football. Le gardien des bleus serait donc encore infecté par le Covid-19, alors même qu’il l’avait déjà été moins d’un mois plus tôt: une infection révélée par un premier test le 14 août.
À la fin du mois pourtant, une fois sa quarantaine passée, il avait développé des anticorps. Plus étonnant encore: deux tests virologiques passés au même moment s’étaient avérés négatifs. S’agirait-il alors d’une réinfection? Si le scénario n’est pas totalement à exclure, il n’est pas le plus probable.
L’une des spécificités du coronavirus, c’est en effet sa persistance dans le corps humain, bien après qu’il ait cessé de montrer des symptômes...et parfois après que le malade ait développé les anticorps nécessaires à sa guérison. Dès le mois d’avril 2020, une étude chinoise prenait l’exemple d’une patiente qui, infectée par le virus, montrait les symptômes de la forme sévère de la maladie, avec notamment une forte fièvre.
Guérie, elle ne montrait plus aucun symptôme, et son métabolisme avait généré des anticorps 10 jours après l’arrivée des symptômes. Pourtant, testée presque quotidiennement, elle était encore positive 63 jours après son infection!
Wang-Da Liu,1 Sui-Yuan Chang,1 Jann-Tay Wang, Ming-Jui Tsai, Chien-Ching Hung, Chia-Lin Hsu, and Shan-Chwen Chang, NCBI
Plus intéressant encore, la patiente était régulièrement négative au Covid durant son passage à l’hôpital... comme Steve Mandanda, contrôlé deux fois les 23 et 27 août, deux tests au résultat négatif. À partir du 25e jour d’infection, comme vous pouvez voir ci-dessus, les tests réalisés dans la gorge et dans le nez de la patiente montraient, d’abord un jour sur deux, puis deux jours sur trois, qu’elle n’était plus porteuse d’une charge virale.
À première vue incohérents, ces résultats démontrent que Sars-CoV-2, même lorsqu’il a perdu la guerre, reste sur le champ de bataille, bien que dans des proportions bien plus faibles, parfois inoffensives, et plus difficilement détectables. Car s’il est certain qu’un test positif veut dire qu’on a trouvé le génome du virus dans l’échantillon, un test négatif ne veut pas dire que le virus est totalement absent. S’il est présent en très faible quantité, il est possible de passer à côté.
Le “cadavre” du virus encore làCette caractéristique du Covid a été mise en évidence depuis au travers de multiples études, mais aussi par les témoignages de malades atteints de ce que l’on appelle souvent le “long covid”. Pour eux, malgré une réaction adaptée de leur système immunitaire, les symptômes persistent, parfois sous d’autres formes, durant des mois. Ces derniers ne sont pas toujours positifs au virus, et leur cas est aujourd’hui un sujet d’étude grandissant.
D’autres fois, la persistance du virus se fait via son “cadavre”, les restes du virus après son élimination par les anticorps: il n’y a donc plus de symptômes, mais cela suffit à rendre les tests positifs, comme l’explique le virologue Ian McKay sur le site Virology down under : “Nous savons par de multiples exemples que certaines personnes gardent le matériel génétique du virus en eux [...] cela peut faire penser à un faux positif. Mais cette personne était malade il y a des semaines.”
Être positif au test PCR avoir vaincu le virus est donc une possibilité déjà connue des médecins...surtout lorsque le test a lieu dans la cavité nasale. C’est en effet là que l’on trouve la plus forte concentration virale, donc là aussi où les chances d’obtenir un test positif même lorsque le virus est présent en très faible quantité ou sous forme dégradée sont les plus grandes.
Une piste appuyée par la Fédération Française Football (FFF), qui précise dans un communiqué du 4 septembre que ces résultats du gardien français proviennent “très certainement de traces résiduelles sans que cela ne puisse être considéré comme une réinfection ou une persistance virale”. L’autorité du foot français reprend ici les mots du Conseil scientifique dans son avis du 20 juillet, évoquant justement la possibilité de tests positifs chez des personnes guéries.
“Mandanda ne doit donc pas être considéré comme malade ou contagieux” et s’est d’ailleurs entraîné normalement avec l’équipe de France à Clairefontaine”, rappelle la Fédération.
Il est vrai que dans ce cas, les chances de contamination de l’entourage sont infimes, voir nulles. si le virus a totalement disparu dans sa forme active. Steve Mandanda, qui ne montre aucun symptôme de la maladie, pourrait tout simplement être la victime de cette situation...ou au contraire, être à nouveau infecté.
Une réinfection possible, mais peu probableC’est la grande inconnue depuis le début de l’épidémie: une fois que l’on a été touché par le Covid-19, est-on immunisé face au coronavirus ? En théorie, après avoir été contaminé, le corps développe des anticorps pour détruire le virus qui vont rester présents et se réactiver en cas de nouvelle infection.
Mais la réalité est bien plus complexe. Il faut une certaine quantité d’anticorps pour être immunisé parfaitement, sinon, le risque est d’être simplement asymptomatique. Surtout, cette quantité diminue avec le temps. La durée de l’immunité dépend donc de ce nombre d’anticorps et de la date d’infection.
Jusqu’à récemment, les chercheurs n’avaient pas trouvé de vraie preuve de réinfection. Les cas médiatisés au début de l’épidémie étaient plus probablement liés à une détection de virus par PCR datant de la première infection. Mais les choses changent. Fin août, une première étude a fait état d’un cas de réinfection à Hong Kong, quatre mois et demi après que la personne ait été contaminée, symptomatique et testée.
Mais pour Steve Mandanda, la durée est bien moindre: seulement 19 jours. C’est pour cela qu’une réinfection semble improbable. Mais pas impossible. Fin août toujours, un premier cas de réinfection a été confirmé aux États-Unis. Le jeune homme de 25 ans a été touché 48 jours seulement après la première contamination. Ce qui est tout de même plus de deux fois plus long que pour le gardien français.
Le seul moyen de clarifier le mystère pour Steve Mandanda serait d’analyser le génome du coronavirus trouvé dans son nez. Comme tous les virus, il mute régulièrement. Pas de panique, cela ne change rien à son comportement pour l’instant. Par contre, cela permet de tracer le virus en analysant ces évolutions pour créer des “lignées génétiques”, un peu comme un arbre généalogique. Pour être certain qu’une personne a bien été victime d’une réinfection, on regarde donc si le génome du virus sur les deux tests PCR est différent. Reste à savoir si une telle analyse sera réalisée sur le gardien français.
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