TOUT COMPRENDRE. Blindés dans la rue, loi martiale... La Corée ...
Le président sud-coréen Yoon Suk-yeol a décrété la loi martiale ce mardi, avant d'être largement bloqué par les députés. L'opposition a estimé "qu'il s'agit essentiellement d'un coup d'État."
Le dirigeant sud-coréen Yoon Suk-yeol a annoncé ce mardi 3 décembre mettre en place la loi martiale afin de protéger le pays des "forces communistes nord-coréennes". Mais quelques heures plus tard, le président a annoncé la levée de cette mesure d'exception, contraint par un vote des députés sud-coréens.
• Pourquoi le président sud-coréen a décrété la loi martiale?
Dans une allocution télévisée, Yoon Suk-yeol a décrété la loi martiale ce mardi. L'objectif selon lui: "Protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes et éliminer les éléments anti-étatiques."
"Sans se soucier des moyens de subsistance du peuple, le parti d'opposition a paralysé le gouvernement, à des fins de destitutions, d'enquêtes spéciales et pour protéger son leader de poursuites judiciaires", a poursuivi le président.
Un décret en six points du nouveau commandant de la loi martiale, le chef de l'armée et général Park An-su, a rapidement suivi, interdisant les activités et les partis politiques, la "fausse propagande", les grèves et les "rassemblements qui incitent à l'agitation sociale".
Le décret place également tous les médias sous l'autorité de la loi martiale et ordonne à tout le personnel médical, y compris les médecins en grève, de reprendre le travail dans les 48 heures. Un important dispositif militaire s'est alors déployé dans les rues de Séoul avec de nombreux militaires et plusieurs blindés.
Cette allocution intervient en plein débat sur le budget 2025. Les députés de l'opposition ont approuvé la semaine dernière, à travers une commission, un programme budgétaire considérablement réduit. Le président sud-coréen a accusé les élus de l'opposition de couper "tous les budgets essentiels aux fonctions premières de la nation".
• Comment ont réagi les Sud-coréens?
De nombreux Sud-coréens se sont réunis devant le Parlement, à Séoul, à l'appel de l'opposition. Les manifestants y sont restés même après la décision de lever cette mesure d'exception. "Levez la loi martiale, protégez la démocratie", scandaient les manifestants, selon un journaliste de Reuters présent sur place. Selon ce dernier, la foule a appelé à la destitution du président Yoon Suk-yeol.
Hwang Un-ha, le chef de file du Parti pour la reconstruction de la Corée, a partagé son intention de faire pression en faveur d'une motion de destitution.
• Comment a réagi l'opposition?
Le chef de l'opposition Lee Jae-myung, majoritaire au Parlement, a qualifié les actions du président "d'illégale" et avait appelé la population à se rassembler devant le Parlement en signe de protestation. Il a estimé que "l'économie de la République de Corée s'effondrera irrémédiablement". À travers un communiqué, le parti démocrate, qui est la principale force d'opposition, a estimé "qu'il s'agit essentiellement d'un coup d'État."
190 des 300 députés ont réussi à rejoindre l'Assemblée nationale, malgré la forte présence militaire. Les élus, dont des membres du camp gouvernemental, ont massivement rejeté l'instauration de la loi martiale. Un vote approuvé par le gouvernement, selon l'agence de presse Yonhap. Les militaires présents autour du bâtiment se sont alors retirés.
Les chefs d'état-major interarmées ont déclaré que les troupes, qui avaient été mobilisées pour appliquer la loi martiale, étaient retournées à la base, ce qui a rétabli un sentiment de normalité.
• Quelles ont été les réactions à l'international?
La brève instauration de la loi martiale a suscité la crainte de la communauté internationale jusqu'à la levée de cette mesure d'exception. "C'est notre espoir et notre attente que les lois et normes d'un pays en particulier seront respectées. Cela inclut le vote à l'Assemblée nationale" de Corée du Sud, a déclaré Vedant Patel, porte-parole adjoint du département d'État américain, lors d'un point presse.
Les États-Unis, qui disposent de près de 30.000 militaires dans le pays, n'ont pas été informés à l'avance des décisions du président sud-coréen. "Nous suivons de près et avec beaucoup d'inquiétude l'évolution de la situation en Corée du Sud. La démocratie doit prévaloir", a déclaré de son côté le ministère allemand des Affaires étrangères. De son côté, l'ONU a dit suivre "de très près et avec inquiétude" la situation dans ce pays.
Matthieu Heyman