"Loft Story": comment la série "Culte" redonne une voix à Loana
Près de 25 ans après Loft Story, la série Culte diffusée sur Prime raconte, façon thriller, les coulisses de l'émission qui a introduit la téléréalité en France. Et rend à Loana son intégrité.
Tout le monde connaît Loft Story, ou en a entendu parler. Tout le monde sait ce qu'évoque "la piscine" et qui est Loana. Pourtant, la série diffusée vendredi 18 octobre sur Prime Vidéo parvient à raconter autre chose que le quotidien des "lofteurs", qui s'ennuyaient à cent sous de l'heure dans un studio de la Plaine Saint-Denis, sous le regard indiscret des Français.
La série en six épisodes retrace l'histoire de la première émission de téléréalité de la télévision française, en 2001. Mais adopte un point de vue et un rythme radicalement opposés, pour se glisser dans les coulisses trépidantes de la production.
"Le projet n'était pas de raconter le Loft. Les gens l'ont vu le Loft, et ils peuvent le revoir, c'est sur Youtube", explique à BFMTV.com Nicolas Slomka, cocréateur de la série avec Matthieu Rumani. "L'idée, c'était de raconter tout ce que les gens n'ont pas vu".
Cultes retrace donc de façon ultra rythmée et avec de multiples rebondissements les luttes de pouvoir entre chaînes, les coups bas au sein de la production qui ont conduit à la création du programme en France.
"C'est très violent"
"C'est un monde, le monde de la télévision, dans lequel les rapports humains sont très durs, évoque Nicolas Slomka. "Les gens se trahissent, il y a des rapports de chantage, c'est très violent."
Les créateurs de la série, inspiré par The Social Network de David Fincher, ont ce projet en tête depuis 10 ans. Ils ont enrôlé Alexia Laroche-Joubert, productrice de Loft Story à l'époque, qui coproduit la série. "Elle a entendu parler du projet et elle s'est dit 'ça m'intéresse, parce que c'est mon histoire'".
Celle qui était à l'époque une jeune productrice, est rebaptisée dans la série Isabelle de Rochechouart et incarnée par Anaïde Rozam. Son flair, son sens de la répartie, son culot et son cynisme en font l'un des personnages les plus intéressants de la série. "Il va falloir changer l'eau de la piscine", lâche-t-elle ainsi en découvrant les ébats de Loana et Jean-Edouard dans la fameuse piscine.
Récit mouvementé des coulisses de cette révolution télévisuelle, la série Culte raconte aussi la naissance de sa première icône: Loana. Et réhabilite l'image de la jeune femme, lui rendant son humanité.
"On ne pouvait pas parler de Loft Story sans parler de Loana", souligne Nicolas Slomka. "On voulait raconter ce moment pivotal qu'est celui de la piscine, il y a un avant et un après dans la vie de nos personnages, dans la vie de l'émission, et dans la télévision française."
"Une très belle rencontre"
Le duo a donc rencontré Loana, qui s'est montrée très généreuse et a accepté de se raconter.
"Elle a très vite compris qu'on était dans une démarche bienveillante. Et donc elle s'est confiée à nous. On a fait une très belle rencontre, elle nous a raconté des choses qu'elle n'avait jamais révélées, qui n'étaient pas dans les livres ni dans les interviews", indique le showrunner.
Avec Matthieu Rumani, ils ont donc eu envie de "créer un personnage au plus près de qui elle était vraiment. De lui redonner une voix. Les gens, aujourd'hui, se souviennent de la séquence de la piscine et puis ils ont en tête ce qu'est devenue Loana, les accidents de la vie qui lui sont arrivés. Mais ils ont oublié tout ce qui a suivi la piscine. Toute cette phase pendant Loft Story et après Loft Story, où elle a repris le pouvoir sur son image. Ça on trouvait important de le rappeler aux gens."
"Touchante, intelligente"
La série montre l'évolution de Loana, gogo danceuse timide, à l'écart dans le Loft tant elle semble inadaptée, et qui se révèle au fil du programme.
"Ce n'est pas par hasard si les gens sont tombés amoureux d'elle à l'époque", avance Nicolas Slomka. Les gens ont découvert qu'elle était touchante, intelligente. Ils ont été émus par le rejet de Jean-Edouard. Après la piscine, Jean-Edouard l'a jetée comme une chaussette. Ça a été un pincement dans le cœur de tous les Français, et ça on voulait le raconter."
Pour la brune actrice Marie Colomb, qui a glissé sa silhouette menue dans les crop top de Loana, il a fallu un long travail "intérieur" et "extérieur". "J'ai regardé tout le Loft, lu le livre de Loana (ndlr: Elle m'appelait... Miette paru en 2001), j'ai regardé tout ce qui était possible. J'ai essayé de la comprendre, de comprendre son enfance".
Pour la ressemblance, elle s'est fait aider d'une coach afin d'apprendre à placer sa voix, son corps. Et puis il y a eu "changement de cheveux, décolorés, les sourcils, les faux seins", indique l'actrice.
"Une responsabilité en plus"
"J'ai essayé de faire en sorte de ne pas penser à tout ce travail, pour ne pas être dans l'imitation. J'ai essayé d'y mettre du cœur", livre l'actrice pour qui incarner une personne réelle "crée une responsabilité en plus".
"J'étais rassurée dans la mesure où Loana a travaillé avec les auteurs et le réalisateur, a vendu (à Prime) les droits de son livre", ajoute-t-elle.
Louis Farge, le réalisateur, a, lui aussi, échangé avec l'ex-gagnante du Loft. "Je l'ai rencontrée l'espace de trois heures. On a discuté beaucoup. Il y avait beaucoup de confiance, beaucoup de liberté. J'avais besoin de sentir des énergies. On a parlé de tout et de rien, comme deux amis", évoque-t-il.
"En plus de faire un thriller, il fallait être aussi touchant, pour découvrir ce personnage et qu'on s'y attache".
Magali Rangin