La Bonne épouse : ce témoignage surprenant sur les écoles ménagères qui a donné naissance au film
Dans "La Bonne épouse", Juliette Binoche, Yolande Moreau et Noémie Lvovsky apprennent à leurs élèves à devenir des compagnes parfaites. Un long-métrage qui revient sur l’époque des écoles ménagères, que Martin Provost a découvertes à travers des témoignages et des archives surprenantes.
Sorti en 2020, La Bonne épouse débute plus de cinquante plus tôt. En 1967, Paulette Van Der Beck (Juliette Binoche) dirige d’une main de fer une école ménagère basée en Alsace. Au sein de cet établissement, la directrice apprend à ses élèves à devenir de parfaites épouses, à savoir des femmes au foyer totalement soumises à leur mari, avec l’aide de sa belle-sœur Gilberte (Yolande Moreau) et de la religieuse Marie-Thérèse (Noémie Lvovsky).
Quand son époux Robert (François Berléand) décède subitement, Paulette découvre qu'il a extrêmement mal géré les comptes de l’école, notamment à cause de sa passion pour le jeu. Elle tente alors de redresser la barre financière pour sauver son institution de la faillite, soutenue par le banquier André Grunvald (Édouard Baer), son amour de jeunesse.
Mais plusieurs événements, à commencer par une idylle naissante avec André, remettent en cause la vision et les préceptes qu’elle s’est toujours efforcée d’inculquer. Alors qu’une révolution culturelle est en marche, Paulette décide d’y prendre part, entraînant avec elle tout son établissement.
S’il retrouve les thématiques de Violette, Où va la nuit ou Séraphine, Martin Provost les traite avec humour et légèreté dans La Bonne épouse. Anamaria Vartolomei, Marie Zabukovec, Lily Taïeb et Armelle complètent la distribution du film, récompensé par le César des Meilleurs costumes.
Une rencontre déterminante pour Martin ProvostAprès l’ouverture de la première école professionnelle et ménagère à Reims en 1873, l’enseignement ménager a duré près de cent ans en France. Les élèves y apprennent entre autres la puériculture, l’hygiène alimentaire, la cuisine, l’entretien de la maison ou encore le repassage. L’historienne Rebecca Rogers, citée par Allociné dans les notes autour du long-métrage, déclare à propos de ces établissements :
L’éducation ménagère est le symbole d’un monde social où les femmes sont clairement inférieures aux hommes, vouées à la gestion intérieure, laissant au sexe fort la gestion de la chose publique.
Avec la mixité scolaire et la libération des moeurs, les écoles ménagères tombent peu à peu dans l’oubli. Martin Provost et sa coscénariste Séverine Werba parviennent tout de même à se documenter sur le sujet grâce à des documentaires, ainsi que des témoignages. C’est d’ailleurs lors d’un échange avec une dame de 80 ans au cours d’un séjour dans le Cotentin que le cinéaste trouve l’idée du film. Son interlocutrice lui explique avoir choisi de ne pas faire d’études après la guerre, préférant aller à l’école ménagère pour être avec ses copines. Il ajoute à propos de cette rencontre :
Je ne savais pas exactement ce qu’était une 'école ménagère', mais l’entendant me parler de son expérience, j’ai vu des images défiler. (…) Autour de nous, des témoignages directs attestaient de cette époque révolue et en même temps pas si lointaine. Aux archives de l’INA, nous avons même déniché des documentaires étonnants sur ces écoles. Je me souviens de ma stupeur quand une présentatrice de l’époque, sosie de Denise Fabre, racontait avec beaucoup de sérieux qu’une repasseuse digne de ce nom ne pouvait terminer ses deux années d’apprentissage que par la chemise de monsieur, qui consacrait en elle la bonne épouse.