Pour « Vultures 1 », Kanye West en playback intégral, à l'Accor ...
Vingt ans après son premier album, The College Dropout, le rappeur Kanye West publiait, le 9 février, Vultures 1, en collaboration avec son collègue américain Ty Dolla Sign. Dans la foulée, il annonçait la tenue d’une listening party à l’Accor Arena de Bercy, à Paris, dimanche 25 février. Une « expérience musicale immersive », était-il annoncé. Une tromperie, en réalité, pour les spectateurs, qui avaient payé entre 90 et 200 euros la place.
Après une heure d’attente, toutes lumières éteintes, où certains, pour passer le temps, chantaient le slogan du PSG (« Ici, c’est Paris ! »), ou celui des agriculteurs (« Macron démission »), le public a eu droit à l’écoute intégrale de Vultures 1, dans de bonnes conditions sonores certes, mais sans qu’une seule fois Kanye West et Ty Dolla Sign, masqués d’une cagoule, n’aient pris un micro pour rapper ou pour dire un mot. Même pas un « bonjour » ou un « bonsoir », une fois la prestation en playback terminée. Ils se contentaient de mimer leurs textes, d’esquisser quelques pas de danse ou d’entrer et de sortir d’un halo de lumière centrale sous un écran, qui projetait leurs gesticulations. Sur le dernier morceau du disque, King, Kanye West a juste retiré sa cagoule. Au moins était-ce bien lui qui dansait depuis une heure.
Provocations racistes
Le Kanye West de 2024 n’est plus celui de 2004. Ce n’est plus l’ambitieux, l’enthousiaste musicien et beatmaker de Chicago qui avait signé la plupart des musiques des albums de Jay-Z, The Blueprint (2001), et de Scarface, The Fix (2002). Celui-là pétillait, ruait dans les brancards, notamment lors des cérémonies des MTV Video Music Awards pour rabrouer Taylor Swift – qui, déjà, remportait toutes les récompenses –, mais s’ingéniait aussi à accélérer les samples de soul, introduisait dans son morceau Jesus Walks une chorale gospel, s’enfermait en studio avec une dizaine d’autres artistes pour que chaque album renouvelle le son hip-hop.
En 2008, il imposait ainsi l’Auto-Tune et l’émotion dans les thèmes rap avec 808s and Heartbreak. Ce fils d’une professeure de littérature anglaise de Chicago et d’un photographe d’Atlanta ancien membre des Black Panthers n’avait alors pas sa langue dans sa poche pour fustiger, par exemple, un président américain trop lent à venir au secours des victimes afro-américaines de l’ouragan Katrina. « George Bush doesn’t care about black people ! » (« George Bush ne se préoccupe pas des Noirs »), déclarait-il en 2005.
Le jeune Kanye West, souvent exalté, toujours prêt à s’emporter, n’a plus rien à voir avec celui qui se fait désormais appeler Ye, de plus en plus tordu, à la fois friand de réflexions antisémites et de provocations racistes vis-à-vis de sa propre communauté, n’hésitant pas à affirmer, comme en 2018, que l’esclavage est un choix, ou à porter, le 3 octobre 2022, le tee-shirt des suprémacistes blancs américains, White Lives Matter, en réponse au mouvement qui lutte contre les violences policières, Black Lives Matter.
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