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Jean-Claude Carrière, entre cinéma et littérature

JeanClaude Carrière entre cinéma et littérature
L'écrivain et scénariste de génie est décédé lundi soir à Paris à l'âge de 89 ans, selon sa famille. Il avait travaillé aux côtés des plus grands cinéastes, dont Luis Bunuel, Milos Forman, Jacques Deray ou Volker Schlöndorff, et signé envir

Publié le 9 févr. 2021 à 7:51Mis à jour le 9 févr. 2021 à 9:21

Jean-Claude Carrière, écrivain prolifique et scénariste de génie aux côtés de Luis Bunuel, Jacques Deray ou plus récemment Philippe Garrel , se définissait comme un « conteur », « plus attiré par son différent que par son semblable ». Apprécié autant par la critique que par le public, il était un véritable « athlète » de l'écriture, à la croisée des chemins entre cinéma, théâtre et littérature.

L'écrivain est décédé lundi soir à l'âge de 89 ans, a annoncé sa fille à l'AFP. L'écrivain, qui ne souffrait d'aucune maladie particulière, est mort « dans son sommeil » à son domicile parisien, a précisé Kiara Carrière. « Un hommage » lui sera rendu prochainement à Paris et il devrait être inhumé dans son village natal, à Colombières-sur-Orb dans l'Hérault.

Au total, Jean-Claude Carrière a signé une soixantaine de scénarios ainsi qu'environ 80 ouvrages (récits, essais, comme ses « Dictionnaires amoureux » de l'Inde et du Mexique, traductions, fictions, entretiens). Il a été en outre acteur, dramaturge et parolier - pour Juliette Gréco, Brigitte Bardot ou Jeanne Moreau, notamment.

« Je n'ai pas d'ego »

« J'ai travaillé toutes les formes d'écriture. Je pense que je possède un bon arsenal. Il y a quelque chose en moi qui se satisfait d'être au service d'un auteur, de se couler dans sa pensée, de l'adapter au mieux. Je n'ai pas d'ego », assurait cet humaniste distingué et affable à la grande puissance de travail et à l'humour corrosif.

Costaud, solide, barbe courte et moustache légère poivre et sel, cheveux courts, Jean-Claude Carrière a placé sa vie sous le signe « des rencontres, des amitiés et des maîtres de vie », comme le Dalaï-Lama, avec lequel il a écrit un livre, ou le cinéaste espagnol Luis Bunuel, avec lequel il collabora dix-neuf ans, jusqu'à sa mort.

Autre rencontre importante : celle du dramaturge britannique Peter Brook, pour qui il adapta à la scène l'inégalé « Mahâbhârata », épopée de la mythologie hindoue, présentée pendant neuf heures d'affilée à Avignon en 1985 devant un public sous le choc. « Le voir en oubliant que je l'avais écrit fut un des grands bonheurs » de ma vie, assurait-il.

Passion des religions

« Radicalement athée », mais « passionné par la religion et ses déviances », étranger à tout fanatisme, il a écrit sur le bouddhisme et l'hindouisme mais aussi sur le christianisme avec son roman le plus célèbre, « La controverse de Valladolid », sur la conquête du Nouveau-monde par les Espagnols, décliné en pièce et adaptation télévisée. On lui doit également des travaux sur l'islam par ses traductions de poésie persane, avec son épouse, l'écrivaine iranienne Nahal Tajadod, avec laquelle il a eu une fille.

Comme scénariste, il est au générique de films majeurs : « Le Journal d'une femme de chambre », « Belle de jour » et « Le charme discret de la bourgeoisie » (Luis Bunuel), « Taking Off » (Milos Forman), « Borsalino » (Jacques Deray), « Le tambour » (Volker Schlondorff, Palme d'or à Cannes), « Danton » (Andrzej Wajda, prix Louis Delluc 1982), « L'insoutenable légèreté de l'être » (Philipp Kaufman), « Cyrano de Bergerac » (Jean-Paul Rappeneau), « Le retour de Martin Guerre » (Daniel Vigne), qui lui a valu le César du meilleur scénario en 1983. Il a reçu en 2014 un Oscar d'honneur pour son oeuvre de scénariste.

Ascenseur social

Né le 17 septembre 1931 à Colombières-sur-Orb (Hérault) de parents viticulteurs montés près de Paris en 1945 pour ouvrir un café, le jeune homme se révèle vite un élève brillant. Il devient boursier, saute dans l'ascenseur social qui le propulse à Normale sup. A 26 ans, il signe son premier roman, « Le Lézard », puis fait son service militaire en Algérie, rencontre Jacques Tati et Pierre Etaix, alors encore débutant. Avec ce dernier, il reçoit l'Oscar 1962 du meilleur court-métrage de fiction pour « Heureux anniversaire ».

Bibliophile, passionné de dessin, d'astrophysique, de vin et de tant d'autres choses encore, Jean-Claude Carrière a présidé pendant dix ans la Fémis, l'Ecole nationale supérieure des métiers de l'image et du son. Toujours très actif malgré son âge, il avait écrit en 2018 un dernier essai, « La vallée du néant », et cosigné en 2020 le scénario du long-métrage « Le sel des larmes » de Philippe Garrel.

Source AFP

A lire aussi: « Hétéro culturel de carrière» , le portrait de l'écrivain-scénariste paru dans les Echos Week-End en 2013

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