L'autrice sud-coréenne Han Kang décroche le prix Nobel de ...
Largement dominé par des écrivains de culture occidentale, le prix Nobel de littérature, attribué jeudi, a récompensé une plume originaire d’une région du monde autre que l’Europe ou l’Amérique du Nord. Il s’agit de l’autrice sud-coréenne Han Kang. Elle est récompensée « pour sa prose poétique intense qui confronte les traumatismes historiques et expose la fragilité de la vie humaine ».
Han Kang est née en 1970 dans la ville sud-coréenne de Gwangju avant de déménager à Séoul avec sa famille à l’âge de 9 ans. Elle est issue d’un milieu littéraire, son père étant un romancier réputé. Parallèlement à l’écriture, elle s’est également consacrée à l’art et à la musique, ce qui se reflète dans toute sa production littéraire.
« Quel que soit le livre que j’écris, cette violence ressort »
« J’ai toujours été curieuse de la nature humaine depuis que je suis enfant. Peut-être parce qu’elle m’a fait du mal », déclarait-elle au Monde en 2023 pour la sortie de son ouvrage Impossible adieux, pour lequel elle a reçu le Prix Médicis.
À nos confrères, elle se disait avoir été très marquée par la découverte de la répression du soulèvement de Gwangju, un mouvement de protestation pacifique mené par des syndicalistes et des étudiants en mai 1980. À 12 ans, elle tombe par hasard sur un ouvrage caché dans la bibliothèque familiale où elle découvre les images sanglantes des événements. Des images qui la marqueront à vie.
« Depuis lors, j’ai toujours tenté, dit-elle, de me confronter à cette force contradictoire qui pousse les êtres tantôt à se jeter sur une voie ferrée pour sauver un enfant, tantôt à assassiner leurs congénères par milliers. Quel que soit le livre que j’écris, cette violence ressort », expliquait-elle au Monde.
Une autrice « novatrice » salue l’Académie suédoise
En 2016, elle avait reçu le prestigieux Booker Prize pour son livre La Végétarienne, publié en 2007, dans lequel elle raconte l’histoire d’une jeune femme qui décide du jour au lendemain de rejeter toute nourriture animale. Le texte décrit les conséquences violentes de ce refus de manger de la viande. Un livre qui a été adapté au cinéma.
« L’œuvre de Han Kang se caractérise par cette double exposition de la douleur, une correspondance entre le tourment mental et le tourment physique, en lien étroit avec la pensée orientale », a précisé l’Académie suédoise.
L’autrice a « une conscience unique des liens entre le corps et l’âme, les vivants et les morts, et, par son style poétique et expérimental, elle est considérée comme novatrice dans le domaine de la prose contemporaine », a déclaré devant les journalistes le président du comité Nobel Anders Olsson.
Seules 17 lauréates avec Han Kang
Depuis sa création, le Nobel de littérature est dominé par une vision occidentale et masculine : sur un total de 120 lauréats, seules 17 femmes ont obtenu le prix avant Han Kang. Et une minorité d’auteurs récompensés utilisent des langues pratiquées en Asie, en Afrique ou au Moyen-Orient, hors des domaines anglophones, francophone, scandinave, allemand, slave, espagnol ou italien.
Un seul auteur de langue arabe a été distingué - Naguib Mahfouz, un Égyptien, en 1988 - contre 16 auteurs francophones.
Après la littérature, le très attendu prix Nobel de la paix sera décerné vendredi à Oslo, plus que jamais difficile à prédire tant les conflits se multiplient dans le monde. Le Nobel d’économie, octroyé pour la première fois en 1969, fermera le bal lundi 14 octobre.