Fabien Roussel, Jean-Luc Mélenchon, et les leaders de la Nupes en ordre dispersé pour la Fête de « L'Huma »
Les figures de proue de la gauche se sont retrouvés pour la deuxième journée de la traditionnelle Fête de L’Humanité, qui se déroule cette année sur l’ancienne base aérienne 217, à cheval sur les communes de Brétigny-sur-Orge et du Plessis-Pâté, dans l’Essonne, du vendredi 9 septembre au dimanche 11 septembre.
Samedi, en fin d’après-midi sur la plus grande scène de débat de la Fête, l’échange entre les patrons des partis composant la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) a été courtois mais ferme. La cheffe des députés « insoumis », Mathilde Panot, a « fraternellement » confronté Fabien Roussel à ses déclarations de la veille, quand il a prôné une « gauche du travail et pas des allocs » pour parler aux ruraux.
« Nous ne pouvons combattre la droite et l’extrême droite en reprenant leurs mots. L’assurance-chômage et le RSA vont être une grosse bataille de la rentrée », entre autres dans le cadre du projet de loi du gouvernement pour réformer la première, a rappelé Mme Panot, très applaudie. Elle a glissé : « Ce sont des conquêtes sociales que nous devons à notre camp, et notamment aux communistes et à la CGT. »
« C’est par le travail que chacun retrouve sa dignité »Fabien Roussel a aussitôt réagi : « C’est par le travail, le salaire, que chacun retrouve sa dignité et la fierté de partager avec ses enfants ce qu’il a fait » en rentrant le soir. Et il a assuré que son expression contre les « allocs » concernait le long terme : « Je le redis, je souhaite une société où il n’y a plus d’allocations, de primes, mais des salaires » qui permettent de vivre.
« On peut développer une société où il y a du travail sans reprendre les mots de l’adversaire », l’a repris de volée le secrétaire national d’EELV, Julien Bayou. Ce dernier a même avancé une idée inverse, chère aux écologistes, en prônant une « société où l’on peut s’émanciper du travail », par exemple grâce au revenu universel. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a mis en garde, ensuite, dans une allusion transparente à M. Roussel, ceux qui au sein de la Nupes « ont une expression cherchant à faire trébucher le voisin ».
Brouillé pendant plusieurs années avec les communistes, avec pour conséquence la candidature de Fabien Roussel à l’élection présidentielle d’avril dernier, Jean-Luc Mélenchon s’est exprimé à 11 heures sur la scène de l’Agora. Il ne s’était pas rendu à la Fête de L’Humanité depuis six ans.
Jean-Luc Mélenchon de retour « seul face à son public »M. Roussel avait regretté devant les journalistes, vendredi, que Jean-Luc Mélenchon n’ait pas accepté l’invitation au débat de la Nupes, samedi après-midi, avec lui-même, Olivier Faure, Julien Bayou et Mathilde Panot. « Qu’on débatte tous ensemble, ça aurait eu de la gueule… Mais Jean-Luc aime être seul face à son public », a taclé, sur scène, le secrétaire national du PCF. Et d’avertir qu’il « continuera à porter une voix singulière ».
« Je demande qu’on arrête les jérémiades, au lieu de battre sa coulpe, nous avons avancé et marqué des points », a réagi Jean-Luc Mélenchon devant plusieurs centaines de personnes venues l’écouter sur la plus grande scène de débat de l’événement. Répondant à une journaliste de L’Humanité, il a poursuivi :
« Certes, il faut toujours faire plus, mais nous sommes devenus le premier parti des chômeurs, précaires, jeunes de moins de 35 ans, des centres urbains, nous sommes le peuple des humiliés et opprimés. »
Rappelant que la Nupes avait « gagné le premier tour », au coude-à-coude avec le camp présidentiel, l’« insoumis » a confié ses regrets : « Au second tour, la droite a préféré voter blanc ou s’abstenir, laisser passer un facho. Ils ont renoué avec le pire de leur histoire, Hitler plutôt que le Front populaire ; maintenant, c’est Le Pen plutôt que Mélenchon. »
Le « fascisme, tels que les marxistes l’analysent, c’est d’interdire et d’empêcher la lutte des classes » en la faisant dévier dans « le racisme, c’est-à-dire dans la lutte contre les musulmans, contre les immigrés », a-t-il déclaré. Selon lui, la gauche ne peut donc « avancer que dans la bataille contre le racisme et l’islamophobie » et progresser en allant « voir les gens, un par un, en porte-à-porte ».
« C’est énorme, ce qu’on a fait. Vous autres, les communistes, vous devez y penser plus fort que les autres : c’est la victoire de la ligne stratégique décidée ensemble en 2012 et mise en commun en 2017 », a conclu M. Mélenchon, faisant référence aux deux élections présidentielles pour lesquelles le PCF avait soutenu sa candidature.
Présence rare des socialistes et d’EELV« Il est vrai qu’une partie de la population n’a pas suivi la gauche » et il faut « restaurer sa confiance », a réagi le socialiste Olivier Faure. Toutefois, selon lui, une « République du travail » n’est pas incompatible avec « la protection de l’assurance-chômage ».
« Il ne faut pas opposer ceux qui sont dans l’emploi et ceux qui ne le sont pas », a estimé Léa Balage El-Mariky, bras droit de Julien Bayou à Europe Ecologie-Les Verts (EELV). « Nous, les Verts, nous voulons promouvoir autre chose que l’émancipation par le travail salarié », a-t-elle ajouté.
Le but du PCF de Fabien Roussel, « ce n’est pas se différencier, mais on ne veut pas être inclus dans LFI », assurent, dans les travées de la Fête, Roland et Michelle, retraités et militants communistes de l’Essonne. Ils disent néanmoins tenir à la Nupes, qui a permis d’élire « beaucoup de députés de gauche ». « Et pour l’instant ça tient, les partis sont sur la même longueur d’onde et il faut que ça dure. »
Ils auront peut-être l’occasion de s’arrêter aux stands de LFI, d’EELV et du PS, absents ces dernières années. « Je n’ai jamais connu de stand PS à la Fête de L’Humanité », a réagi, tout sourire, Olivier Faure.
Le Monde avec AFP