Emmanuelle Béart : "Le cinéma m'a sauvé la peau"

Si elle était un réalisateur, Emmanuelle Béart serait Raoul Peck, l’auteur d*'I am not your negro* (2016). Si elle était un livre : La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr. Et si elle devenait un paysage "ce serait la plage de Beauvallon (près de Saint-Tropez), avec un mimosa qui sent incroyablement bon et l'odeur de la mer"."Ce métier m'a réconciliée avec moi-même" Contrairement à Romy Schneider qui qualifiait celui d'actrice de "sale métier", Emmanuelle Béart affirme : "Ça m'a sauvé la peau d'être actrice. C'est un métier de corps, c'est un métier de langage où on peut hurler, crier, rire, pleurer." Si l’actrice a débuté sa carrière à 12 ans "par hasard, mais j’ai continué par amour". C’est véritablement à partir de 24-25 ans qu'elle a choisi ce métier. Les rencontres avec Claude Berry, André Téchiné ou Jacques Rivette ont été déterminantes : "J'ai rencontré des êtres absolument magnifiques qui m'ont fait devenir adulte, devenir femme, qui m'ont donné une sensation de respect et d’amour pour moi-même. Ça a été comme une sorte de réconciliation."

Le cinéma comme voyage en terre étrangère

Et même si elle a perdu la tête deux fois. Au moment des Enfants du désordre (1989) où elle une femme droguée qui sortait de taule. "Un film magnifique". Et Lors du film Une femme française : "le sujet de cette femme qui couchait avec un Allemand était tabou. Les réactions ont été violentes, chez les journalistes et dans la rue. Ça a été très très très dur." Mais elle ne regrette rien "Sinon, le cinéma, c'est du plaisir". Elle reconnaît qu’elle a dû être infernale à ses débuts : "Peut-être parce que ça s'est fait par hasard, peut-être parce que j'étais très en colère, peut-être parce que je détestais l'autorité." Mais son envie de tourner reste intacte : "Ce qui m'intéresse et qui m'a toujours passionnée, c'est cette terre étrangère que sont les metteurs en scène. C'est à chaque fois un voyage dans une autre culture, une autre religion. Vous faites votre valise pour aller tourner, mais elle ne sert à rien parce que tout est inconnu et parce que tout est à refaire toujours."

L'engagement, une "deuxième nature"

Malgré les critiques l’actrice revendique son droit à s'engager : "De cette notoriété, on pouvait oser prendre la parole à condition de dominer son sujet, de savoir de quoi on parle et d'être intimement convaincu." De son combat pour les sans-papiers à l'église Saint-Bernard à ses dix ans comme ambassadrice de l'UNICEF, elle assume ses positions : "On a beaucoup contesté le fait que les artistes, les acteurs prennent position [...] Je me souviens de quelqu'un de très important au cinéma qui m'avait dit que je donnais l'impression de n’aimer que les pauvres. C'était terrible mais je ne le regrette pas."

De "Un silence si bruyant" aux César

Un an et demi après la diffusion de son documentaire Un silence si bruyant sur M6, dans lequel elle révélait avoir été victime d'inceste, Emmanuelle Béart évoque l'impact de cette prise de parole : "J'ai une espèce d'instinct de vie dont j'ai eu besoin. Ensuite, il me semblait que prendre la parole était important, et de faire de cette douleur quelque chose, transmettre. Je me disais : si tu prends la parole peut-être que d'autres se diront "si elle l'a vécu, si elle le dit, moi aussi, j'ai le droit de le dire"." Pour les 50 ans des César, elle a choisi de remettre le prix du meilleur documentaire : "J'ai une passion pour les documentaires [...] J'ai fait à peu près le tour du monde avec "Un silence si bruyant". Et je vis avec un documentariste."

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