Dragon Ball Super : Super Hero - critique du retour aux sources
Red Ribon ou la Nostalgie
Dragon Ball Super : Super Hero repose sur un concept assez éculé de Dragon Ball, la nostalgie. Akira Toriyama, le réalisateur Tetsuro Kodama, ainsi que la Toei ont bien compris ce que voulait le public et nous recycle un élément symbolique de Dragon Ball : le Red Ribon. Alors que Goku était sur son chemin initiatique, le Red Ribon cherchait les Dragon Ball pour asseoir leur domination sur le monde. Son Goku les a anéantis, seul. C'est le premier haut fait de Goku, bien avant que le roi démon n'arrive. Puis, on retrouve cette armée avec le Dr Gero, les Cyborgs et Cell, qui font office de passation à Son Gohan, devenant ainsi un grand guerrier saiyan.
Cela aurait pu s'arrêter là, père et fils, ayant traversé à peu près le même chemin initiatique... Mais non, on connait tous la suite avec la quête de pouvoir et de la surenchère. Qu'on aime ou qu'on n'aime pas, Dragon Ball, avec Super, est devenu stratosphérique. D'ailleurs, toute cette suite se concentre sur le duo Son Goku/Végéta, oubliant le reste ou les reléguant en dernière zone (à part pour C17 qui, revenu d'outre-tombe, est oublié ensuite). Le cas de Son Gohan et de Picolo est encore pire. Après l'arc Boo, ils sont juste devenus des faire-valoir à l'histoire, voire des éléments comiques, surtout pour Picolo, la déchéance ultime.
Quand le Red Ribon complote, encore.
À noter que dans l'arc Boo, Gohan est dépeint comme le plus grand guerrier de la Terre, voire de l'univers, après avoir sorti son potentiel intérieur. Ne voulant pas suivre la même quête que son père, il cherche à se trouver une nouvelle voie. Ce qui est intéressant en soi, mais totalement zappé, comme ci une personne ne suivant plus la voie du bushido n'était pas intéressante. C'est ici que le film prend une tournure intrigante en se concentrant sur la relation perdue, de Piccolo et de Gohan ainsi que sur leurs potentiels largement sous-estimés.
Piccolo est un ancien roi démon, devenu dieu, puis maitre de Goku, de Gohan, de Son Goten et de Trunks. Ce n'est pas rien ! Et c'est aussi le cas de Gohan le fils prodige, qui aurait dû être au même niveau que son père. Pendant toute la deuxième partie de Dragon Ball, l'histoire se concentre sur eux, sur leur relation presque filiale, touchante et émouvante, avec de grands moments iconiques. On rappelle que c'est Piccolo qui a quasiment élevé Gohan, Goku n'étant plus là. Pour une fois, un film leur redore le blason en mettant en avant ce duo.
En touchant à cette nostalgie perdue, en revoyant leur complicité, on se rend compte que ces personnages nous ont vraiment manqué et cela fait du bien de les revoir. Mais pas forcément avec cette animation-là...
Je reste figé, en vert et contre tous
RED ANIMATIONCôté animation, on ne comprend pas trop le parti pris graphique du film. Entre 2D, CGI et cel-shading (ombrage de celluloïd en français), c'est un foutoir complet, ce qui nuit totalement au film. On avait déjà peur en voyant le teaser, sur grand écran, c'est encore pire. Les moments dialogués sont affreusement lents et mal animés, il n'y a aucune émotion retenue. C'est plat, si cela n'était pas renforcé par des effets de lumières ou encore des trames et des effets de styles, on se croirait dans une mauvaise animation de jeu vidéo. Le tout devient quelque chose d'informe et très statique. Aux moments dramatiques, cette animation dessert entièrement le propos, car les expressions sont figées et ne rendent pas "vraies", comme on peut le voir au-dessus.
Par contre, au moment des combats, l'animation regorge d'ingéniosité. Même si parfois, les ressorts d'onomatopées et d'effets visuels viennent combler les trous dans la raquette, ici ça marche. Parce que l'effet "jeu vidéo" fonctionne, on se prend au jeu et cela permet de rendre les coups plus crédibles aux yeux des spectateurs. Les boules d'énergie deviennent plus fortes et les chorégraphies plus dantesques, surtout dans le combat final où il y a tellement de choses à regarder que rien ne devient brouillon. L'œil fait le travail nécessaire et ne perd pas une miette de ce déballage de faste et de coups.
Un homme onomatopé un autre
Le choix de l'animation est plutôt audacieux et très casse-gueule au final, car un film ce n'est pas que des combats. D'autant plus dans celui-là, qui a plus de parties dialoguées que de combats. Les scènes de retrouvailles, d'exploration et d'enquête sont sous-exploitées dans l'animation. On reste sur un entre-deux un peu bâtard, entre sublime et vraiment nul. D'ailleurs, la toute dernière scène du film (restez jusqu'à la fin du générique) montre les limites de ce choix, c'est bancal et ça ternit l'image du film. C'est vraiment dommage, surtout pour un film d'animation. Heureusement que la narration prend le dessus de temps en temps.
"Le premier qui rira aura un coup de tête"
Son Gohan et Picolo, le duo prodigeCertains diront que ce film est un long épisode sur la renaissance de Son Gohan, c'est plutôt vrai et plaisant (d'autant que votre serviteur apprécie Dragon Ball pour son humour débile, ses personnages fort et touchant se développant face à l'adversité et seulement en dernier les combats). C'est dans ce sens-là que remettre le duo Son Gohan-Piccolo est un très bon choix scénaristique, car il cristallise tout l'ADN de Dragon Ball en son sein. Ce duo est mythique dans sa représentation, Gohan et Piccolo souffrent, évoluent et se poussent à sauter leur barrière ensemble. Piccolo sera toujours là pour son "fils", c'est d'ailleurs ce qui est montré à travers de nombreux moments de vie quotidienne, qui nous pousse à sourire.
Quand il cherche à redynamiser Gohan, par Pan (la fille de Gohan et Videl), c'est tout aussi hilarant que touchant. On y retrouve cette fameuse nostalgie et cet amour qu'on a pour ces personnages. Puis, quand vient l'avènement de Gohan, mais aussi de Piccolo aussi incroyable soit-il, notre cœur fond et se réjouit en même temps. Ils sont liés à jamais. L'histoire leur rend un sublime hommage et pour cela chapeau. Par contre, c'est vraiment dommage que leur développement revienne encore sur les mêmes ficelles déjà connues. C'est-à-dire, le retour du Red Ribon, des cyborgs et de (attention spoil) Cell.
Gohan, ne ris plus
C'est limite outrageant, le réveil de Gohan ressemble presque trait pour trait à ce qu'il s'est passé quand il était plus jeune : le sacrifice, l'abnégation et la colère. Le film reprend ces codes-là et même les sons qui nous ont fait vibrer étant jeune. C'est mêlé d'une frustration et d'une joie intense qu'on revoie ses moments. On aurait aimé peut-être que ça aille un peu plus loin. Car vraiment tout y est, c'est beau, fort, émouvant et clinquant, mais ça manque de ce petit plus qui pourrait encore tout sublimer. On reste sur des acquis et surtout de faire plaisir au public avant tout.
Pourtant, Dragon Ball Super : Super Hero a tout pour plaire, son humour débile nous replonge totalement dans cet esprit que l'on adore, la relation Picolo/Gohan est émouvante, surtout si on y rajoute Pan. Les autres personnages y sont moins travaillés, certes, mais leur retour apporte aussi son lot de surprise et de bêtises pour notre plus grand bonheur. Les combats sont sublimement animés et travaillés. L'ouverture proposée à la fin du film est aussi très intéressante et permet de tracer une nouvelle voie – qui sera reprise ou non dans l'histoire de Dragon Ball Super –, en tout cas, c'est tout le mal qu'on lui souhaite, afin de permettre à la licence de se renouveler. Ce qui ne sera pas plus mal...