EN IMAGES Manifestation anti-bassines dans les Deux-Sèvres ...

De violents affrontement ont eu lieu ce samedi dans les Deux-Sèvres, sur le chantier de la future bassine de Sainte-Soline. Entre 6.000 et 30.000 personnes, selon les sources, se sont rassemblées pour manifester contre cette retenue d'eau destinée à l'irrigation agricole. Ce samedi soir, le procureur de la République de Niort fait état de 28 gendarmes, sept manifestants et deux journalistes blessés. Parmi eux, deux gendarmes et trois manifestants sont en état d'urgence absolue. Un bilan "provisoire".
L'essentiel :- Le collectif "Bassines non merci", le mouvement des Soulèvements de la Terre et la Confédération paysanne ont organisé une manifestation anti-bassines ce samedi dans les Deux-Sèvres. Une manifestation interdite.
- Selon les organisateurs, 30.000 manifestants se sont rassemblées. Ils étaient environ 6.000 selon la préfecture. 3.200 gendarmes et policiers étaient mobilisés.
- Des affrontements violents ont eu lieu entre forces de l'ordre et manifestants. Quatre véhicules de gendarmerie ont été incendiés.
- Le procureur de la République de Niort fait état de trois manifestants et deux gendarmes blessés en état d'urgence absolue. Par ailleurs 26 gendarmes, quatre manifestants et deux journalistes sont plus légèrement blessés. Ce bilan est "provisoire".
- Onze personnes ont été interpellées et six garde à vue sont toujours en cours.
- Le parquet de Niort a ouvert une enquête du chef d'"organisation de manifestation interdite".
- Elisabeth Borne dénonce un "déferlement de violence intolérable".
- Pourquoi ces mégabassines font-elles autant débat ? Réponse ici .
Les manifestants sont partis ce samedi vers 11h de la commune de Vanzay en direction de la bassine de Sainte-Soline située à environ 6,5 kilomètres de là. Il était prévu d'y former "une chaîne humaine" et de "démanteler les réseaux".
Selon les organisateurs de la manifestation, 30.000 personnes ont répondu à leur appel à protester contre les bassines agricoles dans les Deux-Sèvres. La préfecture des Deux-Sèvres a dénombré, elle, environ 6.000 personnes à Sainte-Soline et indiqué "la présence d'au moins un millier de manifestants violents, entièrement équipés en noir et prêts à en découdre avec les forces de police" .
À l'approche du chantier, de violents affrontements ont rapidement éclaté. Quatre véhicules de gendarmerie ont été incendiés et les manifestants ont fait usage de "de mortiers d'artifices, de chandelles romaines et de cocktails molotov" contre les forces de l'ordre, a indiqué la gendarmerie nationale, qui a riposté avec des gaz lacrymogènes, un canon à eau, des grenades de désencerclement et des tirs de LBD, selon les journalistes de France Bleu Poitou présents sur place.
Pendant environ une heure, les abords de la bassine se sont transformés en scène de guerre, avec de très nombreuses détonations, observée de loin par la plupart des manifestants restés pacifiques. Des manifestants se sont attaqués à l’une des vannes du futur projet de bassine à Sainte-Soline. Ils "ont excavé et désarmé une pompe et une canalisation centrale de la bassine, la mettant définitivement hors d'état de nuire", a affirmé dans un communiqué le collectif "Bassines non merci".
Les assaillants ont ensuite reflué et un calme relatif était revenu dans l'après-midi, la foule ayant reculé. La dispersion a été ordonnée, indiquait alors la préfecture des Deux-Sèvres.
Plusieurs blessés gravesCe samedi soir, le procureur de la République de Niort fait un "bilan provisoire" des blessés. Dans un communiqué, Julien Wattebled indique que "les secours ont pris en charge trois manifestants blessés en urgence absolue, qui ont dû être évacués en urgence vers le centre hospitalier, et quatre en urgence relative". Par ailleurs, "28 gendarmes ont également été blessés : deux en urgence absolue, qui ont eux aussi été évacués vers l'hôpital, et 26 en urgence relative". Enfin, "deux journalistes ont été pris en charge par les secours en urgence relative". Le procureur indique que des "enquêtes sont en cours pour établir les circonstances des faits".
"Le bilan est extrêmement lourd" avait déploré plus tôt Gérald Darmanin lors d'une conférence de presse. Pour l'un des gendarmes gravement blessé, "la question est de savoir s'il pourra remarcher", précise-t-il.
Dans un communiqué, le collectif "Bassines non merci" a dénoncé de son côté des "violences policières sidérantes de brutalité" et évoqué "200 blessés" dont "une quarantaine" ont "des plaies profondes et des éclats, surtout au niveau des jambes et du visage, à cause des grenades de désencerclement et des tirs de LBD". Selon le collectif, le pronostic vital d'un manifestant est engagé. Un point presse est prévu ce dimanche à 10 heures à la salle Jacques Prévert de Melle, indique le communiqué.
Lors de la prise en charge des blessés, les services de secours ont eu "des difficultés" à rejoindre le site, indique la préfecture. Cette situation a valu à la préfète des Deux-Sèvres d'être interpellée par la Ligue des droits de l'Homme, association indépendante qui avait envoyé des observateurs à Sainte-Soline. "Madame la préfète, laissez passer les secours d'urgence ! Nos observateurs ont constaté l'entrave par les forces de l'ordre à l'intervention des secours pour une situation d'urgence absolue", écrit la LDH dans un communiqué de presse. Selon elle, le blessé se trouvait dans une zone "parfaitement calme", où rien ne faisait "obstacle à l'intervention du Samu", et il aurait dû être pris en charge "sans délai" par les secours.
Des armes saisies, 11 interpellationsD'après le procureur de la République de Niort, "aucune interpellation n'a pu être réalisée durant la manifestation", "compte-tenu de l'extrême violence des affrontements". En revanche, 11 personnes ont été interpellées pour "des infractions de droit commun" depuis "le début des opérations de contrôle d'identité". Lors de ces contrôles préventifs, de nombreuses armes ont été saisies : "62 couteaux, 67 boules de pétanque, 7 artifices, 6 bidons d’essence, 12 pierres et parpaings, 13 haches/machettes, 5 matraques ou battes de baseball, 20 aérosols/bonbonnes de gaz, 69 équipements de protection et 95 outils divers".
Six gardes à vue sont toujours en cours ce samedi soir. Le parquet de Niort annonce avoir ouvert une enquête du chef d'"organisation de manifestation interdite" pour "identifier les personnes responsables de ce mouvement particulièrement violent".
Le ministre de l'Intérieur a précisé que "les affrontements ont commencé dès vendredi matin". En tout, "les gendarmes ont lancé plus de 4.000 grenades au total (de désencerclement et gaz lacrymogène) et affronté une extrême violence." Gérald Darmanin assure qu'"il n'y aura pas de ZAD qui va s'installer à Sainte-Soline", a martelé le ministre. "Ce ne sont pas les forces du désordre qui vont l'emporter. Ce n'est pas l'extrême gauche qui va l'emporter dans la République française".
Ce samedi soir, la Première ministre Élisabeth Borne dénonce un "déferlement de violence intolérable" et l'"irresponsabilité" des "discours radicaux qui encouragent ces agissements". Elle apporte enfin son "soutien aux gendarmes et pompiers" qui assurent "l'ordre républicain".
"Ce déchaînement de violence est absolument inexcusable", a déclaré le ministre de l'Intérieur, l'attribuant "aux black bloc, aux gens de l'extrême gauche, aux gens de l'ultra-gauche".
"Les scènes de violences ont été choquantes et consternantes" dénonce de son côté Coralie Denoues, la présidente du département des Deux-Sèvres, sur franceinfo. "Je rappelle que cette manifestation avait été interdite par la préfecture. Les forces de l'ordre ont su tenir la sécurité", se félicite l'élue divers droite.
La présidente du département accuse "des partis politiques et des syndicats" de cautionner "ces violences". "J'ai vu cette après-midi des partis représentés par des drapeaux dans la manifestation, ces personnes ont regardé sans réagir un camion de gendarmerie en train de brûler."
Si la manifestation de ce samedi a été interdite, c'est notamment parce qu'il y a cinq mois, au même endroit, le rassemblement avait dégénéré et des affrontements s'étaient produits entre forces de l'ordre et militants écologistes. "Des casseurs d'ultra-gauche s'en étaient pris aux forces de l'ordre, avec des jets de boules de pétanque", a expliqué Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique interrogé sur franceinfo.
Ce samedi, le ministre de l'Intérieur a mobilisé 3.200 policiers et gendarmes, deux fois plus qu'en octobre dernier.
"L'eau est un bien commun"Le collectif "Bassines non merci", le mouvement écologiste des Soulèvements de la Terre et la Confédération paysanne dénoncent depuis plusieurs années la construction de bassines agricoles dans la région. Alors que les nappes phréatiques et les cours d'eau de Nouvelle-Aquitaine sont, pour certains, dans une situation catastrophique à cause de la sécheresse , les anti-bassines s'inquiètent de l'impact de ces ouvrages dédiés à l'irrigation agricole.
Pour le porte-parole du collectif "Bassines non merci" , les agriculteurs qui défendent la construction de ces réserves "privatisent une eau qui appartient à tout le monde, c'est une logique d''après moi, le désert', la loi sur l'eau priorise l'eau potable, pas celle pour l'irrigation du maïs", affirme Julien Le Guet, qui a été interdit de paraître à Sainte-Soline ce week-end des 25 et 26 mars.
Les bassines sont des retenues d'eau utilisées par les agriculteurs pour irriguer leurs cultures en période de sécheresse. Le chantier de Sainte-Soline prévoit la construction de 16 bassines, d'une capacité d'environ six millions de mètres cubes. Ce projet, soutenu par l'État, est porté par une coopérative de 450 agriculteurs.
Le président de cette coopérative, Thierry Boudaud, a lancé un appel au calme ce vendredi. Interrogé sur le sujet sur France Inter ce samedi, le ministre de l'Agriculture a affirmé que le projet de ces réservoirs s'est fait "sur le terrain, avec les associations locales, avec les agriculteurs locaux, avec les services de l'État, avec les services scientifiques sur les questions d'eau". Marc Fesneau assure que "le process n'a en rien été imposé par le haut", et juge donc "exemplaire sa démarche".
À lire aussi
Le 01/11/2022 à 19:47
Mégabassines : pourquoi ces réservoirs d’eau agricoles font-ils autant débat ?