REPORTAGE. Coupe de France : "C'est l'Auvergne qui accueille ...
"On va remplir un stade de 15 000 personnes en sachant que la commune compte 3 500 habitants." Lionel Vaillant, l'entraîneur de l'équipe du FC Espaly ne boude pas son plaisir. L'épopée est historique, le match est de toutes les discussions, les 15 000 places pour la rencontre ont été vendues en moins d'une heure... Pensionnaire de National 3, le FC Espaly, l'un des quatre petits poucets des 16es de finale de la Coupe de France, s'apprête à affronter le Paris Saint-Germain, mercredi 15 janvier. Faire partie des 32 dernières équipes qualifiées a mis en ébullition cette commune de Haute-Loire, située à près de deux heures de route de Clermont, lieu du match.
En franchissant le rond-point qui sépare Espaly-Saint-Marcel de la grande ville voisine du Puy-en-Velay, située à deux kilomètres, le regard est attiré par la grande affiche "Fiers du stade de Viouzou, ses bénévoles, ses joueurs", au-dessus des logos du FC Espaly et du Paris Saint-Germain. Le long de l’avenue de la mairie, la route départementale qui traverse le village, les commerces et les bâtiments se sont parés de ballons rouges et noirs aux couleurs du club.
Pour cette commune de 3 500 habitants située dans l’agglomération du Puy-en-Velay, c'est une première à ce niveau de la Coupe de France. En battant Dijon (National 1) aux tirs au but au tour précédent (0-0, 5-4), le club a conquis une première victoire face à un adversaire de niveau supérieur.
Depuis ce week-end de fin décembre, Espaly-Saint-Marcel vit et vibre autour de son équipe. "On ne parle que de ça, c’est le principal sujet de conversation depuis quelques semaines", confie Christophe, salarié du Bar du Rocher, le seul bar du village, lui aussi paré aux couleurs du club. À la veille du match, une dizaine d’habitués est réunie autour du comptoir, notamment pour saluer les joueurs avant leur départ à Clermont. C’est ici que le groupe avait vécu, deux jours après son exploit, le tirage au sort qui l’a placé sur le chemin du PSG. "Normalement on est fermé le dimanche, mais quand on a su que c’était diffusé, on a ouvert pour regarder le tirage", rembobine la gérante, Alexandra Tendille, alors que des "Espaly est magique" enjoués s'élèvent dans son dos.
L'épopée de la "Espaly family" est suivie par toute la commune. "C'est ma ville et mon club de cœur qui sont projetés dans la lumière", savoure Eric, bénévole et impliqué présent au club depuis 1970. "On ne revivra sans doute plus jamais ça", abonde Steven, supporter qui n'a "jamais quitté Espaly", son "patelin".
L'engouement est aussi porté par l’identité du futur adversaire, leader de Ligue 1 à l'envergure européenne. "La marque PSG porte très vite et très loin. L’emballement médiatique, des supporters, des bénévoles et aussi des joueurs, est très fort", remarque le président du club, Christian Perbet. Chez les joueurs, il va du gardien de but Jordan Etienne, fan du PSG, aux enfants de l’école de foot. "Deux joueurs qui étaient titulaires contre Dijon coachent avec moi. Forcément, les enfants qui savent que Mouad [Aït Boulaalam] et Lucas [Russo] vont jouer contre le PSG sont super excités, confie Yoann Vigouroux, éducateur U12-U13 au sein du club. Il y a une effervescence folle. On a fait des entraînements pendant les vacances : ils ne parlaient que de ça."
"Après le tirage, tout le monde a été fou de joie. Recevoir un des plus grands clubs de France, et même européens… On va jouer contre des pros, des internationaux, c’est la fête du village d’Espaly", apprécie de son côté Eric, grand sourire aux lèvres. Il ira glisser un dernier encouragement aux joueurs, restés quelques minutes au bar le temps de saluer leurs supporters, prendre la pose, et admirer les articles de journaux qui leur sont consacrés exposés dans la salle, avant de prendre la route de Clermont, accompagnés d'un concert de klaxons.
À quelques centaines de mètres du Bar du Rocher, le stade du Viouzou baigne dans le calme et la lumière froide du soleil d'hiver, mais sans ses buts aux filets rouges, déplacés jusqu'à Clermont. Car les Espaviots n'évolueront pas, cette fois, dans leur étonnante enceinte, installée dans une carrière. C'est le stade Marcel-Michelin de Clermont, antre de l’ASM Clermont Auvergne, qui les accueille pour l'occasion. "Il fallait trouver un écrin à la hauteur. On est Auvergnats, et on a pris le plus beau stade d’Auvergne, qui est le Marcel-Michelin", assure Christian Perbet.
"Au-delà d’un match de foot, c’est l’Auvergne qui accueille Paris."
Christian Perbet, président du FC Espalyfranceinfo: sport
Mises en vente le vendredi 27 décembre, les 15 000 places (en configuration football) ont été écoulées en moins d’une heure, autre signe, s’il en fallait, de l’engouement autour de l’équipe. "Ça dépasse notre village, ça va toucher tout le bassin du Puy, le département, voire la région Auvergne Rhône-Alpes", assure Lionel Vaillant, l'entraîneur du club.
"Même nous, les joueurs, on s’était dit qu’il y aurait le temps de réserver des places pour nos proches, mais en fait il n’y en a presque pas eu", s’amuse Kevis Gjeci, auteur de l’égalisation face à Dijon, qui porte les couleurs d’Espaly depuis huit ans. "On ressent le soutien et on sait que ça va être chaud." Dix cars de cinquante places vont faire le déplacement d’Espaly-Saint-Marcel à Clermont, tandis que 1 500 places au total ont été réservées pour le club, présent en nombre.
Au village, des projections de la rencontre sont organisées pour ceux qui ne pourront pas faire le déplacement, notamment au Bar du Rocher. "On attend du monde. On a eu beaucoup d'appels pour savoir si on serait ouvert, si on diffuserait le match", raconte Christophe. À Clermont comme à Espaly, la fête promet d'être belle, en rêvant, peut-être, d'un nouvel exploit.