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En passant de 5 à 11 membres, les BRICS peuvent-ils devenir une ...

En passant de 5 à 11 membres les BRICS peuventils devenir une
Réunis à Johannesburg, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ont acté l'intégration de 6 nouveau pays (Argentine, Egypte, Ethiopie, Arabie Saoudite et Émirats arabes unis) en janvier. Ces onze pays pèsent ensemble près de 30% du

Réunis à Johannesburg, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ont acté l'intégration de 6 nouveau pays (Argentine, Egypte, Ethiopie, Arabie Saoudite et Émirats arabes unis) en janvier. Ces onze pays pèsent ensemble près de 30% du PIB mondial.

L'union fait la force. En 1990, le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud, considérés à l'époque comme un groupement de pays en voie de développement, représentaient 5% du PIB mondial. En 2011, ils ont formé une alliance, les BRICS, pour peser sur l'échiquier mondial. Aujourd'hui, ils pèsent 26%, dont 18% pour la Chine. Et cette montée en puissance va se poursuivre.

Réunis en sommet à Johannesburg, ces cinq pays ont décidé d'accueillir six nouveaux membres: l'Argentine, l'Égypte, l'Éthiopie, l'Arabie Saoudite, l'Iran et les Émirats arabes unis. Les critères qui ont présidé aux choix des entrants n'ont pas été divulgués.

"L'adhésion prendra effet à compter du 1er janvier 2024", a déclaré Matamela Cyril Ramaphosa, président d'Afrique du Sud, lors d'une conférence de presse conjointe des dirigeants des cinq nations qui composent actuellement le bloc, se félicitant que "les BRICS entament un nouveau chapitre".
Des entrants avec des atouts économiques variés

À 11, les BRICS représenteront 29% du PIB mondial, trois points de plus seulement qu'à 5. Il faut dire que les nouveaux venus ne sont pas des mastodontes sur la scène économique mondiale. À l'exception de l'Afrique du Sud, aucun des membres originels des BRICS n'est bousculé par les nouveaux entrants. Le mieux classé, l'Arabie saoudite se place 5ème sur 11, mais avec un PIB quasiment deux fois inférieur à celui du 4ème, le Brésil.

Avec l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l'Iran, les BRICS intègrent surtout 3 pays aux ressources pétrolières et gazières particulièrement riches et convoitées.

En jetant un oeil au PIB par habitant, on s'aperçoit par ailleurs que les BRICS s'ouvrent à de nouveaux profils. Avec plus de 40.000 dollars par habitant, les Émirats arabes unis possèdent une richesse par tête qui manquait au groupe. Sur les 11 "BRICS+", les trois premiers en termes de PIB par habitant sont des nouveaux arrivants.

À la vue des ces graphiques, on peut en revanche s'interroger sur la pertinence d'intégrer l'Éthiopie. Ce grand pays de la corne de l'Afrique a été durant la décennie 2010 l'une des économies les plus dynamiques du monde. Mais sa croissance a été enrayée par la pandémie de Covid-19, les calamités climatiques, le conflit dans la région du Tigré (nord) et la guerre en Ukraine. Et le pays reste parmi les moins développés du monde selon l'indice de développement humain du PNUD.

Une population plus dynamique à 11 qu'à 5

Mais l'Éthiopie a d'autres atouts, à commencer par sa démographie. Deuxième pays le plus peuplé d'Afrique avec 123 millions d'habitants, sa population augmente toujours à un rythme annuel supérieur à 2%. Ce qui n'était le cas d'aucun des BRICS fondateurs. Dernièrement, les 5 membres originels avaient des démographies de moins en moins dynamiques. Une tendance que les 6 nouveaux membres vont permettre d'inverser.

Ensemble, ces 11 pays représentent 46% de la population mondiale, soit un marché et des débouchés uniques au monde. À condition que ces pays puissent surmonter leurs stratégies individuelles. Car contrairement à d'autres alliances comme l'Union européenne ou le Mercosur, il n'y a pas d'accord de libre-échanges ou de réductions des barrières douanières entre les pays membres des BRICS.

Réduire la puissance occidentale

On le voit, l'intérêt économique de cet élargissement est limité. Mais en termes politiques, la donne pourrait changer. Ce nouveau "club" vise d'abord à offrir une vision alternative mondiale sur le plan politique et sociétale.

"L'objectif des BRICS est clairement de créer un groupe puissant sur la scène mondial pour compenser des organismes internationaux comme l'ONU, le G7, voire le G20. C'est la Chine qui pousse à élargir avec une stratégie plus politique qu'économique. Le but est de faire un contre-poids à l'ordre mondial", explique à BFM Business Laurence Daziano, enseignante à Sciences Po.

Pour cette experte, si le choix avait été purement économique, des pays comme l'Argentine, l'Iran, l'Éthiopie ou même l'Égypte n'aurait pas été retenus. En difficulté financière, fortement endettés ou sous le coup de sanctions internationales selon les cas, ils offrent aux BRICS une implantation régionale dans des régions stratégiques comme le Maghreb pour l'Égypte ou auprès des pays hispanophones pour l'Argentine. L'Éthiopie, en pleine reconstruction, a de lourds besoins financiers qui créent une forte dépendance à la Chine, son principal créancier.

"À terme, les BRICS pourraient devenir un forum politique pour porter une autre vision du monde et offrir une alternative aux valeurs américaines ou européennes", estime Laurence Daziano.
Une volonté de dédollarisation?

Cet objectif pourrait-il aller jusqu'à tenter de détrôner le dollar dans les échanges internationaux?

"60% des échanges mondiaux se font en dollars. Les BRICS sont loin de pouvoir créer une monnaie commune et encore moins d'adopter le yuan. Quant à lancer une cryptomonnaie commune, ce serait une annonce symbolique, pas plus", estime Laurence Daziano.

L'élargissement a néanmoins fait réagir Washington qui affirme ne pas voir dans les BRICS de futurs "rivaux géopolitiques" et dit sa volonté de maintenir de "solides relations" avec le Brésil, l'Inde et l'Afrique du Sud.

Mais ces trois pays pourraient se trouver en infériorité. Le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, a d'ores et déjà affirmé que le bloc continuera à gagner du terrain pour devenir "la force motrice d'un nouvel ordre international". Une quarantaine de pays ont demandé leur adhésion ou manifesté leur intérêt pour rejoindre ce club créé à cinq et qui passera à 11 en janvier 2024.

Qui seront les prochains pays à y être admis? La réponse dans un an lors du prochain sommet des BRICS qui devait se tenir au Brésil. Il aura finalement lieu en Russie, à Kazan, afin de permettre à Vladimir Poutine d'y assister physiquement.

Clément Lesaffre et Pascal Samama

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