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Bernard Montiel, de «Vidéo Gag» à l’oreille d’Emmanuel Macron

Bernard Montiel de Vidéo Gag à loreille dEmmanuel Macron
Prisonnier de sa caricature d’animateur people, Bernard Montiel cache sa relation à des personnalités politiques de premier plan, dont le co

16 octobre 2019, 10h23. Une voix féminine, d'une politesse exquise, dans le combiné : « Je vous passe le souverain! » Faut-il qu'il le tienne en haute estime pour que le prince Albert II de Monaco, qui a rang de chef d'Etat et se fait rare dans les médias, accepte de prendre de son temps pour parler de Bernard Montiel. « Un ami », dit-il d'emblée, « quelqu'un qui gagne à être connu ». Il apprécie « son esprit malicieux, son humour : il aime faire des blagues. Il a un carnet d'adresses tellement extraordinaire et toujours des histoires croustillantes à raconter ». Il se souvient de fort joyeuses soirées dans la maison de l'animateur avec vue sur la dune du Pilat, dans le bassin d'Arcachon. Le prince achève : « J'aimerais le voir plus souvent. Quelquefois, j'ai besoin de rire un peu ».

«Pardon, mais votre com' est à chier !»

Rarement personnalité publique aura eu une image si erronée. De ce grand pudique, jaloux de sa vie privée, les Français savent peu de choses, sinon qu'il a animé dans les années 1980 des émissions de divertissement cultes et autres bêtisiers à forte audience : « La Une est à vous » ; « Ordinacoeur » ; « Une famille en or » ; « Surprise sur prise » ; et surtout « Vidéo Gag » ; dont il avait soufflé le concept à Étienne Mougeotte, grand patron de TF1, mais qu'il ne voulait pas présenter. « Ça a tout de suite cartonné. »

Ça l'a piégé, enfermé dans la caricature de l'amuseur public, du mondain de service, « du bouffon » comme il dit. « Les Inconnus » s'étaient délecté à le croquer, dans un sketch, en animateur demeuré. Ça l'a longtemps rendu malheureux. « Je suis à un âge où on s'en fout un peu », relativise cet éternel jeune homme, qui a ravalé de longue date sa soif de reconnaissance. Qui songerait, avec sa veste en cuir cintrée, qu'il a 62 ans ?

Les fidèles d' Alain Juppé font partie de ceux qui en parlent le mieux. À la fin des années 1990, l'ancien Premier ministre lui avait, très sérieusement, proposé de diriger sa communication à Bordeaux, ville que Montiel, natif du Maroc, a rejointe enfant. Lors d'un dîner avec le couple Juppé, cette grande gueule avait balancé cash : « Pardon de vous le dire, mais votre com' est à chier! » Réplique, piquée, du pince-sans-rire Alain Juppé, devant la tablée catastrophée : « Merci, c'est gentil… Vous qui êtes si fort, trouvez-moi donc une idée géniale d'ici demain! » C'est ainsi qu'est née la fête du vin, où Montiel, qui a toujours l'accent du Sud-Ouest, a fait venir la crème des VIP. « Il a beaucoup aidé Alain dans le rayonnement de la ville sur l'événementiel. Il l'avait un peu nommé ambassadeur. C'est un entremetteur de talent, un type qui n'a jamais eu le melon. Ne vous fiez pas aux apparences », plaide un juppéiste.

«Emmanuel, viens voir, c'est Bernard Montiel !»
Depuis leur rencontre, Brigitte Macron et Bernard Montiel ne se quittent plus. Getty Images/Jean Catuffe
Depuis leur rencontre, Brigitte Macron et Bernard Montiel ne se quittent plus. Getty Images/Jean Catuffe

On le voit comme l'ami des stars et des têtes couronnées. Il en joue, mais ça lui pèse. Cet homme de réseaux, qui livre ses conseils à des grands patrons, dirigeants de médias ou simples badauds, garde un carnet d'adresses colossal de l'époque où, employé du groupe hôtelier Accor, il convoyait des vedettes d'un bout à l'autre de la planète. Il fut l'un des rares invités au mariage de Laura Smet, est pote avec Elsa Zylberstein, Claudia Cardinale et Alain Delon … qui a fait un jour cette blague potache au téléphone à sa mère : « Bonjour, je suis le maître d'hôtel de votre fils! »

Carla Bruni, cet été, l'a convié à son concert du Lavandou, avec Nicolas Sarkozy. Il avait aussi accueilli Valérie Trierweiler au Pilat quand, cabossée par sa rupture avec François Hollande, elle s'apprêtait à publier son best-seller « Merci pour ce moment ». L'ancien président a même cru, un temps, que Montiel l'avait aidée à l'écrire…

C'est dire si les conseillers de l'Elysée, plus habitués à le voir dans les gazettes people, se sont pincé le nez en le croisant dans les couloirs du Palais. Longtemps, ils l'ont regardé de haut. Lui se marre : « La tête des gens! Monsieur Vidéo Gag! » Rares sont ceux qui le savent, mais il cultive un lien d'amitié avec les Macron. Le président et son épouse, qui aiment la transgression, se moquent comme d'une guigne du qu'en-dira-t-on. Ils ont fait sa connaissance lors d'un concert à Bercy. Brigitte Macron, ce soir-là, fonce sur lui : « Vous êtes encore plus beau en vrai! Emmanuel, viens voir, c'est Bernard Montiel! » Il l'avoue, il ignore alors qui est ce jeune ministre fraîchement nommé. Macron le toise en riant : « Je suis très jaloux, ma femme vous adore ». Avec la future first lady, ils ne se sont plus quittés. Quand elle a découvert leur lien d'amitié un jour dans « C à vous », Catherine Deneuve s'est esclaffée. Ça l'a blessé : « Mépris de classe. »

«Bernard, c'est un décodeur de la société»

Ce que les Macron apprécient chez lui? Les pieds bien plantés dans la glaise, il dit les choses franco au président quand il « déconne ». Lui qui compte dans sa famille des sympathisants Gilets jaunes fait remonter les « échos de la rue ». Au pic de la crise, il appelait la première dame : « Ton mari, on ne comprend rien à ce qu'il dit! » Et elle de répondre : « Il est à côté de moi, je te le passe. »

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« Je me suis laissé dire qu'il charrie le président sur ses sorties de route, encouragé par Madame », glisse Charles Villeneuve, ancien de TF1 et vice-président du groupe Valmonde (propriétaire de « Valeurs actuelles »), qui le connaît bien. « Bernard, c'est le baromètre de la douleur de la population, un décodeur de la société. C'est un altruiste. Il aime les gens. Il n'est pas populaire par hasard, son empathie n'est pas feinte », décrypte son grand copain Ramzi Khiroun, bras droit d'Arnaud Lagardère.

Il n'a pas perdu de vue qu'il venait d'un milieu modeste. Un père cheminot, une mère sans emploi, devenue lingère pour s'émanciper. « Je ne suis pas allé au restaurant avant l'âge de 18 ans. » Il ne le dit pas, mais son arrivée en France fut brutale. « Il a beaucoup souffert du rejet des gens, alors qu'il n'était qu'un enfant », confie sa grande amie, la réalisatrice Yamina Benguigui. Après ses études de droit, il est même brièvement huissier de justice. « C'est là que j'ai été confronté à la vraie misère, plus que la mienne. »

Le coup de fil quotidien avec la première dame
Bernard Montiel et Johnny Hallyday lors du bal des Caves du Roy au Palace à Paris le 14 mars 1995. Getty Images/William STEVENS
Bernard Montiel et Johnny Hallyday lors du bal des Caves du Roy au Palace à Paris le 14 mars 1995. Getty Images/William STEVENS

Le romancier et dramaturge Eric-Emmanuel Schmitt, son autre ami inséparable, raconte lui aussi ses immenses complexes. « Il ne joue ni les cultivés ni les snobs. Quoique évoluant dans des milieux aisés, il se souvient de ne pas venir de là et, même parmi les princes et les dirigeants, il lancera une réplique de Gavroche », nous écrit-il. Le journaliste Charles Villeneuve nuance en souriant cette image de Petit chose : « Il habite dans les beaux quartiers de Paris et ne se déplace qu'avec sa Porsche! » Il en fait même collection.

Avec Brigitte Macron, ils s'appellent « une fois par jour, parfois deux », assure un proche. Ils sortent déjeuner dans des bars à vin - un verre de blanc avec glaçons pour elle, version piscine, un verre ou deux de rosé pour lui -, ou voir un film (« Soeurs d'armes » de Caroline Fourest, récemment). Ensemble, ils se marrent comme deux gosses. Devant lui, elle imite volontiers l'accent ch'ti. Emmanuel Macron approuve, soucieux que son épouse ne souffre pas de cette vie à l'Elysée.

C'est Montiel, à l'origine, qui avait organisé un rendez-vous pour la mettre en relation avec la papesse du people, « Mimi » Marchand, qu'il adore - « un personnage à la Audiard » dit-il -, avant que le milliardaire Xavier Niel ne le devance, à une heure près. Parfois, le week-end, il a le président en ligne depuis la Lanterne, à Versailles, pour débriefer l'actualité. Jamais il ne trahit le secret de leurs échanges, ni ne cherche à se faire passer pour une éminence grise. « Je ne suis qu'un grain de sable », répète-t-il. Un capteur parmi tant d'autres pour ce président inondé de conseils sur sa messagerie Telegram. « C'est un garçon qui a le sens de l'amitié absolue. Il est frappé au coin du bon sens. C'est tout sauf un courtisan. Il n'attend rien pour lui », confie Michèle Marchand.

«On le prend pour un con, mais c'est un érudit»

Avec les Macron, il partage l'amour de la littérature et une solide culture, qui ne manquera pas de surprendre ceux qui le connaissent d'abord comme chroniqueur de Cyril Hanouna. La chair est faible : la télévision, que ce fou de cinéma voit comme « un art mineur », lui offre une vie confortable. Il s'amuse de cette double casquette, lettré et popu. Lorsqu'il a écrit les paroles du générique de la série « Sous le soleil », dans laquelle il a campé de petits rôles, il s'est bien gardé de dire qu'il s'était inspiré de poètes surréalistes espagnols.

« Il est fin, cultivé, drôle. Le décalage est très important entre son image et la réalité », s'en étonne le ministre de la Culture, Franck Riester. Cet été, Montiel lui a livré quelques conseils et ouvert les portes du festival de Ramatuelle (Var), le présentant à Gérard Depardieu qui l'a salué d'un tonitruant : « T'es ministre, toi? T'es jeune! » « Bernard, on le prend pour un con, mais c'est un érudit », résume un vieil ami.

Bien dissimulée sous ses airs fantasques, il y a chez lui une sourde mélancolie. Il aurait rêvé d'une autre vie, bien qu'il ne renie pas celle-ci. « En France, on finit toujours dans une case », regrette Yamina Benguigui. Un proche rapporte cette anecdote : « Un soir, les Macron l'ont appelé pour lui proposer de devenir leur communicant. Pour blaguer, bien sûr. Il n'a pas pu s'empêcher de répondre : Monsieur Vidéo Gag à l'Elysée, vous êtes sérieux ? »

Depuis le temps qu'il roule sa bosse dans ce miroir aux alouettes qu'est la télévision, il est passé expert en autodérision. Mais il croit encore dans le pouvoir de la politique de changer la vie. Et en Emmanuel Macron. Chez lui, il a affiché, parmi ses clichés personnels, la photo officielle du chef de l'Etat, en petit format dédicacé. De ce président si critiqué, il répète à qui veut l'entendre : « Il faut lui donner le temps. »

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