En Autriche, c'est à tribord qu'ils votent le plus fort !
Ce dimanche 29 septembre, les regards européens étaient tournés vers l’Autriche où les électeurs de plus de 16 ans étaient appelés à renouveler les 183 députés du Conseil national, ou Nationalrat. Et une chose est sûre, les Autrichiens plébiscitent la droite !
L’extrême-droite se rattrape et prend le large
À l’issue du seul tour des élections législatives, c’est le parti d’extrême-droite Liberté pour l’Autriche (FPÖ) qui mène la course en tête avec 28,8% des voix et 56 candidats élus. C’est près de 13% de plus par rapport au dernier scrutin de 2019 qui s’était néanmoins tenu après le scandale de l’”Ibiza-gate”, éclaboussant les responsables du FPÖ. Leur résultat aujourd’hui n’est finalement qu’un rattrapage de 2017, la formation avait obtenu 51 sièges.
Par ailleurs, l’écart est moins grand que prévu avec les conservateurs de l’ÖVP du chancelier sortant Karl Nehammer, qui ne parviennent pas à rattraper l’écart avec 26,3% des suffrages et 52 strapontins acquis à leur cause. Leur score est néanmoins en nette baisse par rapport à 2019 (-11,2), qui avait vu une grande partie des électeurs d’extrême-droite se rallier à l’ÖVP. En revanche, pour la première fois de leur histoire, les sociaux-démocrates du SPÖ, malgré un résultat stable, terminent à la troisième place d’une élection législative avec 21% des voix et 41 sièges. Une défaite qui ne fait que confirmer la tendance au fil des scrutins.
Les libéraux devancent les écologistes
En deuxième partie de tableau, les Verts pâtissent de leur participation au gouvernement et voient leur score divisé par 2 (6% des voix et 16 sièges contre 26 précédemment), alors que les libéraux de NEOS se stabilisent autour des 8% des voix et s’assurent 18 représentants.
À noter que le parti communiste autrichien (KPÖ) ne confirme pas sa surprenante percée dans le Land de Salzbourg lors de l’élection régionale l’an dernier, où il avait recueilli 11,6% des voix, contre 0,6% lors du précédent scrutin ! Au niveau fédéral ce dimanche, seuls 2,4% des électeurs lui ont accordé leur bulletin, ce qui ne lui autorise pas de représentation parlementaire malgré une nette augmentation électorale (+1,7%). De plus, le Parti de la bière (Bier Partei), parti satirique avec un programme aussi contestataire que contestable, accordant un rôle central et sain à la bière, recueille quant à leur 2% des voix.
Les espoirs déçus de la droite conservatrice
À l’issue des élections de 2019, le très populaire chancelier Sebastian Kurz avait nettement amélioré le score de son parti et monté une alliance avec les Verts. Mais en mai 2021, un scandale frappe l’Autriche : Sebastian Kurz est accusé d’avoir favorisé un proche pour l’accession à la tête d’une entreprise publique, ainsi que d’avoir détourné des fonds publics pour acheter des sondages manipulés en faveur de son camp entre 2016 et 2018 publiés dans un média proche du pouvoir.
Déchu, le chancelier doit céder sa place à son ministre des Affaires étrangères Alexander Schallenberg, qui cèdera lui-même son siège au ministre de l’intérieur Karl Nehammer fin 2021. C’est lui qui sera le premier chef d’exécutif occidental à visiter le président russe après le début de la Guerre contre l’Ukraine, en avril 2022 pour tenter une médiation - en vain.
La coalition bleue-verte n’a pas été de tout repos, en atteste le scandale Leonore Gewessler. En effet, la ministre de l’environnement a engagé son gouvernement en votant en faveur de la “loi européenne” sur la restauration de la nature. Agissant en son âme et conscience d’écologiste convaincue, elle a néanmoins agi contre l’avis de son propre gouvernement. Le parti ÖVP a alors porté plainte pour abus de pouvoir, et Vienne a engagé un recours en annulation auprès de la Cour de justice de l’Union euroépenne. Affaire à suivre et ce, dans un contexte écologique tendu : les militants de Letzte Generation ont annoncé abandonner plusieurs de leurs modalités de revendications et de manifestations, dénonçant le partis pris en faveur des énergies fossiles du gouvernement de coalition.
Vers un gouvernement autrichien d’extrême-droite
Du rififi dans la coalition qui n’a pas échappé aux électeurs, et qui explique probablement en partie la lourde défaite lors des élections européennes de juin dernier : le parti d’extrême-droite FPÖ avait recueilli un quart des suffrages (+8,2% par rapport à 2019), devançant les conservateurs de l’ÖVP qui ont perdu 10% en cinq ans. Les sociaux-démocrates, avec 23% des voix étaient restés stables, avec un score deux fois plus élevé que celui des écologistes.
Le sulfureux patron du FPÖ, Herbert Kickl, est depuis dimanche le favori pour devenir le prochain chancelier autrichien. Dans la guerre entre l’Ukraine et la Russie, il renvoie dos-à-dos Moscou et l’OTAN, son parti ayant boycotté l’intervention de Volodymyr Zelensky devant le Parlement. Détracteur de la “dictature du Covid”, pourfendeur de l’immigration, il a rejoint les rangs des russophiles Patriotes pour l’Europe, le groupe parlementaire européen fondé par le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, et présidé par l’ambitieux français Jordan Bardella. De quoi promettre des négociations gouvernementales tempétueuses pour un programme qui virera assurément à droite !