Etats-Unis : Antony Blinken, un ami de la France au poste de secrétaire d'Etat américain
Pas question de perdre de temps, malgré la transition bloquée par le camp Trump. Joe Biden, qui prêtera serment le 20 janvier en tant que président des Etats-Unis, a annoncé ce lundi les têtes d'affiche de son équipe chargée de la diplomatie et de la sécurité nationale. Pour le poste de secrétaire d'Etat, le démocrate a choisi le diplomate chevronné Antony Blinken.
Les deux hommes sont proches depuis plus de 20 ans. C'est Antony Blinken, souvent décrit comme son alter ego, qui a conseillé Joe Biden sur les questions de politique étrangère pendant la campagne présidentielle. Ce confident de 58 ans a travaillé pour l'administration de Bill Clinton avant de suivre Biden à la commission des Affaires étrangères du Sénat, puis à la Maison Blanche, quand ce dernier est devenu vice-président en 2008.
Il a ensuite gravi les échelons jusqu'à devenir vice-conseiller à la Sécurité nationale de Barack Obama – il est présent sur la célèbre photo de la salle de crise de la Maison Blanche, en 2011, lors du raid qui a mené à l'élimination d'Oussama Ben Laden – puis numéro 2 du département d'Etat , aux côtés de John Kerry, francophone comme lui.
La nouvelle de sa nomination devrait d'ailleurs faire plaisir au Quai d'Orsay. Enfant, Antony Blinken a vécu en France, à Paris, à partir des années 1970, lorsque sa mère Judith s'est installée avec son beau-père, l'avocat et écrivain Samuel Pisar, survivant de l'holocauste. « Tony » fréquente alors le très chic établissement international Ecole Jeanine Manuel. Son bac en poche, il étudie le droit en France avant de décrocher des diplômes à Harvard et à l'école de droit de l'Université de Columbia, à New York.
Robert Malley, le patron du think tank International Crisis Group, a aussi étudié à l'Ecole Jeanine Manuel. Il a assuré au Financial Times que la fibre de diplomate d'Antony Blinken s'était forgée lors de ses années parisiennes : « Tony était un Américain à Paris – les deux termes sont importants. Il était très conscient du fait d'être Américain et il croit dans les valeurs américaines. Mais il comprenait aussi comment la politique étrangère pouvait affecter le reste du monde, car il a vécu à l'étranger et a vu comment d'autres regardaient les Etats-Unis. A l'époque (NDLR : celle de la guerre du Viêt Nam), le pays n'était pas particulièrement populaire en Europe, surtout en France. Tony a navigué entre ces deux univers. »
«Regagner la confiance des partenaires mondiaux»Lors d'une audition parlementaire pour sa confirmation au poste de vice-secrétaire d'Etat en 2014, Antony Blinken a raconté s'être « retrouvé très jeune à jouer les diplomates juniors, essayant d'expliquer les Etats-Unis à (ses) camarades de classe ». Cette fois, il aura la lourde tâche de regagner la confiance des partenaires mondiaux, et notamment européens, après quatre années de politique isolationniste de Donald Trump.
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Chaque matin, l'actualité vue par Le ParisienL'ex-président américain Barack Obama estime qu'il a les qualités requises : « Il est remarquable, a-t-il déclaré au Washington Post, ce lundi. Intelligent, bienveillant, un diplomate de talent, très bien vu de par le monde. » Dans un e-mail à ses partisans, Joe Biden a envoyé le même message : « Tony est respecté partout par ceux qui le connaissent, et à raison. C'est un homme de principes, un leader qui a de la compassion, et en tant que diplomate en chef des Etats-Unis, il aidera à renforcer notre département d'Etat à montrer combien l'Amérique est plus forte lorsqu'elle montre l'exemple avec ses valeurs. »
Antony Blinken est un chantre du multilatéralisme qui considère la diplomatie comme la recherche d'un partenariat gagnant-gagnant plutôt qu'un simple rapport de force. Il croit aussi au modèle que son pays est censé jouer sur la scène internationale, notamment pour la promotion de la démocratie et des droits de l'Homme. Il s'était d'ailleurs prononcé, comme la France, pour des frappes en Syrie en 2013, quand le régime de Bachar al-Assad avait été accusé d'avoir utilisé des armes chimiques. Obama avait prévenu qu'il s'agissait d'une ligne rouge à ne pas franchir avant de finalement renoncer à une intervention militaire.
La nomination d'Antony Blinken, qui reste à confirmer par le Sénat, n'est ni plus ni moins que la mise en œuvre de la promesse de campagne de Joe Biden : le retour des Etats-Unis sur le devant de la scène mondiale, avec une approche plus traditionnelle que celle de son prédécesseur, chantre de l'« Amérique d'abord ». Avec un département d'Etat plus puissant (le département de la Défense avait pris le dessus sous Donald Trump), le pays cherchera à réparer et soigner ses alliances face à la Chine et à rejoindre les grands accords internationaux, comme l'Accord de Paris sur le climat, dont Trump a organisé la sortie malgré les tentatives d'Emmanuel Macron pour l'en dissuader.