Tour de France 2024 Jonas Vingegaard, le coeur mais pas les ...

Sauf coup de théâtre exceptionnel sur le dernier weekend niçois, le Tour de France version 2024 connaît son vainqueur. Il est Slovène, il sort d'un Tour d'Italie écrasé et a dominé la Grande Boucle comme à ses plus belles heures de 2021. Tout ceci plonge Jonas Vingegaard dans la position du battu qu'il n'avait plus connue depuis trois ans, résultat logique au bout d'une course contre-la-montre lancée début avril après une chute terrible. Ce jour-là, il était bien difficile de l'imaginer triomphant au bout du Tour de France.

Ce jour-là, l'entourage du Danois avait eu peur pour sa vie, comme on a pu croire qu'un énième drame allait frapper un peloton qui, décidément, ne voulait pas voir le problème en face. Face contre terre, Jonas Vingegaard savait qu'il était en vie et c'est à peu près la seule chose qui lui importait au Pays basque. Le 3 avril, il se préparait pour le Tour de France et le défi Tadej Pogacar. Le 4, il n'en était plus question. Quelques jours plus tard, il avait repris espoir sans qu'on le sache, dans son coin, avec ses proches et son équipe.

Il avait servi la soupe classique du coureur heureux d'être là à Florence pour le grand départ. On pouvait le croire ou non, la Visma ayant assuré qu'elle n'enverrait pas un Vingegaard incapable de remporter le classement général pour la troisième fois de suite. Il avait évoqué un podium pour objectif et cette fois, vraiment, on avait peine à croire qu'il s'agissait-là de ce qu'il avait au plus profond de son cœur.

"Je suis venu sur ce Tour avec l'état d'esprit de le gagner", a corrigé Vingegaard après son abdication au soir de la 19e étape vendredi. "On avait le rêve de remporter le Tour avec Jonas", confirmait Grischa Niermann. Chez Visma | Lease a Bike, on n'aime rien tant que les défis et celui-là en était un sacré, infiniment plus dur que de faire tomber Pogacar de son piédestal en 2022. On a essayé de faire en un temps record ce qui prend habituellement plusieurs mois à peaufiner. A vrai dire, on a presque réussi puisqu'à deux jours de l'arrivée, Vingegaard reste le deuxième homme du Tour.

"Je savais aussi que ça serait difficile avec le manque de course qui était le mien, poursuivait l'intéressé. On savait que perdre était une possibilité donc j'étais prêt à l'accepter mentalement. Je pense que c'est normal avec seulement un mois et demi de préparation d'être un peu court. J'ai dit depuis le départ que ça serait dingue si je pouvais me battre pour la victoire finale. Je l'ai fait pendant deux semaines et demie mais maintenant c'est terminé." A l'image de Pogacar l'an dernier, Vingegaard a tenu tant qu'il a pu, bien aidé qu'il fut par un parcours qui a retardé la grande explication, mais lui n'a pas complètement explosé.

Il y avait une grosse minute entre les deux rivaux au bout d'une semaine et une seconde de moins avant les Pyrénées. L'épisode du Lioran a fait croire à une inversion du rapport de forces, il était en fait un épiphénomène causé par une erreur de gestion de l'alimentation du maillot jaune. "Tadej est à un très, très haut niveau, rappelle Vingegaard. J'étais aussi à un super haut niveau". Ses performances pyrénéennes ont été occultées par les démonstrations slovènes mais lui aussi fut incroyablement solide, collant plus de deux minutes à Remco Evenepoel en deux jours.

"On a vu depuis le week-end dernier que Pogacar est plus fort, on avait encore des espoirs mais il faut le dire : Jonas est le deuxième meilleur coureur, et on est fiers de lui pour ça", appuie Grischa Niermann qui fera tout ce weekend pour maintenir son coureur sur la deuxième marche du podium. Jusqu'au bout, la Visma et Vingegaard ont envisagé un scénario qui les aurait envoyés vers le maillot jaune, preuve que le Danois a un cœur gros comme ça et qu'il n'a jeté l'éponge qu'une fois complètement convaincu qu'il n'y avait plus d'espoir.

Au fond, Vingegaard a réussi son Tour de France, eu égard aux chances qui étaient les siennes : "Je crois que si vous m'aviez dit que je serais simplement en dehors du podium à ce moment-là (après sa chute, ndlr), j'aurais été vraiment très content. Toute la préparation a été très loin d'être idéale. Être là où j'en suis avec une victoire d'étape, c'est quelque chose dont je n'aurais pas pu rêver avant le Tour de France." Lui aussi, comme Tadej Pogacar, n'a plus quitté les deux premières marches du podium depuis 2021, y compris quand la malchance s'en mêle.