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Tour de France 2020 : peur sur les descentes

Tour de France 2020  peur sur les descentes
Si les ascensions et les arrivées au sommet font le sel de la Grande Boucle, les descentes jouent un rôle important dans les étapes, comme lors de la 16e, mardi. Elles tétanisent certains coureurs.
Le peloton du Tour de France dans une descente entre Clermont-Ferrand et Lyon, le 12 septembre.
Le peloton du Tour de France dans une descente entre Clermont-Ferrand et Lyon, le 12 septembre. KENZO TRIBOUILLARD / AFP

« J’ai vu qu’il descendait comme une chèvre, donc j’ai fait la descente sans me retourner. » On pardonnera à Nans Peters, beau vainqueur de la première étape pyrénéenne du Tour de France – la huitième, entre Cazères-sur-Garonne (Haute-Garonne) et Loudenvielle (Hautes-Pyrénées), samedi 5 septembre –, sa méconnaissance en matière de caprins. Contrairement à Ilnur Zakarin (CCC), l’adversaire russe de l’Isérois de la formation AG2R-La Mondiale, les chèvres sont fort habiles quand les pentes s’accentuent.

« Les descentes m’ont causé de gros soucis », avait convenu Zakarin à l’issue d’une étape où s’il s’était montré plus à l’aise que Peters en montée. Les descentes, la dernière en particulier, lui auront coûté l’étape, achevée à la quatrième place. Le coureur a semblé perdre ses ailes quand la route plongeait vers le fond de la vallée. « Ce n’est pas nouveau, c’est mon problème. »

Le grimpeur russe, qui a abandonné depuis (victime d’une chute avant le départ de la 11e étape), est atteint d’un mal finalement assez répandu chez les coureurs professionnels : la peur de la descente.

Il est vrai que le cyclisme est un sport dangereux. Les impressionnantes images de la chute du Belge Remco Evenepoel (Deceuninck-Quick Step), le 15 août lors du Tour de Lombardie, dévalant à toute vitesse pour riper sur un parapet, et tomber d’un pont, ont rappelé cette évidence, en même temps qu’elles ont marqué les esprits. Et comme Zakarin, gravement blessé lors du Giro d’Italie 2016, certains peinent à se remettre dans le sens de la pente.

« Comme un flash »

« Après ma chute [au début de 2019 avant l’UAE Tour aux Emirats arabes unis], j’avais un vrai blocage dans les descentes », confessait Pierre Latour à la fin de 2019. Une bête inattention, et le coureur d’AG2R-La Mondiale s’était retrouvé sur la touche, les deux bras cassés. « A mon retour en course, dès que j’arrivais dans un virage, j’avais comme un flash et je revoyais ma chute où je me suis blessé. Du coup, je pilais. »

Difficile de suivre les meilleurs avec pareille appréhension. Comme le Britannique Bradley Wiggins ou le Luxembourgeois Andy Schleck, tétanisé après la mort de son équipier Wouter Weylandt dans une descente du Giro 2011, certains des plus grands noms du peloton ont, à un moment ou à un autre, mis les mains sur les freins par crainte d’un virage, ou changé de trajectoire par peur d’une pente à venir.

Thibaut Pinot confiait, en 2013, avoir « peur de la vitesse comme d’autres ont la phobie des araignées ou des serpents », depuis un grave accident plus jeune. Il redoutait alors que cette crainte ne handicape la suite de sa carrière. Comme de nombreux autres, le Franc-Comtois a apprivoisé sa peur. S’il ne fait pas partie des plus casse-cou, il suit – à l’exception de cette année où il se remet péniblement de sa chute lors de la première étape – les favoris dans les descentes.Et peut défendre ses chances quand la route monte.

« Ça ne se décide pas, on ne peut pas dire : “C’est dans la tête, ça passe sans freiner.” Non, la peur, c’est physiologique, elle nous pousse à freiner », rappelle Guillaume Martin, le leadeur de la Cofidis, pour qui tout coureur est confronté à cette crainte, « après chaque chute ». « Ça s’apprend et se réapprend, car quand on chute, il y a une appréhension nouvelle qu’il faut dénouer. »

« Ne pas intellectualiser et y aller »

A ses yeux, seuls la répétition des gestes et l’enchaînement des descentes, « parfois dans la roue de personnes qui descendent mieux », permettent de retrouver cette confiance. Pierre Latour confirme. Pour réapprendre à enchaîner les virages à haute vitesse, il expliquait s’être « mis dans sillage de Quentin [Jauregui], avec qui je cours depuis les juniors. S’il passait, je passais ».

Appelé à être le leadeur d’AG2R-La Mondiale sur le Tour cette année – avant que le coronavirus ne chamboule la saison –, le coureur (de même que ses partenaires) a eu droit à un stage consacré à la descente, en compagnie d’un spécialiste espagnol.

« A la suite de nombreuses chutes, Pierre appréhendait les descentes, et avait du mal à rester au sein du peloton quand elles sont effectuées à très vive allure sur des parcours techniques. Ces stages ont permis de les appréhender avec plus de recul », explique le directeur sportif de l’équipe française, Julien Jurdie.

Si ces sessions n’ont pas empêché l’abandon de Latour, souffrant d’une chute lors de la première étape, ni celle de Romain Bardet, victime d’un traumatisme crânien dans une descente, la peur de descendre est loin d’être inéluctable chez les coureurs. « Je me suis cassé la clavicule en 2018, et après j’ai vraiment eu du mal à descendre, relatait Nans Peters au Monde en décembre 2019. Beaucoup d’appréhension à y aller. Pourtant, dans les descentes, il faut débrancher. Ne pas intellectualiser, et y aller. »

Des principes que le coureur d’AG2R-La Mondiale a appliqués avec succès en descendant vers Loudenvielle, et se verrait bien recommencer. Mardi, la 16e étape reliant La Tour-du-Pin (Isère) à Villard-de-Lans ne manque pas d’occasions de dévaler les pentes.

Anthony Hernandez et Clément Martel(La Tour du Pin, Isère, envoyés spéciaux)

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