RTBF : déjà des estimations et résultats de la présidentielle sur...
RTBF. Bien avant 20 heures, la RTBF a déjà commencé à diffuser des estimations des résultats du 2e tour de la présidentielle française, Avec quelques approximations comme au premier tour ?
[Mis à jour le 24 avril 2022 à 17h01] Comme annoncé dès ce matin ce dimanche 24 avril, la RTBF a diffusé de premières estimations des résultats du 2nd tour de l'élection présidentielle bien avant 20 heures ce dimanche. La radio télévision belge (RTBF) a même publié dans l'après-midi des résultats présentés comme "définitifs" pour plusieurs départements et territoires d'outre-mer. La Guyane, Saint-Pierre-en-Miquelon, la Guadeloupe, la Polynésie Française en font partie. Comme tous les médias français, Linternaute.com ne peut vous donner de résultats avant 20 heures. Il en sera tout autre pour les médias francophones étrangers.
La RTBF l'assume et dévoile ainsi sur son site internet ce dimanche 24 avril qu'elle diffusera plusieurs vagues de résultats. Avant 19 heures ce dimanche, elle compte diffuser de premiers sondages mais met en garde : "Les principaux instituts de sondage en France ont cependant conclu un accord cette année avec la commission des sondages pour ne plus effectuer ces coups de sonde. Le professionnalisme des sondages effectués cette année est donc sujet à caution." La RTBF rappelle aussi que ces sondages ne sont qu'une 'photographie à un temps t" du scrutin et que les écarts peuvent alors être importants avec le score final.
En revanche, le média belge précise également vouloir diffuser de premières estimations de résultats "aux alentours de 19h30". Pour la RTBF, ces estimations "correspondent à ceux donnés à 20 heures par les médias français." Les électeurs impatients pourraient donc avoir de premiers résultats avant 20 heures mais il conviendra d'être prudent. Pour rappel, Linternaute.com vous fera vivre toute la soirée électorale avec tous les résultats officiels publiés en provenance directe de nos envoyés au ministère de l'Intérieur.
Ces résultats publiés avant 20 heures sont-ils fiables ?Mais la RTBF est-elle une source fiable pour prendre connaissance des résultats de la présidentielle 2022 en France ? C'est la question posée ce dimanche, alors que le 2e tour de scrutin a débuté à 8 heures dans l'Hexagone. Il y a quinze jours, pour le premier tour, la Radio télévision belge francophone avait publié des estimations du résultat dès la fin d'après-midi, violant la période de réserve imposée aux médias français pour ne pas biaiser l'issue du scrutin. Sur son site Internet où elle suivait l'élection dans un live, ainsi que sur les réseaux sociaux, la RTBF annonçait avant 19 heures "Emmanuel Macron et Marine Le Pen au coude-à-coude, avec 24% des voix". Elle affinait son estimation quelques minutes plus tard, créditant le président sortant de 24,7% et la candidate du RN de 23,5%.
La RTBF mentionnait alors "un sondage à la sortie des urnes", sans préciser l'institut lui ayant fourni cette estimation des résultats. Un procédé déjà employé en 2017 quand, dès le début d'après-midi, elle avait désigné Emmanuel Macron et Marine le Pen comme les deux finalistes de la présidentielle. Mais son estimation du premier tour de la présidentielle 2022 pose problème a bien des égards. D'abord, si elle a bien donné à l'avance le duo qui figure ce dimanche au 2e tour de scrutin, son estimation chiffrée s'est révélée assez largement inexacte. Emmanuel Macron a finalement distancé Marine Le Pen lors du premier round de l'élection avec près de 28% des suffrages contre un peu plus de 23% pour sa rivale. Un résultat bien éloigné du "coude-à-coude" annoncé.
La réponse de la commission des sondagesSans doute un peu échaudée, la Commission des sondages a donc répliqué sans tarder. Le jour même du premier tour de la présidentielle, elle a annoncé avoir contacté l'institut Harris Interactive "pour s'assurer que l'engagement pris de ne pas réaliser de sondage sortie des urnes avait été respecté". Alors que le sondeur faisait partie des instituts français s'étant engagés à ne pas réaliser ce genre d'enquête, des questionnaires soumis à des des électeurs dans la journée ont circulé sur les réseaux sociaux. A ce stade Harris n'a pas communiqué sur cette question.
Le mépris de la RTBF et des belges, la réaction des autorités françaisesLes mises en garde voire les menaces des instances encadrant l'élection en France n'y feront pourtant rien. La RTBF n'a d'ailleurs pas été la seule à narguer la CNCCEP. La Libre Belgique diffusera les mêmes estimations que ses confrères le 10 avril. Le journal le Soir pour sa part annoncera dès le matin du premier tour, dans un article publié sur son site Internet et intitulé "#RadioLondres: pourquoi les médias belges peuvent diffuser les résultats de la présidentielle avant 20h", son intention de publier de premières tendances dès 18 heures, ou en tout cas quand l'information serait "recoupée, fiable et sérieuse"...
Autre manquement de la RTBF : le défaut de source. Si la Radio télévision belge francophone assurait mordicus de la fiabilité de ses chiffres, jamais elle ne précisera où ni comment ceux-ci ont été obtenus. Et pour cause : tous les instituts de sondages français s'étaient engagés auprès de la Commission des sondages à ne pas réaliser et communiquer de "sondages sortie des urnes" le jour du scrutin. Si les sondeurs ont tenu parole (ce qui reste à prouver), alors les estimations diffusées le 10 avril sont des estimations "hors-sol", qu'aucune enquête crédible ne semble pouvoir justifier. Ou, pour le dire plus de manière plus triviale, des "informations trompeuses se présentant abusivement comme des sondages", comme avait prévenu la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) dans un communiqué quelques jours plus tôt, anticipant ce genre de publication.
La Commission des sondages avait pour sa part rappelé elle aussi, à cinq jour du vote, que "tous les chiffres qui seraient diffusés avant 20 heures seraient faux". Début avril dans un autre communiqué, elle indiquait en effet avoir obtenu "des 8 principaux instituts de sondages (BVA, Elabe, Harris Interactive, Ifop, Ipsos, Kantar, Odoxa, OpinionWay) l'assurance qu'aucun d'entre eux ne réalisera le 10 avril de sondages "sortie des urnes"". En conséquence, "toute référence, le jour du scrutin, à de tels sondages ne pourra être que le fruit de rumeurs ou de manipulations et partant, [...] aucun crédit ne devra leur être accordé", ajoutait-elle. De fait, l'histoire confirmera le caractère erroné des estimations de la RTBF. De quoi inciter à un minimum de méfiance ce dimanche, si le scénario se répète bien pour le 2e tour, comme annoncé ce dimanche matin par le média belge.
Mais que font les sondeurs le jour du scrutin ?Si les sondeurs assurent qu'ils ne mènent pas (ou plus) de sondages sortie des urnes les jours d'élections et ne sont pas à l'origine des fuites, ils sont tout de même les producteurs des estimations dévoilées par les chaînes de télévision à 20 heures, quand la chappe de plomb qui pèse sur les médias toute la journée est enfin levée. Des estimations basées non pas sur une enquête déclarative cette fois, mais sur les premiers bulletins dépouillés. L'institut Ifop a ainsi expliqué à LCI pendant la campagne qu'il disposait de 260 bureaux de vote représentatifs parmi les 70 000 bureaux de vote en France. Ces derniers ont été savamment choisis selon la taille de leur commune d'appartenance et d'une répartition géographique cohérente entre grandes métropoles, villes moyennes et zones rurales, le tout dans chaque département. Ces bureaux de vote sont sélectionnés selon des critères précis comme les résultats des dernières élections, la composition socioéconomique de la population pour constituer un échantillon représentatif de l'électorat en France. Ce sont eux qui servent à réaliser ces sondages.
Dans la pratique, des enquêteurs sont envoyés dans ces bureaux de vote et vont assister aux dépouillements qui sont ouverts au public en France. Toutes ces petites mains vont relever et communiquer à l'institut de sondages de manière numérique le résultat provisoire, établi par le président du bureau de vote tous les 100 bulletins dépouillés. C'est de cette manière qu'il est possible d'obtenir des tendances lourdes avant même la fin des dépouillements. Dès 19h et jusqu'à 19h45, la remontée des données est continue et ces dernières sont intégrées au fil de l'eau à un logiciel qui va les traiter de manière algorithmique pour extrapoler une estimation nationale du résultat. La méthode n'est donc pas basée sur un sondage ou un "sondage sorties des urnes" comme on le lit encore souvent. Ces enquêtes ne sont pas basées sur du déclaratif, avec les biais que cela peut représenter. Les électeurs ne sont pas interrogés sur leur vote. Ce sont des résultats réels qui permettent, via de puissants algorithmes, de projeter des estimations. Sont-ce ces estimations - pas encore affinées - que les médias belges comme la RTBF parviennent à faire fuiter ?