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 Pour Robert Badinter le génocide des juifs relève dun crime
TRIBUNE. Un hommage national sera rendu à l’ex-garde des sceaux, mercredi à midi. L’historien Sébastien Ledoux rappelle le rôle central qu’il a joué comme artisan de la mémoire de la Shoah en France.

« Juif ». Avocat de plus en plus connu des Français pour son combat contre la peine de mort à la suite du procès de Patrick Henry, en 1977, Robert Badinter signe avec ce mot une tribune dans Le Monde le 15 juin 1979 : « Pour le jugement des crimes contre l’humanité ». L’avocat estime impératif de juger des auteurs de crimes imprescriptibles, en citant Jean Leguay (1909-1989) et René Bousquet (1909-1993).

« Juif ». Par ce mot, Robert Badinter se désigne alors publiquement dans cette identité qui le rattache à la Shoah, lui qui a perdu son père et une grande partie de sa famille dans la « solution finale ». C’est donc en tant que « juif » qu’il s’engage dans une controverse qui l’indigne : les propos négationnistes de Louis Darquier de Pellepoix, ancien commissaire général aux questions juives, de 1942 à 1944, dans L’Express en octobre 1978, puis ceux de Robert Faurisson (1929-2018) dans Le Monde le 29 décembre 1978.

La controverse revêt une dimension judiciaire qui l’intéresse au plus haut point. L’avocat Serge Klarsfeld vient alors de faire inculper Jean Leguay pour crimes contre l’humanité en mars 1979. Des voix s’élèvent alors pour dénoncer ses poursuites, estimant que la prescription des crimes nazis doit s’imposer.

Distinguer la singularité du génocide contre les résistants

Pour Robert Badinter au contraire, le génocide des juifs relève d’un crime contre l’humanité qui ne peut être prescrit. Son engagement va alors à l’encontre d’un modèle politique qui pose le principe de la prescription de passés criminels comme un instrument de régulation de la société. L’avocat commence alors un combat contre les thèses négationnistes, contre l’impunité du crime génocidaire, et enfin contre son oubli.

Avocat de la Licra, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, il fait condamner Faurisson en 1980 pour diffamation raciale, et sera ensuite l’infatigable défenseur de la vérité sur le génocide face au « faussaire de l’histoire », surnom qu’il lui a donné. Robert Badinter a également joué un rôle déterminant pour faire juger Klaus Barbie (1913-1991) pour crime contre l’humanité. Le ministre de la Justice convainc François Mitterrand d’extrader de Bolivie l’ancien chef de la Gestapo à Lyon, lors d’un conseil interministériel tenu en décembre 1982.

Robert Badinter est alors seul face à d’autres ministres et anciens résistants, Claude Cheysson, Gaston Defferre ou Charles Hernu, exprimant leurs réticences à voir Barbie juger en France sans la Résistance en raison de la prescription des crimes. Il doit ensuite mener un combat juridique pendant l’instruction pour distinguer la singularité du génocide de la répression contre les résistants.

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