Un an après l'attaque du Hamas le 7 octobre, Macron prend le ...
CHRISTOPHE ENA / AFP
Le Premier ministre isréalien Benjamin Netanyahu et le président français Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse le 24 octobre 2023 à Jérusalem.
POLITIQUE - Une commémoration pour les victimes du 7 octobre 2023 aux allures de crise diplomatique. En se prononçant, samedi 5 octobre, pour l’arrêt des livraisons d’armes à Israël susceptibles d’être utilisées pour bombarder Gaza, le président de la République a crispé l’État hébreu à la veille des hommages prévus en France et en Israël un an après l’attaque du Hamas.
« Je pense qu’aujourd’hui, la priorité, c’est qu’on revienne à une solution politique, qu’on cesse de livrer les armes pour mener les combats sur Gaza », a déclaré le chef de l’État lors d’une émission spéciale sur France Inter consacrée à la francophonie, assurant que la France « n’en livre pas ». Cette déclaration marque un changement de ton – léger mais notable – dans le discours présidentiel vis-à-vis de l’État hébreu. Car si Emmanuel Macron a toujours mis en garde Israël sur les répercussions civiles de sa lutte contre le Hamas, il n’était jamais allé jusqu’à préconiser l’arrêt des livraisons d’armes. Selon le ministère de la Santé du Hamas, plus de 41 000 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre dans la bande de Gaza.
Une fois n’est pas coutume, le président de la République a donc été soutenu par certains opposants de gauche. « Je prends le point. Il y a longtemps qu’il fallait arrêter d’armer Israël, sur toutes les armes servant le génocide en cours à Gaza », a réagi le député insoumis Éric Coquerel dans Le Grand Jury sur RTL ce dimanche 6 octobre. « Enfin et tant mieux si la France peut parler d’une seule voix », abonde le premier secrétaire du PS Olivier Faure sur X.
Macron plaide « la cohérence » avec les appels au cessez-le-feu
A contrario, la sortie présidentielle a provoqué la colère de Benjamin Netanyahu. Au point que, en pleines offensives meurtrières à Gaza et au Liban, le chef du gouvernement a pris le temps, dans la soirée, d’adresser un message vidéo personnel à Emmanuel Macron. « Alors qu’Israël combat les forces de la barbarie dirigées par l’Iran, tous les pays civilisés devraient se tenir fermement aux côtés d’Israël. (...) Honte à Macron et aux dirigeants qui le suivent » sur les livraisons d’armes, a fustigé Benjamin Netanyahu.
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Lire la VidéoDans la soirée, l’Élysée a déploré les mots « excessifs » du dirigeant israélien et réaffirmé que la France restait « l’amie indéfectible d’Israël ». Mais le changement de ton reste perceptible et Emmanuel Macron n’en démord pas. « Si on appelle à un cessez-le-feu, la cohérence, c’est de ne pas fournir les armes de la guerre », a-t-il martelé samedi en fin de journée en clôture du sommet de la Francophonie. « Et je pense que ceux qui (les) fournissent ne peuvent pas chaque jour appeler à nos côtés au cessez-le-feu et continuer de les approvisionner », a-t-il ajouté en visant les États-Unis.
Sur franceinfo ce dimanche matin, l’ambassadeur d’Israël en France Joshua Zarka a minimisé les tensions diplomatiques, refusant de parler de « faute » côté français comme israélien. Mais le Conseil représentatif des institutions juives de France s’est ému des propos du président de la République : « Appeler à priver Israël d’armes, ce n’est pas faire le jeu de la paix, cela revient à faire le jeu du Hamas et du Hezbollah ! », a fustigé le Crif sur X. Tout en refusant de « commenter » les propos présidentiels, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a aussi estimé sur BFMTV que face au « refus du cessez-le-feu » par le Hamas, « il ne faut pas désarmer Israël ».
Macron pointe « la faute » de Netanyahu et critique les offensives au Liban
Mais le président français ne cache plus un certain agacement face à la logique « va-t-en-guerre » de Benjamin Netanyahu. Le Premier ministre israélien commet « une faute, y compris pour la sécurité d’Israël demain » en ne s’impliquant pas pour un cessez-le-feu, a redit le président sur France Inter, mettant en garde contre « un ressentiment qui est en train de naître, une haine qui est nourrie par cela ». Il a également dit « regretter que le Premier ministre Netanyahu ait fait un autre choix » que le cessez-le-feu proposé par Paris et Washington et mène des « opérations terrestres sur le sol libanais », qui ont déjà causé la mort de plus de 1100 personnes depuis le 23 septembre.
Pour autant, le timing de ces déclarations à deux jours du 7 octobre interroge. « Le rôle du chef de l’État, et c’est la ligne qui a toujours été la sienne, c’est celle de la désescalade, du dialogue politique, des appels au cessez-le-feu », a défendu la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon sur France Inter. Le Qatar, un médiateur clé dans les pourparlers sur un cessez-le-feu à Gaza, a d’ailleurs estimé que la déclaration d’Emmanuel Macron était « un pas important et apprécié vers l’arrêt de la guerre ».
Rabibochage mis en scène
Ce dimanche soir, l’Élysée a communiqué sur un entretien téléphonique entre les deux responsables, « en toute franchise et dans le respect de l’amitié entre la France et Israël », comme pour rassurer sur l’état des relations bilatérales et mettre en scène le rabibochage. « À la veille du premier anniversaire de l’offensive terroriste du Hamas contre Israël, [le chef de l’Etat] a exprimé la solidarité du peuple français avec le peuple israélien », a fait savoir la présidence, alors qu’Emmanuel Macron doit recevoir lundi à l’Élysée les familles d’otages franco-israéliens détenus à Gaza.
Mais il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu à Gaza et au Liban, disant « sa conviction que le temps est désormais venu ». Sera-t-il plus entendu, un an après le début de la guerre ? Benjamin Netanyahu est resté sur ses positions, assurant que la guerre contre le Hezbollah vise à « ramener la stabilité » dans la région. « On attend des amis d’Israël qu’ils le soutiennent et ne lui imposent pas de restrictions qui ne feront que renforcer l’axe du mal iranien », a déclaré le chef du gouvernement israélien, selon son bureau. Le dialogue de sourd n’est pas prêt de finir.
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