Une enquête de Mediapart met en cause l'auteur de BD Florent ...
C’est violent. Voici un auteur que nous croisons depuis des années, dont on a apprécié l’intelligence et l’inventivité, sur le banc des accusés. Était-ce lui d’ailleurs, en sous-texte, la véritable cible de ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui « l’affaire Vivès » ? Il est clair que son nom courait depuis plusieurs mois dans les rédactions. Mais sans faits tangibles, la plupart d’entre elles, et en particulier ActuaBD qui n’a pas les moyens de faire ce genre d’investigation, restaient sur leur quant-à-soi, attendant les décisions de justice.
Mais d’autres médias, c’est le cas de Médiapart ici, font « sortir » l’affaire, s’attendant sans doute à ce que l’accumulation des témoignages puisse faire en sorte que l’affaire soit réinstruite. De quoi s’agit-il ? Du comportement d’un dessinateur fêtard et sorteur aux conquêtes multiples et aux pratiques apparemment libertines. Certains témoignages évoquent le déni de consentement à l’égard de certaines de ses partenaires, voire de viol. Ce n’est certes pas à nous de juger, c’est à la justice de le faire.
Que ces faits soient dénoncés, que cela ait un impact sur le comportement des hommes dans le milieu de la bande dessinée, c’est certain, et c’est même souhaitable. Mais cette affaire relevant de la sphère privée, si elle doit être condamnée en cas de qualification criminelle, ne doit pas nous empêcher d’être vigilant : l’article est assorti d’une interview d’un historien, Frédéric Chauvaud, à qui Médiapart pose la question de savoir si la lecture de la bande dessinée est responsable de cette situation. Évidemment que non, répond l’historien qui, si on le lit bien entre les lignes, défend le droit de création d’un Bastien Vivès par exemple.
La dérive, c’est cette accusation de « pousse au crime » dont la bande dessinée est l’objet (ailleurs : les jeux vidéo, les dessins animés, les mangas…), un argument que l’on pouvait lire avant la Seconde Guerre mondiale aussi bien sous la plume de l’Abbé Bethléem que sous celle de Georges Sadoul, figure intellectuelle du PCF, est une nouvelle fois mise en avant.
Rappelons simplement que cette alliance avait abouti à la fameuse loi de censure pour la Protection de la jeunesse de 1949, conçue sous Vichy, promulguée sous la IVe République dans une alliance entre les catholiques et les communistes qui avait permis, par exemple, d’interdire la publication de la revue féministe Ah ! Nana ! Notons au passage qu’elle n’est toujours pas abrogée...
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