Cary Grant (Elle et lui, Arte): l’assurance et l’élégance faites homme, malgré les souffrances d’une enfance traumatique

A l'occasion de la diffusion, ce soir sur Arte, de la bouleversante romance Elle et lui, portée par Deborah Kerr et Cary Grant, Télé-Loisirs vous propose de revenir sur l'enfance traumatisante qu'a vécue l'un des acteurs les plus flamboyants de l'âge d'or hollywoodien.

Son charme était fait d'une association rare de virilité, d’élégance, de sensibilité et de fantaisie… La perfection faite homme ! C’était Cary Grant, l’une des plus grandes créatures qu’Hollywood ait jamais façonnées, et à laquelle aucune des grandes actrices de l'époque n'a résisté, d'Ingrid Bergman (Les enchaînés) à Grace Kelly (La main au collet), en passant par Deborah Kerr (Elle et lui), Katherine Hepburn, Marilyn Monroe (Chérie, je me sens rajeunir), Ginger Rogers (Lune de miel mouvementée), ou Audrey Hepburn (Charade). Cary Grant a endossé ce costume d’homme raffiné et aimable avec aisance, et ne l’a plus jamais quitté, pour mieux tourner le dos à son ancienne vie. Car derrière cette légende sur pellicule à la présence extraordinaire, se cachait le petit Archibald Leach, enfant des quartiers pauvres de Bristol, en Angleterre, qui a grandi dans un contexte familial des plus tragique.

Fils de Elsie Kingdon, couturière, et de Elias Leach, ouvrier dans une usine de confection, sa naissance en janvier 1904 vient panser une profonde blessure. Archibald prend la place d’un frère, mort d'une gangrène - suite à une brève inattention de sa mère - à l'âge d'un an. Ce décès domestique a semé la discorde dans le couple, et cette nouvelle naissance, d’un fils de surcroît, est envisagée par les parents comme une seconde chance. Archibald grandit avec ce poids du remplaçant qui vient réparer le préjudice, alors que la mésentente entre ses parents est toujours là. Son père sombre dans l'alcool, et sa mère dans une dépression chronique, convaincue qu'elle est responsable de la mort de son premier fils. Elle reporte toute son attention sur lui, et fait en sorte qu'il apprenne le chant, la danse et le piano.

Lorsque Archibald a neuf ans, son père fait interner son épouse en asile psychiatrique, mais n'explique rien à son fils. Ou plutôt, il lui raconte ce terrible mensonge : sa mère est partie pour de longues vacances. L'enfant croit alors qu'elle l'a abandonné (ce qui contribuera à rendre sa vie sentimentale tumultueuse). Quelques semaines plus tard, son père lui annonce qu'elle est morte d'une crise cardiaque ! En 1915, soit un an après, il l'abandonne pour fonder une nouvelle famille loin de Bristol, et l'enfant est confié à sa grand-mère paternelle. Livré à lui-même, Archibald devient un enfant des rues, avant de trouver son salut auprès d'une troupe d'acrobates et de comédiens. Vingt ans plus tard, en 1935, alors qu'Archibald Leach a changé de nom pour Cary Grant et commence à bâtir les fondations d'une riche carrière, il reçoit une lettre signée de son père. Sur son lit de mort, celui-ci lui révèle que sa mère est toujours en vie, et croupit toujours à l'asile. Cette révélation est bien sûr un immense choc. L'acteur fait sortir sa mère de l'asile et l'installe à Bristol où il lui rendra régulièrement visite jusqu'à la fin de ses jours. Cary Grant va, dans les mois qui suivent cette révélation, sombrer dans une dépression profonde, que les studios camoufleront au public en faisant croire qu'il est malade.

Toutes ces fêlures propres à rendre fou n'importe qui (et que Cary Grant a notamment soignées avec du LSD), ont apporté au jeu élégant de l'acteur une fragilité et une ambiguïté qui ont fait sa gloire. Sa présence aura fasciné tous les metteurs en scène, en particulier Alfred Hitchcock, dont Cary Grant est devenu l'interprète fétiche. Et c'est à travers son art du jeu, et une filmographie riche et variée, qu'il a pu exprimer ses multiples facettes. Alors cette question : sans le petit Archibarld Leach tapi au fond de sa psyché, Cary Grant aurait-il connu une telle renommée ?