un crooner doué, « roi du cool » et de la dissimulation
ARTE – LUNDI 8 JANVIER À 22H55 – DOCUMENTAIRE
En une phrase, Elvis Presley trouve les mots justes. Face à la petite Deana Martin, la fille de Dean, il lui dit : « On m’appelle le roi du rock’n’roll, mais ton père est vraiment le roi du cool ! » Pouvons-nous demander un plus grand compliment pour Dean Martin (1917-1995), né Dino Crocetti, fils d’un coiffeur et d’une couturière des Abruzzes, en Italie, élevé à Steubenville (Ohio), et qui, jusqu’à l’âge de 6 ans, n’a tu ne parles pas un mot d’anglais ?
Le « roi du cool » américain, capable de remplir les salles, de pulvériser les téléspectateurs pendant dix ans avec son émission hebdomadaire, de vénérer Caruso et d’être adoubé par Sinatra, de faire carrière en cherchant à se moquer de tout, c’est donc lui. Beau mec, grand chanteur, bon danseur, acteur, farceur, séducteur, bien sûr. Mais derrière le succès se cache un homme ” très complexe “comme l’a résumé l’une de ses épouses.
L’intérêt de ce documentaire rempli d’archives étonnantes, notamment celles de la télévision américaine des années 1950 et 1960, est justement d’aller un peu plus loin que le portrait d’un type aussi doué, travailleur et, bien sûr, tellement cool. Chez Dean Martin, il y a aussi l’alcool et une profonde dépression. « Pour être cool, il faut garder un peu de mystère, cacher son jeu », il a dit. Mission accomplie. Personne, pas même ses épouses et ses enfants bien-aimés, ne sait vraiment qui se cache derrière « Mr Cool ».
Alcoolisme, tabagisme, dépression
Son duo avec Jerry Lewis, avec qui, pendant dix ans, il a rempli les salles et fait fortune, ses tournées folles avec le Rat Pack (avec Frank Sinatra et Sammy Davis Jr), ses nombreuses apparitions, plus ou moins réussies, au le cinéma, son émission de télévision où les stars se bousculent, tout est évoqué.
Mais derrière la légèreté du grand séducteur se cache toujours une ombre. Comme si la vie n’était qu’une plaisanterie et que seules les bonnes parties de golf, sa grande passion, lui permettaient de supporter tout ce cirque.
Dean Martin n’a jamais été dupe. Avant la célébrité, il travaillait dans une mine de charbon et était croupier dans l’arrière-boutique d’un bureau de tabac peu fréquenté. Il rêvait d’être boxeur et est devenu crooner grâce à un travail acharné. Des salles crasseuses aux soirées de gala, il aura tout vécu. Las Vegas devient son royaume, mais le drame n’est jamais loin. Alcoolisme, tabagisme, dépression suivent de près.
En dix-huit mois, au milieu des années 60, il perd ses parents et son frère. En 1987, son fils, pilote d’avion de chasse, est tué dans un accident. Dean Martin, le grand séducteur, ne cherche même plus à créer des illusions. Fumeur compulsif, on lui a diagnostiqué un cancer du poumon. Il refuse de se faire opérer et n’arrêtera de fumer qu’à l’âge de 76 ans. Deux ans plus tard, le « roi du cool » disparaît. Tout le monde aime quelqu’un…
Doyen Martin. Roi du cool, de Tom Donahue (UE, 2021, 53 min). Sur Arte.tv jusqu’au 6 avril.
Alain Constant