Carlos Alcaraz déboulonne Jannik Sinner à Pékin

Carlos Alcaraz a eu le dernier mot face à Jannik Sinner. Pour ce dixième affrontement entre les deux jeunes talents du tennis mondial, le deuxième seulement en finale, l'Espagnol a remporté une nouvelle grande bataille face au n°1 mondial, empereur en titre à Pékin, déboulonné en trois manches (6-7 [6], 6-4, 7-6 [3]) et tombé pour la première fois en sept finales disputées cette saison.

Avec ce trophée, acquis au terme d'une lutte monumentale de 3 h 23 et d'un tie-break final totalement renversé (de 0-3 à 7-3), Alcaraz rejoint Sinner au nombre de titres en carrière (16 chacun). Surtout, les deux monstres posent là une pierre de plus sur le mur d'une rivalité appelée à gouverner le tennis pour de longues années futures.

Ce qu'il y a d'enthousiasmant avec ces deux jeunes hommes, c'est que la mèche est vite allumée. Et cette dixième opposition n'a pas fait exception à cette pétaradante règle. L'Espagnol a posé son jeu explosif d'entrée et le n°1 mondial italien a d'abord dû parer les coups. S'il écartait joliment trois balles de break d'affilée sur son premier jeu de service, Sinner cédait vite, acculé notamment derrière sa deuxième balle de service.

Sinner, le résistant

Avec le break en poche, un jeu résolument tourné vers l'avant et des stats de mammouth face au Top 5 cette année (7-1 avant cette partie), Alcaraz était sur les bons rails, dans cette finale XXL entre les deux vainqueurs en Grand Chelem cette saison (Open d'Australie et US Open pour Sinner, Wimbledon et Roland-Garros pour Alcaraz).

Sinner, lui, avait du mal à dépasser sa fonction de maître de fond de court. Trop timide dans les prises d'initiative, le tenant du titre à Pékin, qui restait avant cet affrontement sur 24 succès et quatre titres de rang en ATP 500, partait même souvent à la faute dans son registre (2 coups gagnants pour 13 fautes directes sur les sept premiers jeux).

Mais le n°1 mondial a de la ressource. De nouveau emberlificoté dans son affaire de dopage au clostébol, après que l'AMA (Agence Mondiale Antidopage), en deuxième instance, a déposé un recours auprès du TAS samedi dernier, Sinner n'a sûrement pas l'esprit totalement libéré sur le court. Mais, dans l'inconstance qui fut la sienne cette semaine à Pékin, il est resté rebelle et combatif. Sur un jeu de retour beaucoup plus engagé à 5-3, il débreakait alors qu'Alcaraz servait pour le set, sauvait ensuite trois balles de set, dont une sur un énorme retour de première balle dans le jeu décisif ! Et à force de résistance, c'est lui, comme un malandrin, qui chipait le butin sur deux énormes fautes en longueur de l'Espagnol.

À un set partout sur un jeu blanc

Ce set dérobé boostait évidemment l'Italien. Derrière une première balle très franche, Sinner reculait moins désormais. Il y avait combat, entre coups fumants et quelques flottements. À 3-3, la créativité d'Alcaraz le plaçait à nouveau en bonne posture, à 15-40. Mais encore une fois, Sinner, puissant, solide, efficace, écartait la menace.

Alcaraz en était quitte pour remettre l'ouvrage sur l'établi. Mais la frustration commençait à poindre, forcément. Deux revers fautifs, une volée haute de coup droit pas assez claquée, trois coups droits trop long le mettaient en péril sur son service, à 3-4. Mais l'Espagnol écartait deux balles de break, au bord du précipice, dans ce jeu interminable.

Et derrière, grâce à une défense héroïque et une grande chandelle, « Carlitos » saisissait enfin la chance sur une erreur en longueur de l'Italien pour servir à nouveau pour le set. Cette fois, il n'y avait pas de faute de goût. Revers long de ligne, passing de coup droit après un échange monumental, ace : Alcaraz égalisait à un set partout sur un jeu blanc (6-4).

Alcaraz monumental dans le tie-break

Dans la lignée de leurs neuf confrontations précédentes (5-4 pour Alcaraz), Pékin était un autre lieu de bagarre pour ces deux bêtes du jeu. Mais le momentum avait encore tourné et il était désormais espagnol. Plus tranchant et de nouveau libéré à la frappe, il validait sa domination et breakait à 1-1 sur un énorme coup droit décroisé. Le n°1 mondial était touché. Il passait même tout près d'un double break de retard dans la foulée. Mais Sinner restait en vie, donc dangereux. Alcaraz le savait. Pourtant, une nouvelle fois, l'Espagnol « vendangeait » son avance sur un jeu de service totalement manqué à 4-3.

La pièce roulait encore. Sinner bataillait toujours, avec cette stabilité et cette justesse redoutables quand il est mené dans un match. Alcaraz se tendait forcément, alternant un prodigieux revers dans la diagonale et une volée amortie de coup droit trop molle. Les deux hommes étaient sur un fil. Sinner écartait une balle de break à 5-5. Et l'histoire serait contée jusqu'au bout et un ultime jeu décisif.

Entré en finale avec dix-sept tie-breaks gagnés sur les dix-huit derniers disputés, Sinner a mené d'entrée 3-0. Et puis, Alcaraz est devenu monumental, à l'image de ce point dantesque pour revenir à 3-2. Le duel était sublime. Alcaraz volleyait à mi-court comme sur un nuage, balançait un pain en coup droit décroisé qui flirtait avec la bande, alignait sept points de suite pour s'offrir le titre à Pékin et faire tomber Sinner. Une nouvelle fois, ce dixième classique des hauts sommets avait tenu ses promesses. Et tant d'autres histoires entre ces deux hommes sont encore à écrire.