Coronavirus : des filtres dans les masques en tissu, bonne ou mauvaise idée ?
Les sacs aspirateurs, les filtres à café et même les lingettes dépoussiérantes électrostatiques font leur apparition dans la liste du matériel pour fabriquer un masque. Une solution fortement déconseillée par l’Association française de normalisation (AFNOR).
Allergies, asthme, toxicité« C’est une question de bon sens ! Il ne faut pas prendre toutes les expérimentations pour argent comptant », s’insurge Olivier Gibert de l’AFNOR.L’association a mis en ligne des modèles de masques barrières à concevoir à la maison à base de tissus. Elle alerte quant à l’utilisation des sacs aspirateurs et filtres à café.
« Ces matériaux sont susceptibles de libérer dans l’air inhalé des substances irritantes pouvant causer un risque d’allergie (en particulier de crises d’asthme grave) et/ou de toxicité », indique l’AFNOR sur son site internet.
Même réponse pour les lingettes dépoussiérantes électrostatiques. « Ces matériaux ne sont pas conçus pour que l’on respire à travers », alerte Olivier Gibert de l’AFNOR. Il insiste: « aucun test n’a été mené sur ces surfaces pour savoir comment on y réagit ».L’AFNOR préconise de privilégier le coton ou un textile synthétique en guise de couche supplémentaire. Inutile de prendre le risque d’utiliser d’autres matériaux « même s’ils semblent présenter une filtration ou une étanchéité supérieure », rappelle Olivier Gibert.
Le masque doit avant tout « être bien ajusté sur le visage pour éviter les fuites, c'est la priorité », explique Frédéric Dionnet, directeur du CERTAM à Rouen. Ce physicien, qui étudie la décontamination et les propriétés de filtration des masques professionnels, assure : « ce n'est pas la peine d'inventer des trucs incroyables, optons pour le coton ».
Un masque pour protéger et non filtrer« Cela ne sert à rien de chercher à augmenter la capacité de filtration d’un masque en tissu car le virus ne circule pas dans l’air », explique le professeur Simon Le Hello, responsable du service d’hygiène hospitalière au CHU de Caen.Le masque en tissu utilisé au quotidien, comme pour faire des courses, est un « masque barrière », précise le médecin. Il permet de ne pas contaminer les autres avec des projections de salive lorsque l’on parle, que l’on tousse ou que l’on éternue. « Le masque sert à protéger les autres », indique Simon Le Hello. Il ajoute : « c’est une protection collective car en protégeant les autres, on se protège soi-même ».Augmenter le risque de contamination par les mains« Il ne faut pas oublier la respirabilité. Le masque doit être pratique et supportable », rappelle le responsable du service de l’hygiène hospitalière, Simon Le Hello. Pour le professeur, ajouter une couche filtrante supplémentaire est aussi risqué. Elle peut rendre le masque inconfortable et inciter la personne qui le porte à l’ajuster et le manipuler davantage. Des particules virales peuvent être présentes sur la face extérieure du masque.« Le masque sert à protéger les autres », professeur Simon Le Hello, responsable du service d’hygiène hospitalière au CHU de Caen
Afin de limiter au maximum les risques de contaminations, les masques en tissu doivent être lavés à 60°C minimum pendant 30 minutes après chaque utilisation. Concevoir un masque avec une couche amovible nécessiterait de la retirer, de la jeter et donc de la toucher avant chaque lavage. C’est « un risque de contamination supplémentaire », met en garde Olivier Gibert de l'AFNOR.
Le masque barrière protège mais ne doit pas se substituer aux mesures de précautions. Olivier Gibert insiste : « le masque n’est qu’un complément aux gestes barrières et à la distanciation. Il ne doit pas susciter un sentiment de sécurité ». Il est recommandé de se laver les mains avant de l’enfiler et de ne plus le toucher. Pour le retirer, il faut saisir le masque par les élastiques, sans effleurer sa paroi.« Le masque n’est qu’un complément aux gestes barrières et à la distanciation. Il ne doit pas susciter un sentiment de sécurité », Olivier Gibert, AFNOR