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13 Reasons Why : comment et pourquoi la série Netflix a raté le coche - Dossier Série

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13 Reasons Why: Alors que la dernière saison de 13 Reasons Why débarque sur Netflix ce 5 juin, on fait le point sur les échecs de la série jusqu'ici. Qu'on l'apprécie ou pas, c'était l'une des séries phares de Netflix depuis

Alors que la dernière saison de 13 Reasons Why débarque sur Netflix ce 5 juin, on fait le point sur les échecs de la série jusqu'ici.

Qu'on l'apprécie ou pas, c'était l'une des séries phares de Netflix depuis le lancement de sa saison 1 le 31 mars 2017. 13 Reasons Why, avant les récentes Sex Education ou Euphoria, a abordé des sujets forts autour de l'adolescence comme le harcèlement scolaire, la drogue, le sexe, le suicide et bien sûr le viol, sujet central et moteur de la série durant ses trois premières saisons.

Cependant, malgré beaucoup de bonne volonté, la série scénarisée par Brian Yorkey a largement déçu à cause de nombreux choix douteux. Certaines décisions ont d'ailleurs provoqué de vives polémiques et controverses qui auront carrément amené à la suppression pure et simple d'une scène de la saison 1. Sûrement guidé par de bonnes intentions, 13 Reasons Why s'est malheureusement trouvé plus maladroite qu'habile au fur et à mesure de son avancée, l'empêchant réellement de se placer dans le haut du panier des séries adolescentes sociales et dites "nécessaires".

On fait le point sur ce que la série a largement raté et ce qui l'a empêché d'être un modèle de série adolescente, en trois raisons. Attention spoilers, évidemment !

SURPLUS DE THÉMATIQUES

Lors de sa saison 1, la série de Brian Yorkey dénonçait vigoureusement les agressions sexuelles et le harcèlement scolaire (pouvant mener au suicide). Sans se vautrer dans la complaisance ni pencher trop durement vers la noirceur, cette première saison trouvait alors un certain équilibre pour dessiner les méandres de l’adolescence et aborder frontalement des sujets forts. Elle traitait de quelques sujets précis (viol et suicide avant tout donc) et réussissait donc à les développer correctement et judicieusement pour instruire et alerter ses jeunes spectateurs. Difficile donc de comprendre comment et pourquoi la série n'est pas restée dans cette même lignée pour les récits suivants.

Car c'est en effet un des problèmes majeurs de 13 Reasons Why dès la saison 2 : sa propension à vouloir traiter de tout, et donc finalement de pas grand-chose. C'est bien simple, dans la saison 2, si le viol et les conséquences judiciaires et psychologiques d'un tel acte sur les victimes sont au centre du récit (d'autant plus avec l'actu #MeToo et Time's Up de l'époque), ces thématiques sont tristement engluées dans un amas de sujets politiques, judiciaires et sociaux gênant le développement de leur propos.

Photo Justin Prentice, Anne WintersLe harcèlement vécu consciemment et inconsciemment

Ainsi, la saison 2 parle de port d'arme, de drogue, de sexe, d'alcool... et brasse tellement de thèmes en même temps qu'aucun n'a le droit à un traitement solide et pertinent. Il en est malheureusement de même avec la troisième saison, s'agrippant à la fois aux thèmes de prédilection de la série (le viol, le harcèlement...) tout en essayant d'introduire en vain des sujets qu'elle finira par survoler (ou maltraiter) en permanence comme l'homosexualité, la rédemption, la vengeance et même l'immigration.

L'exemple le plus frappant est sans doute celui sur le port d'armes. Le grand final de la saison 2 et son cliffhanger avec la tentative de Tyler annonçaient clairement une étude poussée du Deuxième amendement de la Constitution américaine... et il n'en sera finalement rien. La troisième saison ne traite jamais réellement de ce sujet, qui est pourtant, un des déclencheurs majeurs de la saison 3 ou une des dérives tragiques du récit. En revanche, elle le met au coeur du gros cliffhanger final de la saison 3. Rebelote dans le vide ?

PhotoLe port d'armes, sujet sacrifié sur l'autel du vide

Certes, la série réussit à ausculter avec précision et justesse un élément : le viol et ses conséquences. On peut reprocher à la série de nombreuses faiblesses, mais son traitement de la culture du viol, de la toxicité masculine, de l'avortement, de la libération sexuelle, du culte de l'image... est une belle réussite au milieu de ce tableau imparfait. Loin des clichés et stéréotypes, la série réussit à parler avec bien plus de délicatesse, d'inspiration et de force que beaucoup de programmes adressés aux adolescents de ces thématiques.

On ne pourra donc s'empêcher de regretter, à juste titre, l'incapacité de la série à faire des choix pour ne pas affaiblir ses points forts. En voulant s'attarder sur une dizaine de personnages (et donc à une dizaine de vies et problématiques différentes), la série neutralise ses bonnes idées aux dépens de sous-intrigues pas inintéressantes sur le papier, mais expédiées. Dommage, tant la série avait de quoi, en se concentrant uniquement sur un sujet par saison ou uniquement une thématique sur sa totalité, devenir une série modèle.

Photo Alisha BoePourquoi ce qu'elle réussit n'a pas le droit à une plus grande place ?

MALADRESSE ET AMBIGUÏTÉ MALVENUE

Le plus grand mal de la série a sans doute été, comme expliqué dans le premier point, sa trop grande ambition. A trop vouloir en dire, on finit par effleurer et survoler plutôt qu'approfondir et creuser son propos, ses critiques et ses sujets. Cependant, la série doit également beaucoup de ses échecs répétés à sa maladresse permanente.

La série a évidemment créé la polémique et la controverse à plusieurs reprises, l'obligeant d'abord à introduire chacun de ses épisodes (pas seulement les plus violents ou durs psychologiquement) par un carton d'avertissement puis à censurer la scène de suicide du personnage de Katherine Langford jugée trop graphique par Netflix après l'avis d'experts médicaux sur la question du suicide.

Ce suicide mis en scène frontalement à l'époque (invisible aujourd'hui) était particulièrement esthétique et, d'un certain point de vue, faisait de cet instant une libération pour le personnage et rendait son dernier geste presque poétique. C'est dans ce genre de moment que la série se montre particulièrement maladroite comme elle l'a été également lors du viol de Tyler (Devin Druid) dans la saison 2.

Photo Devin DruidTyler, personnage complexe pas aidé par son traitement bancal

Il est difficilement compréhensible que des scènes aussi graphiques et violentes que celle d'un suicide adolescent ou du viol de Tyler n'aient pas été l'objet d'avertissements plus explicites. S'il est important de montrer cette réalité quotidienne, la série choque et heurte malheureusement plus son jeune public à travers ces séquences macabres qu'elle ne les instruit. Avec une scène moins visuelle, la série aurait sans doute pu marquer profondément leurs esprits sur le fond et non sur la forme.

Des problèmes graphiques qui ne sont pas présents dans la saison 3, mais qui n'empêche pas la série d'opérer des choix particulièrement malvenus. Tout au long de ses 13 épisodes, cette troisième saison a le malheur de présenter deux poids deux mesures avec l'ensemble de ses héros et de ses "méchants". En minimisant voire acceptant les actions intolérables de ses héros tout en condamnant chacune des "méchants", la série pose de nombreux soucis d'éthiques. Il est, par exemple, inconcevable que la série ne réprimande jamais ses héros et prône carrément l'idée que se faire justice soi-même (quitte à tuer) peut être le moyen de rectifier les erreurs de la Justice.

Si la série s'adressait à un public d'adultes, le raisonnement paraîtrait moins dérangeant mais la cible majoritaire de 13 Reasons Why étant bel et bien les adolescents, le manque de nuance sur leur comportement est dérangeant, inopportun et ambigü.

Photo Justin PrenticeUn meurtre vengeur qui mènera aux mêmes injustices dénoncés par les héros

Difficile également de comprendre, les traitements viscéralement opposés des personnages de Monty (Timothy Granaderos) et Tyler. Le premier est enfoncé pour tous ses crimes sans jamais avoir le droit à une contrebalance solide sur les malheurs et violences qu'il vit quotidiennement à cause de son père. Le deuxième, au contraire, est pardonné immédiatement pour son geste fou afin de mettre l'accent sur le viol qu'il a subi et les conséquences qui en découlent sur sa psychologie. Une attitude partiale qui pointe le manque de nuance sidérant de la série et les incohérences dont elle fait preuve.

Le cas Bryce (Justin Prentice) et le traitement de son arc de rédemption est d'ailleurs la démonstration ultime de l'inhabileté de la série et de son impéritie dans le traitement de ses personnages. Bryce est présenté à juste titre comme le mal absolu (il a violé une dizaine d'adolescentes) durant les deux premières saisons sauf que... la série se veut empathique avec lui dans la saison 3 car il veut devenir une meilleure personne après sa prise de conscience. Si son évolution est logique, demander aux spectateurs de compatir de sa situation est en revanche extrêmement malavisé et particulièrement douteux.

13 Reasons Why a sans doute des intentions louables et souhaite indiscutablement promouvoir le Bien plutôt que la Mal. Pour autant, les choix scénaristiques et les différentes tonalités vis-à-vis des personnages provoquent des maladresses difficilement pardonnables (et dont on se demande comment elles ont réussi à franchir tous les contrôles de la production).

photo, Justin PrenticeA-t-on vraiment envie d'avoir de la compassion pour un violeur ? Non

NARRATION POUSSIVE ET EXISTENCE BANCALE

Ce n'est clairement pas le point le plus dérangeant de la série. Au contraire, la structure narrative de 13 Reasons Why semble presque être en odeur de sainteté par rapport aux deux points précédents. Néanmoins, c'est bien l'une des tares qui a accompagné la série Netflix sur l'ensemble de ses trois premières saisons.

Avec son utilisation des différentes cassettes pour développer l'intrigue et révéler le pourquoi du comment à travers le parcours de plusieurs personnages, la saison 1 démarrait de manière ludique et légérement addictive quelquefois avec une raison du titre par épisode, soit 13 au total. Malheureusement, le processus manquait rapidement de vigueur et les différents allers-retours entre passé et présent finissaient par perdre en en rythme, ralentir l'avancée du récit pour des sous-intrigues faiblardes et tout simplement ennuyer.

La saison 2 subit encore plus les contraintes que c'était donné la saison 1 en découvrant l'envers du décor grâce au procès et témoignages de chaque élève. La narration repose sur de nouveaux flashbacks contextualisant le récit mais n'apportant malheureusement pas grand-chose à la série en elle-même. Tout juste pourra-t-on se féliciter de voir la série conclure l'arc du personnage de Katherine Langford, ce qui aurait donné une fin satisfaisante ou opportune (c'est selon).

Photo Dylan MinnetteUne narration qui avait du sens avec le titre à l'origine

Pourtant, la série a finalement eu le droit à une saison 3 et donc à une saison 4. La raison même de l'existence de ces deux dernières saisons est d'ailleurs floue et semble plus reposer sur le succès des précédentes que sur le bon sens. Dans une interview accordée à BuzzFeedNews, Brian Yorkey affirme inévitablement le contraire :

« Durant la production de la saison 2, lorsqu’il est devenu clair que nous pourrions avoir l’opportunité de proposer d’autres saisons à la série, j’en suis rapidement arrivé à la conclusion que c’était une histoire qui serait répartie sur quatre saisons. Je suis toujours un peu méfiant à l’égard des séries centrées sur des lycéens qui durent plus de quatre saisons, car après tout le lycée dure quatre ans [ndlr : aux Etats-Unis] ».

Difficile de le croire cependant. En effet, à partir du moment où la série s'appelle 13 Reasons Why et repose sur l'idée de 13 raisons expliquant le suicide d'une jeune adolescente, difficile d'expliquer pourquoi la série a continué derrière, le titre de la série n'étant plus justifiable. Vous nous direz, ce n'est pas la première fois, après tout, Prison Break a fait le même coup il y a une quinzaine d'années. Cependant, cela n'excuse rien (et pour la série d'incarcération non plus).

En étirant inutilement les malheurs de ses personnages lors d'une troisième saison malade, la série Netflix a perdu sa raison d'être originelle. Sa narration n'en a que plus subi ses errements, ses bafouilles, ses manoeuvres, ses étourderies et ses nombreuses bévues. Le mal était fait.

Affiche, Dylan Minnette

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